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Procès
de condamnation
- préliminaires
Lettre de l'université de Paris
au Roi de France et d'Angleterre - 21 novembre 1430 |
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"A très
excellent prince, le Roy (1) de France
et d'Angleterre, nostre très redoubté et souverain
seigneur et père.
Très excellent prince, nostre très redoubté
et souverain seigneur et père, nous avons de nouvel entendu
que en vostre puissance est rendue à présent ceste
femme dicte la Pucelle, dont nous sommes moult joyeux, confians
que par vostre bonne ordenance, sera icelle femme mise en justice
pour réparer les grans maléfices et escandes advenus
notoirement en ce royaume à l'occasion d'icelle, ou grant
préjudice de l'onneur divin, de nostre sainte foy et de tout
vostre bon peuple. Et pource qu'il nous appartient singulièrement,
selon nostre profession, extirper telles iniquitez manifestes, mesmement
quant nostre foy catholique est en ce touchée, nous ne povons
ou fait d'icelle femme dissimuler la longue retardation de justice
qui doit desplaire à chacun bon chrestian, et mesmement à
Vostre royal Majesté plus que à nul autre, pour la
grant obligacion que vous devez à Dieu en cognoissant les
haulx biens, honneurs et dignitez qu'il a ottroyez à vostre
excellence. Et combien que sur nous ayons par plusieurs fois escript
et ancores à présent, nostre très redoubté
et souverain seigneur et père, en proposant tousjours très
humble et loyal recommendacion à ce que ne soions notez de
négligence aucune en si favorable et nécessaire matière
: Nous supplions très humblement, et en l'onneur de nostre
Sauveur Jhésuschrist, déprions très acertes
vostre haulte excellence, que icelle femme vous plaise ordener estre
mise briefment ès mains de la justice de l'Église,
c'est-à-dire de révérent père en Dieu
nostre honoré seigneur l'évesque et conte de Beauvais,
et aussi l'inquisiteur ordené en France, ausquelz la cognoissance
des meffaiz d'icelle appartient espécialement en ce qui touche
nostre dicte foy, afin que par
voie de raison soit faicte discucion convenable sur les charges
d'icelle, et telle réparacion comme au cas appartiendra,
en gardant la sainte vérité de nostre foy, afin que
par voie de raison soit faicte discucion convenable sur les charges
d'icelle, et telle réparacion comme au cas appartendra, en
gardant la sainte vérité de nostre foy, et mettant
toute erreur faulse et scandaleuse opinion hors des courages de
vos bons, loyaulx et chrestians subgez. Et nous semble moult convenable,
se ce estoit le plaisir de vostre haulttesce, que ladite femme fust
amenée en ceste cité pour faire son procès
notablement et seurement ; car par les maistres, docteurs et autres
notables personnes estans pardeça en grant nombre, seroit
la discucion d'icelle de plus grant réputacion que en autre
lieu ; et si est assez convenable que réparacion desdiz escandes
soit faite en ce lieu, ouquel les faits d'icelle ont été
divulgués et notoires excessivement. Et en ce faisant gardera
Vostre royal Majesté sa grant loyauté envers la souveraine
et divine Majesté ; laquelle vueille octroyer à vostre
excellence prospérité continuelment, félicité
sans fin. Escript à Paris, en nostre congrégacion
générale solennelment célébrée
à Saint-Mathurin, le XXIe jour de novembre, l'an mil CCCC.XXX.
Vostre très humble et très dévote fille : l'Université
de Paris." Sic signata : HEBERT."
Notes
:
Source : E. O'Reilly - Procès de Jeanne d'Arc
- tome II - 1868
Texte original.
1 L'orthographe
d'époque est copiée textuellement.
Illustrations :
Sceau du roi Henri VI (tiré d'un acte de 1430 conservé
aux archives de France. Ses pieds portent sur deux lions. La devise
latine signifie "Henri par la grâce de Dieu roi de France
et d'Angleterre".
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