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L'ermitage et la chapelle Notre-Dame de Bermont

e sanctuaire religieux que Jeannette se plaisait le plus à fréquenter, après l'église de son village était la chapelle Notre Dame de Bermont. Cette chapelle, fondée pour l'invocation de Saint-Thiébaut, faisait partie d'un ermitage situé au-dessus du village de Greux, à trois kilomètres de Domrémy, en direction de Vaucouleurs. Au procès de réhabilitation, les témoignages rapportent que Jeanne s'y rendait pratiquement tous les samedis avec sa soeur ou avec d'autres camarades. Elle y allait "en pélerinage" et y portait des cierges pour les brûler en l'honneur de la vierge Marie. Le samedi était le jour consacré à la Vierge.

   
  
Carte des environs de Domrémy-Greux. L'ermitage se trouve à environ 3 kilomètres de la maison de Jeanne.

   L'ermitage de Bermont fut fondé certainement au XII° siècle par l'abbaye de Bourgueil du diocèse d'Angers. Il appartenait toujours vers la fin du XIIIe siècle, à cette abbaye qui y entretenait un religieux. Cet ermitage étant fort éloignée du monastère de Bourgueil et dont l'entretien, devait être onéreux, les Bénédictins jugèrent avantageux de s'en séparer ; c'est ce qu'ils firent en faveur de Geoffroy de Bourlémont, le lundi avant la Saint-André en l'an de grâce 1263.

   


   Geoffroy de Bourlémont avait autrefois fondé l'hospice de Gerbonvaux. Conformément à l'acte de vente, il joigna, en 1265, à l'hospice, la "maison" de Bermont avec ses dépendances, rentes et revenus, à condition que les frères feraient célébrer l'office divin, au moins trois fois par semaine, dans la chapelle de Bermont : "la maison de Biaumont avec ses dépendences et les rentes et acquêts de la tenue de ladite maison, ainsi ceux qu'il pourroit faire, soit en four, moulin, étang ou autrement, afin que des rentes de ces maisons, le maître et les malades de Gerbonval puissent être soutenus, et que les maîtres et frères chantent ou fassent chanter en la chapelle de Biaumont au moins trois fois dans la semaine ". Celle-ci devint donc une succursale de l'hospice. Cet ermitage de Bermont demeura lié au sort de l'hospice de Gerbonvaux jusqu'à la Révolution.
  Un titre de 1269 nous apprend qu'il y avait près de Bermont une tuilerie et deux étangs. En 1595, toute la chapelle fut couverte à neuf.

   


  Peu après, Vitrail de l'église de Greux représentant Jeanne priant ND de Bermontle maître de Gerbonvaux désira s'affranchir des obligations de Bermont. L'affaire vint devant le tribunal ecclésiastique et l'Official, par le chanoine de Vaucouleurs, rendit une sentence le 8 janvier 1601 le tenant à célébrer un office le dimanche et les jours de fêtes, assavoir "Pasques, Penthecostes, Assention, Saint Jean Baptiste, Toussainctz, le jour du Saint Sacrement, Noël et toutes les festes de Nostre Dame, et ès jours de feste Monsieur Sainct Thiébaut, soub l'invocation duquel Sainct ladicte chapelle est fondée". Le plaignant ayant en effet argué que les revenus de Bermont étaient insuffisants pour assurer les trois offices hebdomadaires prévus par l'acte fondateur de 1263. D'autre part le plaignant était tenu de "ledict sieur fera, dedans six mois, réfectionner les ruynes qui sont en ladicte chapelle, et mentionnés en nostre procès verbal, contenant la visitation par nous faicte d'icelle, en condampnant ledict demandeur ès despens de ceste instance et de ladicte Visitation, la taxe à nous réservée". Enfin, le maitre de Gonbervaux fut condamné à payer une amende pour avoir délaissé le service pendant deux mois à la chapelle de Bermont.
  Le procès-verbal descriptif de l'état de 1601 a disparu, mais nous apprenons grâce à ce procès que trois offices par semaine se déroulaient encore dans la chapelle du temps de Jeanne d'Arc.

                     Sainte-Anne


  Saint Thiébaut est né à Provins vers 1030, au sein d'une famille alliée aux comtes de Champagne. Après une courte vie d'ermite, il meurt en Italie en 1066. Statue de St ThiebautIl est canonisé en 1073 et son culte se répand rapidement en France. Le ou les ermites qui habitaient l'ermitage avait probablement en compte la garde de la chapelle. Il ne semble pas que cette chapelle ait contenu autrefois des reliques du Saint contrairement à d'autres sanctuaires en France. Le dernier pélerinage consacré à St Thiébaut se déroulera en 1806 (on l'invoquait contre les intempéries climatiques).
  Au cours de la guerre de Trente Ans, les suédois ravagent la contrée et détruisent, en 1635, une grande partie du village de Greux ainsi que son église.
  L'état dans lequel se trouvait la chapelle au début du XVIII° siècle est indiqué dans un procès verbal suite à une visite faite par ordre de l'autorité ecclésiastique le 12 juillet 1702. Deux ermites y habitent. La chapelle à cette époque semble en assez bon état (murailles et toiture). Les statues soit sont absentes, soit ne sont pas décrites. Des fleurs de lis sont signalées entre les croisillons de six croix se trouvant dans la chapelle.

                        
       Notre Dame de Bermont, la statue que Jeannette révérait presque tous les samedis dans sa jeunesse

  Au XIXe siècle, l'abbé Bourgaut décrit deux statues. La première représente Notre Dame de Bermont : la Vierge couronnée, portant un sceptre de la main droite et de l'autre l'enfant Jésus, lui-même tenant un oiseau. Cette antique statue est en chêne, polychromé au XIXe siècle, et placée à gauche de l'autel. Sur la photo ci-dessus (2004) les couleurs à l'origine très vives sont maintenant presqu'effacées. Cette statue, du XIV° siècle a été vénérée par Ste Jeanne et se trouve maintenant dans la crypte de la basilique à Domrémy. Elle est un peu moins grande que nature. La deuxième décrite par l'abbé Bourgaut est celle de Saint Thiébaut qui lui fait pendant du côté opposé de la fenêtre absidale.
   Le choeur de la chapelle est voûté d'un berceau brisé (XV-XVII° siècle). Un crucifix vraisemblablement du XIV° siècle et l'un des plus anciens du département est accrochée à son chevet. Jeanne d'Arc l'a sans doute prié très souvent.

  Dans le clocheton moderne, une cloche du XV° siècle, aussi l'une des plus anciennes de la La cloche de la chapelle (2004)région, on lit difficlement l'inscription + auemreia deaarm onqt soit certainement "Ave Maria de Barmonte". D'autres y lisent les initiales A. V. E. M. P. E. I. A. D. E. P. M. A. N. G. T. En voici une interprétation qui est très respectable puisqu'elle proviendrait de l'Académie des inscriptions et belles-lettres : "Ad Virginem E Manibus Populi Extrahentem Imperium Anglicani Dedicatum Est Post Mortem Ad Nominis Gloriam Tintinnabulum" soit : "A la vierge arrachant le royaume aux mains du peuple anglais, a été dédiée, après sa mort, pour la gloire de son nom, cette petite cloche". Ave Maria de Barmonte semble plus vraisemblable.

  En 1793, Bermont fut vendu comme bien national. Les terres furent morcelées à la suite de cette aliénation. Cependant les terres de l'ermitage furent rachetées vers 1834-35 par Claude J.B. Sainsère. Grâce à sa dévotion à Jeanne d'Arc et à son zèle, la chapelle de Bermont a pu être maintenue et en partie reconstruite. Il y habitera jusqu'en 1848. Jusqu'en 1902, la famille Sainsère possédera cet ermitage habité périodiquement par des prêtres.

   


  Le 10 juillet 1878, l'évêque de Saint-Dié organise, en protestation contre les festivités prévues pour le centenaire de la mort de Voltaire (créateur d'un odieux pamphlet à propos de Jeanne d'Arc), un pèlerinage à Bermont, qui réunira plus de 10.000 personnes. C'est le premier grand pèlerinage au berceau de Jeanne d'Arc. De là nait l'idée de la fondation d'un sanctuaire national dédié à Jeanne d'Arc. Mgr Dupanloup et la duchesse de Chevreuse retiennent le lieu de Bermont pour son édification mais c'est finalement, pour des raisons de succession de la famille Sainsère, le site du Bois Chenu qui sera retenu pour l'édification de la basilique.

  


  Les dates et renseignements ci-dessous sont dues à l'association "Notre Dame de Bermont" (http://bermont.free.fr).
  En juin 1902, Bermont est cédé à "l'Association des Amis de Jeanne d'Arc", fondée afin de veiller à la conservation de l'ermitage.
  Le 8 décembre 1927, "l'Association des Amis de Jeanne d'Arc" vend le domaine à "l'Association diocésaine des Amis de Jeanne d'Arc", créée en 1925.
  A partir de 1944, un pèlerinage annuel à Notre Dame de Bermont organisé par les paroisses de Domremy de Greux et des environs, chaque 1er dimanche d'août, se met en place.
  Le 5 septembre 1976, la statue de Notre Dame de Bermont, est installée dans la crypte de a basilique de Domremy.
  Le 8 décembre 1992, "l'Association Notre Dame de Bermont–Sainte Jehanne d'Arc" est fondée en vue "de la restauration, de la gestion et de l'animation de l'ermitage, dans le respect et la continuité de son passé".
  Le 4 juin 1994, Mgr Paul-Marie Guillaume, évêque de Saint-Dié, consacre la chapelle au Sacré Cœur et au Cœur Immaculé de Marie.
  En 1995, "l'Association diocésaine des Amis de Jeanne d'Arc" est supprimée et la propriété de Bermont est dévolue à l'Association Diocésaine de Saint-Dié.
  Le 30 juin 1998, la chapelle de Bermont est mise à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, "en tant que témoin de l'épopée johannique", après l'annonce, le 10 mai 1998, des découvertes de peintures murales représentant Jeanne d' Arc.
  Le 2 septembre 2000, Mgr Paul-Marie Guillaume solennise la translation des reliques de Saint Thiébaut.

Deux dessins de Jeanne d'Arc découverts à Bermont en 1998 :

  Au cours d'un nettoyage de la peinture représentant St Thiébaut dans la chapelle (voir photo ci-dessus), deux dessins antérieurs à l'image de St Thiébaut ont été révélés. Ils représentent assurément Jeanne d'Arc. L'une de ces peintures murales la montre jeune priant avec un petit chien dans les bras, l'autre avec des yeux bleus, en habit d'homme agenouillée et priant.
  Ces œuvres sont du XV° siècle. Sont-elles contemporaines des dessins de l'épopée de Jeanne qui avait été dessinées sous Louis XI sur la façade de la maison natale de Jeanne et attestés par Montaigne à la fin du XVI° siècle ?

Avec l'autorisation à titre exceptionnel du bureau de l'association (en date du 15/11/2006) et tous nos remerciements, voici les deux représentations de Jeanne :

     


     

Nota : Rappel, les photos sont interdites dans la chapelle de ND de Bermont, les photos de ces dessins ne sont reproduits qu'avec l'autorisation de l'association Notre-Dame de Bermont.

La source Saint Thiébaut près de l'ermitage :

   
                           Jeanne accédait à la chapelle sur une élévation de terrain par ce chemin

  
                    La source jaillit (sur la gauche de l'image) et alimente un petit étang (photo 2004)

   Au pied de la hauteur sur laquelle se trouve l'ermitage se trouve un étang alimenté par la fontaine Saint-Thiébaut. Au procès de réhabilitation, on apprend que cette fontaine était célébrée le dimanche de Latære Jerusalem par les enfants de Greux. Ceux de Domrémy allait à la fontaine des groseillers. Cette source, comme celle du Bois-Chesnu, était réputée pour guérir les fiévreux.

                                    



Illustrations :
- Carte des environs de Domrémy ("La grande histoire illustrée de Jeanne d'Arc - H.Debout - ed.1912)
- La chapelle en 1910 (ibid.)
- L'intérieur de la chapelle ("Au pays de Jeanne d'Arc - Jean de Metz - 1910)
- Vitrail de l'église de Greux (XVIII° siècle) représentant Jeannette priant ND de Bermont (2004 - auteur du site)
- Statues de Ste Anne et de St Thiébaut dans la chapelle ("La grande histoire illustrée de Jeanne d'Arc - H.Debout - ed.1912)
- Statue en bois de Notre Dame de Bermont dans la crypte de la basilique de Domrémy (auteur du site - 2004)
- Statue de Saint-Thiébaut.
- Statue en pierre peinte de ND de Bermont vers 1910 ("La grande histoire illustrée de Jeanne d'Arc - H.Debout - ed.1912)
- Crucifix de la chapelle datant du XIV° siècle vraisemblablement.
- Cloche "Ave Maria Barmonte" de la chapelle
- l'ermitage en 2004 (photo auteur site)
- L'arrière de la chapelle et la clairière ou se trouve l'ermitage en 2004 (photos auteur site)
- Deux dessins découverts en 1998 dans la Chapelle (association Notre-Dame de Bermont)
- Chemin "de Jeanne" montant vers l'ermitage en 2004 (photo auteur site)
- Fontaine St Thiébaut et étang en 2004 (photo auteur site)
- Captage de la source St Thiébaut vers 1910 ("La grande histoire illustrée de Jeanne d'Arc - H.Debout - ed.1912).



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