Accueil                                                         Admin
23 novembre 2024  

 Son histoire

par Henri Wallon

 Les sources

Procès condamnation

Procès en nullité...

Chroniques & textes

Lettres de J. d'Arc

 Compléments

Bibliographie

Librairie numérique

Dossiers

 Recherches

Mises à jour du site

Recherches

 

 ACCÈS CARTES

     Carte de France (1429)

     Carte Nord France (1429)

     Carte environs Domrémy

     Carte environs Orléans

     Carte siège d'Orléans

     Vues Orléans et pont

 

 Interactivité

Contact

Liens johanniques

Sauvez la Basilique

Livre III - REIMS
I - La campagne de la Loire p. 177 à 208

a délivrance d'Orléans fit dans tous les esprits une impression profonde. La Pucelle avait donné son signe. Ce grand siège, qui durait depuis sept mois, elle y avait mis fin en une semaine. Ces bastilles qui s'appuyaient les unes les autres, elle les avait enlevées l'une après l'autre, ou plutôt il avait suffi qu'elle en prît trois pour que tout le reste fût évacué.
  Jeanne était donc bien l'envoyée de Dieu, c'était le cri du peuple ; c'était aussi le sentiment des docteurs les plus autorisés.
  Jean Gerson, dans un écrit daté du 14 mai, six jours après la levée du siége (il mourut le 12 juillet suivant : c'est, selon toute apparence, son dernier acte public), Jean Gerson examinait si l'on pouvait, si l'on devait croire à la Pucelle. Il émanerait toutes les raisons qui militaient en sa faveur : l'adhésion du conseil et des gens de guerre qui la suivaient, au péril même du ridicule ; l'enthousiasme du peuple, le découragement de l'ennemi ; et avec ces raisons extérieures, d'autres plus intimes : la vie passée de Jeanne d'Arc et sa manière de se conduire, faisant tout, simplement, sans superstition ni vue intéressée, parlant au nom du Ciel sans cesser d'agir par elle-même, ou tenter Dieu par témérité. Il se prononçait donc pour elle, ajoutant : "Quand bien même (ce qu'à Dieu ne plaise) elle serait trompée dans son espoir et dans le nôtre, il ne faudrait pas conclure que ce qu'elle a fait vient de l'esprit malin et non de Dieu, mais plutôt s'en prendre à notre ingratitude et au juste jugement de Dieu, quoique secret." Et il terminait ses observations par cet avertissement prophétique : "Que le parti qui a juste cause prenne garde de rendre inutile par incrédulité, ingratitude ou autres injustices, le secours divin qui s'est manifesté si miraculeusement, comme nous lisons qu'il arriva à Moïse et aux enfants d'Israël : car Dieu, sans changer de conseil, change l'arrêt selon les mérites (1)."

  C'est aussi la pensée qui domine le traité de l'archevêque d'Embrun, Jacques Gelu, écrit dans le même mois (mai 1429). La Pucelle est-elle envoyée de Dieu ? Quelle est sa mission ? Quelles en sont les raisons ? Et si Dieu veut manifester sa puissance, a-t-il besoin d'un intermédiaire ? n'a-t-il pas les anges ? pourquoi une jeune fille élevée parmi les brebis ? Le prélat se pose et résout toutes les questions dans le même sens que J. Gerson ; et ses conclusions sont plus expresses encore et plus pratiques. Il veut que, sans négliger les voies ordinaires en ce qui touche les approvisionnements, les finances et tous les besoins de l'armée, on suive surtout l'inspiration de Jeanne, et qu'on la préfère aux suggestions d'une sagesse tout humaine. Il rappelle Saül. Le roi doit craindre, s'il omet de faire ce que dit la Pucelle, croyant mieux faire, de se voir abandonné du Seigneur, et privé de l'objet où il tend. C'est pourquoi le pieux évêque donne le conseil qu'en toute chose on commence par prendre l'avis de Jeanne, et que même dans les cas douteux, si elle y tient, on s'y conforme. Il voudrait que le roi conférât chaque jour avec elle sur ce qu'il doit faire pour accomplir la volonté de Dieu, et qu'il le fît en toute humilité et dévotion, "afin que le Seigneur n'ait pas raison de retirer sa main, mais qu'il accorde la continuation de sa grâce (2)."

  Les avis des docteurs n'étaient plus bien nécessaires pour que le peuple crût à Jeanne ; mais leurs conseils étaient loin d'avoir perdu leur opportunité auprès du roi. Les conseillers intimes de Charles VII, voyant la confiance qu'elle inspirait autour d'elle, l'avaient acceptée sans trop de peine pour délivrer Orléans. Si elle n'en chassait l'ennemi, ils étaient forcés de se déloger eux-mêmes. Les Anglais, maîtres de la Loire, ne leur permettaient plus d'y demeurer en sûreté. Mais l'affaire n'en était plus là : Orléans délivré, la Pucelle voulait mener le roi à Reims, et l'entraîner, après le sacre, à la délivrance du royaume. Il fallait donc qu'ils payassent de leur personne, ou du moins qu'à la suite du roi ils se missent en route à travers les provinces occupées par l'ennemi. Cela coûtait à leur lâcheté, ou, si l'on veut, à leur nonchalance; et ils était résolus de prendre tous les prétextes pour en reculer le moment (3).
  Jeanne leur devait laisser peu de loisir. En quittant Orléans, elle était venue à Blois, puis à Tours, où le roi vint de Chinon à sa rencontre. Charles la reçut avec de grands honneurs. Quand la Pucelle se présenta devant lui, l'étendard à la main et lui fit révérence, le roi lui-même, dit une ancienne chronique, "ôta son chaperon et l'embrassa en la saluant et, comme il sembla à plusieurs, volontiers l'eût baisée de la joie qu'il avoit." Il n'ignorait point quelle part elle avait eue à cette victoire aussi prompte qu'inespérée. Dans sa lettre aux habitants de Narbonne, lettre écrite pendant qu'on apprenait, pour ainsi dire, coup sur coup, la prise de Saint-Loup, puis des Tourelles, et enfin la levée du siège, le roi, sans dire encore tout ce qu'elle avait été dans le succès, leur signalait les choses merveilleuses qu'on rapportait d'elle, la nommant seule et constatant qu'elle avait été présente à tout. Il pouvait maintenant en savoir bien davantage. Aussi lui fit-il "grande chère." Il voulait même qu'elle prît pour armoiries les lis de France et la couronne avec l'épée tirée pour la conquérir : c'est le blason qui demeura dans sa famille. Mais Jeanne n'était pas venue chercher la récompense, elle venait solliciter l'achèvement de son œuvre, et c'est ce qu'on semblait le moins disposé à lui accorder (4).

                              

  Charles convoqua ses capitaines et "autres sages de sa cour." Il tint plusieurs conseils (à Tours), et la prudence des conseillers eut plus d'une excellente raison à opposer aux desseins de la jeune fille. On alléguait la grande puissance des Anglais et des Bourguignons, et la détresse du roi, qui n'avait pas de quoi soudoyer l'armée nécessaire au voyage. La Pucelle ne demandait pas tant de choses pour le conduire, lui et sa compagnie, jusqu'à Reims, "sûrement et sans destourbier" (empêchement), mais elle voulait qu'on se pressât. Elle disait "qu'elle ne durerait guère plus d'un an, et qu'on songeât à bien besogner cette année :" car elle avait beaucoup à faire. Après le sacre, elle avait encore, disait-elle, au rapport du duc d'Alençon, à chasser les Anglais, à délivrer le duc d'Orléans. Si l'on croyait à sa mission, c'était bien le cas de faire selon l'avis de Jacques Gelu : imposer silence à toutes les objections et la suivre. Mais ceux qui ne la voulaient pas suivre affectaient de croire que ce n'était pas si clairement l'ordre de Dieu (5).

  Un jour, la Pucelle, impatiente de ces lenteurs, vint avec Dunois au château de Loches, et fut menée à la chambre de retrait où le prince était conversant avec Christophe d'Harcourt, l'évêque de Castres, son confesseur, et le seigneur de Trêves (Robert le Maçon), ancien chancelier de France. Elle frappe à la porte, et dès qu'elle est introduite, elle se jette aux pieds du roi, et embrassant ses genoux :
  "Gentil Dauphin, dit-elle, ne tenez plus tant et de si longs conseils, mais venez au plus tôt à Reims pour recevoir votre digne couronne."
  Christophe d'Harcourt lui demanda si ses voix lui avaient dit cela :
  "Oui, répondit-elle, je suis fort aiguillonnée touchant cette chose".
— Ne voudriez-vous pas, ajouta d'Harcourt, nous dire ici, devant le roi, comment font vos voix quand elles vous parlent ?
Je conçois bien, dit-elle en rougissant, ce que vous voulez savoir, et vous le dirai volontiers."
  Et comme le roi, la voyant émue, lui demandait s'il lui plaisait de s'expliquer devant les assistants, elle répondit qu'elle le voulait bien, et raconta, comment, lorsqu'elle s'affligeait des doutes que l'on opposait à sa mission, elle se retirait à part et priait Dieu, se plaignant de ce qu'on ne la voulait pas croire ; et sa prière faite, elle entendait une voix qui lui disait :
  "Fille Dé (de Dieu), va, va, va, je serai à ton aide, va !" et quand cette voix lui venait, elle était bien réjouie et elle eût voulu être toujours en cet état. En rapportant les paroles de ses voix, elle rayonnait d'une joie divine et levait les yeux au ciel (6).

        

  Ces paroles prenaient leur autorité des merveilles qu'elle venait d'accomplir. Le roi et personne autour de lui ne le devaient méconnaître : mais pouvait-on aller à Reims, en laissant les Anglais derrière soi sur la Loire, à Baugency, à Meun, à Jargeau ? Les Anglais, en effet, chassés de devant Orléans, s'étaient repliés sur ces villes. Talbot avait occupé Meun; Suffolk, Jargeau, et naguère, après la levée du siège d'Orléans, quand Dunois, Boussac, Graville, Xaintrailles, voulant profiter de l'impression que Jeanne avait produite, et peut-être de son absence, s'étaient portés sur Jargeau dans l'espoir d'enlever la place, ils y avaient dû renoncer. Les Anglais tenaient donc toujours, et il y avait à craindre que cette marche aventureuse vers le Nord ne leur abandonnât le Midi. D'ailleurs, pour rassembler les princes et les seigneurs qui devaient accompagner le roi au sacre, il fallait du temps : le pouvait-on mieux employer qu'en enlevant aux Anglais leurs dernières positions sur la Loire ? Jeanne adopta le projet ; selon Perceval de Cagny, ce fut même elle qui le proposa. On réunit, à l'aide des capitaines revenus d'Orléans, une petite armée qui fut placée sous les ordres du jeune duc d'Alençon. Libéré enfin de sa rançon au prix des plus durs sacrifices, il brûlait de venger son ancien échec et de regagner, au service du roi, l'équivalent de ce qu'il y  avait perdu. Le roi répondit à ses désirs en lui donnant le commandement de cette expédition ; mais il plaçait auprès de lui la Pucelle, avec la recommandation expresse qu'il ne fît rien sans son avis (7).

        

  Jeanne avait pris dès lors un ascendant auquel personne ne pouvait plus se soustraire, et elle l'exerçait avec un naturel qui, dans cette âme simple et sans prétention, témoigne bien de la source où elle puisait tant d'autorité. Gui de Laval, dans une lettre écrite le 8 juin 1429, au milieu des derniers préparatifs de la campagne, en fait à sa mère et à son aïeule un tableau animé, où la Pucelle est peinte au vif dans toute la grâce et la séduction de son rôle, traitant familièrement avec les plus hauts personnages, donnant tour à tour le signal des prises d'armes ou des processions. Le roi était venu à Saint-Aignan (Berri), et Jeanne d'Arc s'était rendue à Selles, à quatre lieues de là, où toutes les troupes devaient se réunir pour entrer en campagne. Gui de Laval étant venu rejoindre le roi, le prince lui fit un excellent accueil, voulut qu'il vît Jeanne, et comme il se rendait lui-même à Selles, il la fit venir au-devant de lui. "Et fit, dit le jeune comte, ladite Pucelle, très bonne chère à mon frère et à moi, armée de toutes pièces, sauf la tête, et tenant la lance en main. Et après que fûmes descendus à Selles, j'allai à son logis la voir; et fit venir le vin, et me dit qu'elle m'en feroit bientôt boire à Paris ; et ce semble chose toute divine de son fait, et de la voir et de l'ouïr." Puis, racontant comment le même soir (6 juin) elle partit pour Romorantin avec une portion des troupes : "Et la vis monter à cheval, armée tout en blanc, sauf la tête, une petite hache en sa main, sur un grand coursier noir, qui à l'huis de son logis se démenoit trèsfort, et ne souffroit qu'elle montât. Et lors elle dit : "Menez-le à la croix," qui étoit devant l'église auprès, au chemin. Et lors elle monta, sans qu'il se mût, comme s'il fût lié. Et lors se tourna vers l'huis de l'église, qui étoit bien prochain, et dit en assez bonne voix de femme : "Vous, les prêtres et gens d'Église, faites procession et prières à Dieu." Et lors se retourna à son chemin, en disant : "Tirez avant, tirez avant," son étendard ployé que portoit un gracieux page, et avoit sa hache petite en la main (8)."

  Cette lettre témoigne en même temps de l'enthousiasme et du zèle que la Pucelle inspirait. Tout le monde voulait l'accompagner : "ne oncques gens n'allèrent de meilleure volonté en besogne." La cour manquait d'argent, et on n'avait rien à attendre d'elle, mais on savait y suppléer : on se ruinait pour combattre avec Jeanne. "Pour ce, continue le prince, vous, madame ma mère, qui avez mon sceau, n'épargnez point ma terre par vente, ni par engage, là où nos personnes sont à être sauvées, ou aussi par défaut abaissées, et par aventure en voie de périr." La dame de Laval, par un sentiment bien pardonnable à une mère, en envoyant ses deux fils à la cour, aurait voulu qu'ils demeurassent auprès du roi : elle avait écrit en ce sens à la Trémouille son parent, et peut-être aussi à la Pucelle. Jeanne entrant dans ses vues, voulait faire patienter le jeune comte, lui disant que lorsque le roi prendrait le chemin de Reims, il irait avec lui. "Mais jà Dieu ne veuille, s'écrie-t-il tout bouillant d'ardeur, que je le fasse et que je ne aille. Et autretant (tout autant) en dit mon frère et comme Monseigneur d'Alençon : abandonné seroit celui qui demeureroit (9) !"

       

  On était dans le mouvement du départ. Le duc d'Alençon venait d'arriver avec sa compagnie l'avant-veille (lundi 6 juin) ; le seigneur de Rais était attendu dans la journée (mercredi 8), et, ce même jour, Alençon, Dunois et Gaucourt devaient quitter Selles pour rejoindre Jeanne, qui, dès le 6, avait pris les devants. On disait même que le roi partirait le lendemain pour se rapprocher de l'armée. "Et on espère, continuait Gui de Laval, qu'avant qu'il soit dix jours, la chose sera bien avancée de côté ou d'autre. Mais tous ont si bonne espérance en Dieu que je crois qu'il nous aidera (10)."

    

  Il ne se trompait pas, même pour le temps. Il écrivait le 8 : le 18, après deux siéges et une bataille, la campagne était terminée. Le mercredi après-midi, Vendôme, Boussac et autres avaient rejoint le général en chef ; La Hire était proche : "Et ainsi, disait Laval dans une addition à sa lettre, on besognera bientôt. Dieu veuille que ce soit à notre désir !" Le lendemain (9 juin), la petite armée rentrait dans Orléans, où elle fut reçue avec une joie extrême, et surtout la Pucelle, "de laquelle voir, dit encore le Journal du siége, ne se pouvoient saouler." Ils en partirent le 11 au nombre de huit mille hommes, dont six cents lances amenées par le duc d'Alençon, six cents par Dunois, Florent d'Illiers et quelques autres, et le reste du commun, c'est-à-dire du peuple d'Orléans et lieux voisins ; et ils s'avancèrent vers Jargeau, que défendait le comte de Suffolk avec six à sept cents hommes d'élite, bien résolus et pourvus de canons. Les Français n'avaient point laissé leur artillerie en arrière; mais à peine venus, et, selon le témoignage du duc d'Alençon, avant même d'être arrivés, plusieurs voulaient rebrousser chemin. On disait que Falstolf venait au secours de la ville avec une nombreuse troupe. Et, en effet, Bedford, apprenant l'expédition préparée contre ses places de la Loire, l'avait fait partir de Paris avec cinq mille hommes, et levait partout d'autres soldats qui le devaient rejoindre. Falstolf s'avançait avec lenteur. Il s'arrêta quatre jours à Étampes, quatre jours à Janville, voulant avoir tous ses renforts avant d'attaquer une armée conduite par la Pucelle. Mais dans l'armée de la Pucelle il y en avait encore qui ne s'étaient point désaccoutumés de craindre les Anglais, et il leur semblait périlleux de les attendre devant une place occupée par leurs troupes. Plusieurs partirent, et Jeanne ne retint les autres qu'en leur affirmant que Dieu conduisait l'entreprise : "Si je n'en étais sûre, disait-elle, j'aimerais mieux garder les brebis que de m'exposer à tant de périls" (11).
  Jeanne voulait, dès l'arrivée, loger l'armée dans les faubourgs. Tandis que les gens d'armes cherchaient un abri, les gens du commun, pensant que rien ne pouvait résister à la Pucelle, se jetèrent dans les fossés, et, sans attendre qu'elle fût à leur tête, attaquèrent la place. Les Anglais firent une sortie, et les forçaient à se replier en désordre, quand Jeanne, prenant son étendard, vint leur rendre courage, et l'on fit tant que cette même nuit on s'établit dans les faubourgs comme elle l'avait voulu (12).

  Avant de commencer l'attaque en règle de la ville, Jeanne, selon son habitude, voulut faire sommation à ses défenseurs. Elle leur enjoignait de s'en aller en leur petite cotte, la vie sauve, sinon qu'on les prendrait d'assaut. Les Anglais demandaient quinze jours de suspension d'armes : c'était plus qu'il n'en fallait pour donner à leurs renforts le temps d'arriver. On répondit qu'on les laisserait partir avec leurs chevaux, mais dans l'heure même. Suffolk tenta quelque autre moyen de traiter ou de traîner en longueur en parlant à La Hire ; mais on rappela La Hire et l'attaque fut résolue (13).

  Pendant le reste de la nuit, on s'occupa des travaux préparatoires. Dès le matin, les canons et les bombardes étaient en batterie, et à neuf heures, quoique ce fût dimanche, Jeanne fit sonner les trompettes et cria au duc d'Alençon : "Avant, gentil duc, à l'assaut !" Le duc trouvait que c'était trop tôt commencer : mais Jeanne lui dit : "Ne doutez point, c'est l'heure quand il plaît à Dieu; il faut besogner quand Dieu veut. Travaillez, et Dieu travaillera." Et elle ajoutait : "Ah ! gentil duc, as-tu peur ? Ne sais-tu pas que j'ai promis à ta femme de te ramener sain et sauf? » Et en effet, quand le duc d'Alençon avait quitté sa femme pour venir avec Jeanne à l'armée, la duchesse avait exprimé ses craintes à la Pucelle : le duc sortait à peine de captivité, et il avait tant dépensé pour sa rançon ! Mais Jeanne lui avait dit : "Ne craignez point, madame, je vous le rendrai sain et sauf, et en tel point qu'il est ou mieux encore (14)."

  Elle tint parole, et dans cet assaut même un mot d'elle lui sauva la vie. Comme il observait l'attaque d'un endroit découvert : "Retirez-vous, dit-elle, car voici un engin qui vous tuera ;" et elle lui montrait un canon aux murs de la ville. Il se retira, et un moment après, le seigneur de Lude était tué à cette même place d'un coup parti de la pièce désignée (15).
  Les Anglais soutinrent l'assaut avec vigueur. Parmi eux il y en avait un, grand et fort, qui se tenait à découvert sur les murailles, accablant les assaillants de boulets et renversant les échelles et les hommes. Mais là, comme à l'assaut des Augustins, il y avait parmi les Français le fameux canonnier de Lorraine. Le duc d'Alençon lui montra le redoutable Anglais, et d'un coup de sa couleuvrine Jean le renversa mort dans la ville. Comme l'attaque durait depuis trois ou quatre heures, Jeanne et le duc d'Alençon lui-même, tout commandant qu'il était, descendirent dans le fossé et coururent aux murailles. Suffolk comprit le péril ; il voulut parler, au duc, mais ne fut plus écouté. Déjà la Pucelle montait à l'échelle, tenant en main son étendard, quand ce drapeau fut atteint, et elle-même frappée a la tête d'une pierre qui se brisa sur son casque. Elle tomba par terre, mais elle se releva criant aux hommes d'armes : "Amis, amis, sus! sus! notre Sire a condamné les Anglais. Ils sont nôtres à cette heure. Ayez bon courage !"
  Et les Français excités par ces paroles, escaladèrent hardiment les murs et prirent la ville. Suffolk et les Anglais se replièrent vers le pont, et l'un des deux frères du capitaine fut tué dans cette retraite ; les autres ne purent tenir davantage. Suffolk, vivement pressé par un écuyer d'Auvergne, nommé Guillaume Regnault, lui demanda s'il était gentilhomme.
  "Oui, dit-il.
— Êtes-vous chevalier ?
— Non."
  Le comte le fit chevalier et se rendit à lui (16).

  Quatre à cinq cents hommes avaient péri dans l'assaut ; le reste fut pris à rançon, et dans le nombre l'autre frère de Suffolk. La ville, l'église même où les Anglais avaient serré leurs biens, tout fut pillé. Quant aux prisonniers de renom, on les envoya par eau et de nuit à Orléans, de peur qu'ils ne fussent tués; et cette crainte n'était pas sans fondement : car les soldats ne voulaient de quartier pour personne. Au retour, un débat s'étant élevé sur quelques autres captifs, ils les tuèrent (17).

  Le lundi, Jeanne et le duc d'Alençon, après avoir pourvu à la garde de Jargeau, revinrent à Orléans, et l'on peut se figurer l'accueil qu'ils y reçurent. Après avoir mandé au roi leur victoire, ils y restèrent les deux jours suivants, ralliant à eux tous ceux qui n'avaient pas eu le temps de les rejoindre au premier siège : les seigneurs de Laval et de Lohéac, ces deux jeunes frères dont on a vu la lettre à leur mère et à leur aïeule ; Chauvigny, La Tour d'Auvergne, le vidame de Chartres. Le mardi, la Pucelle appela son beau duc, comme elle nommait Alençon, et lui dit : "Je veux demain, après-midi, aller voir ceux de Meun ; faites que la compagnie soit prête à partir à cette heure. » Tout le monde fut prêt. On vint à Meun. On attaqua vivement et on prit le pont que les Anglais avaient solidement fortifié, et on l'occupa laissant pour le moment la ville. On était, sur ce point, maître du passage : on avait hâte d'en faire autant à Baugency (18).

  A Baugency, à leur approche, les Anglais désemparèrent la ville pour se retrancher dans le château et sur le pont. Ce ne fut point cependant sans laisser derrière eux quelques soldats déterminés à vendre chèrement la place qu'ils abandonnaient. Mais les Français, arrivant le jeudi matin, les refoulèrent dans le château où les autres s'étaient retirés, et disposèrent leurs canons et leurs bombardes pour les forcer dans cette dernière retraite (19).

  Le siège fut marqué par un accident qui faillit diviser, par le contre-coup des intrigues de la cour, l'armée si bien unie contre les Anglais. Richemont, retiré dans sa seigneurie de Parthenay, ne se résignait point à l'inaction où le
condamnait l'ingrate et misérable jalousie de La Trémouille. Après l'arrivée de la Pucelle, quand on alla au secours d'Orléans, il voulut en être, et leva une troupe qui ne comptait pas moins de quatre cents lances et de huit cents archers. Mais comme il était à Loudun, le roi lui fit dire de s'en retourner ; que, s'il passait outre, on le combattrait. Le connétable dut s'arrêter, et il put d'ailleurs apprendre bientôt qu'Orléans avait été délivré sans son aide. Mais, quand il sut qu'on recommençait une campagne sur la Loire, il reprit sa marche; il passa le fleuve à Amboise, dont le capitaine, plus homme de bien qu'homme de cour, n'entreprit point de l'arrêter, et, apprenant qu'on faisait le siège de Baugency, il y alla (20).


  Si l'on en croit l'historien attitré, on pourrait dire l'apologiste de Richemont, Guillaume Gruel, dès qu'on apprit l'arrivée du connétable, le duc d'Alençon et la Pucelle montèrent à cheval pour le combattre. Mais La Hire et plusieurs autres, sachant ce qu'elle voulait faire, lui dirent "que si elle y alloit, elle trouveroit bien à qui parler ; et qu'il y en avoit en la compagnie qui seroient plutôt à lui qu'à elle ; et qu'ils aimeroient mieux lui et sa compagnie que toutes les pucelles du royaume de France." Malgré ce langage assez impertinent (on a plus d'une raison de croire que Gruel ne l'a pas entendu), la Pucelle s'avance vers Richemont. On le rencontre, mais au lieu de le combattre, on lui fait grande chère, on est bien aise de sa venue. La Pucelle met pied à terre, embrasse ses genoux, et Richemont lui dit : "Jeanne, on m'a dit que vous me voulez combattre. Je ne sais si vous êtes de par Dieu ou non. Si vous êtes de par Dieu, je ne vous crains de rien, car Dieu sait mon bon vouloir; si vous êtes de par le diable, je vous crains encore moins." C'est sur ce mot que Gruel montre son héros tirant droit au siège, et prenant la charge du guet : "et fut le plus beau guet qui eût été en France, passé a (il y a) longtemps (21)."

  Le duc d'Alençon fait un tout autre récit de l'affaire. L'arrivée de Richemont était fort mal vue des chefs. Alençon avait reçu les ordres du roi ; il déclara à Jeanne que, si le connétable venait, lui-même s'en irait. Le succès était donc compromis par une démarche faite pour l'assurer ; mais il n'y avait au fond de tout cela, on le savait, que la jalousie d'un courtisan, point de haine personnelle aux chefs ; il ne fallait pour les rapprocher qu'un prétexte et du bon vouloir. Le prétexte fut l'ennemi, dont la venue était annoncée ; et le bon vouloir, c'est Jeanne qui l'inspira. Elle qui cherchait si peu l'aide des hommes, elle dit au duc d'Alençon qu'il fallait s'aider ; et elle régla les formes de l'accord: car elle seule paraissait avoir assez de crédit pour le faire goûter de Charles VII. A la prière du connétable et des seigneurs, elle se chargea donc de ménager la paix de Richemont avec ce prince. Le connétable jura devant elle et devant les seigneurs qu'il servirait toujours loyalement le roi ; et le duc d'Alençon et les autres chefs se portèrent garants de sa réconciliation (22).

  La troupe anglaise dont l'arrivée hâta la conclusion de cet accord était celle que Falstolf avait voulu amener au secours de Jargeau. Il ayait appris pendant son séjour à Janville la perte de cette place ; et Talbot, venant de la Loire, avait pu lui faire connaître presque en même temps que le pont de Meun était pris, et Baugency, à la veille d'être forcé. Falstolf était d'avis qu'on en laissât la garnison capituler, représentant que depuis les affaires d'Orléans les troupes étaient "moult amaties et effrayées." Il pensait donc qu'il valait mieux ne rien risquer, se renfermer dans les forteresses les plus sûres, et y attendre que leurs gens eussent repris confiance et que Bedford leur eût envoyé tous les secours promis. Mais Talbot s'indigna de cette circonspection et jura que n'eût-il que sa gent et ceux qui le voudraient suivre, il irait combattre l'ennemi, à l'aide de Dieu et de monseigneur saint Georges. Falstolf céda, et le lendemain on mit les troupes aux champs : mais
avant de partir il réunit les capitaines et leur remontra encore les périls de l'entreprise : ils n'étaient, disait-il, qu'une poignée de gens au regard des Français, et, "si la fortune tournoit mauvaise sur eux, tout ce que le feu roi Henri avoit conquis en France à grand labeur et long terme seroit en voie de perdition." Mais ses remontrances n'étant pas mieux goûtées, il commanda aux étendards de prendre la route de Meun (23).

   

  Les Français, laissant une partie des leurs autour du château de Baugency, vinrent au-devant des Anglais et les rencontrèrent "à une lieue près de Meun et assez près de Baugency." Wavrin, qui parle seul expressément de ce mouvement, porte leur nombre à six mille environ et nomme parmi les chefs Alençon, Dunois, Lafayette, La Hire, Xaintrailles et la Pucelle. Ils se postèrent sur une éminence, observant les ennemis. Les chefs anglais, s'attendant à la bataille, firent mettre pied à terre, avec ordre aux archers de s'entourer de leur ceinture de pieux; puis, voyant que les Français ne bougeaient pas, ils envoyèrent des hérauts les défier, s'ils voulaient descendre dans la plaine. Mais ils eurent cette réponse des gens de la Pucelle: "Allez vous loger pour maishuy (aujourd'hui), car il est tard, mais demain, au plaisir de Dieu et de Notre-Dame, nous nous verrons de plus près (24)."

  Les Anglais vinrent se loger à Meun, où ils avaient garnison, et changèrent de tactique. Au lieu de marcher droit sur les assiégeants de Baugency, ils canonnèrent toute la nuit le pont de Meun, qui était aux Français, comptant l'enlever et gagner par l'autre rive le pont de Baugency qui était aux leurs. Ils entraient ainsi sans nul obstacle dans le château assiégé, et demeuraient libres ou d'en sortir avec toutes leurs forces pour attaquer, ou de se borner à s'y défendre. Mais les Français avaient employé le temps bien mieux encore : ils avaient pris la place qu'on voulait délivrer (25).

                           

  Les défenseurs du château de Baugency étaient, comme ceux de Jargeau, les débris de l'armée d'Orléans : c'étaient déjà des vaincus de la Pucelle. Or ils voyaient des renforts venir aux assiégeants avec Richemont, et ils avaient perdu l'espérance d'en recevoir eux-mêmes : car le départ et le retour si prompt de la Pucelle leur avaient fait croire que l'armée de Falstolf était venue et s'en était allée. En ces circonstances, et avant que la situation devînt plus critique (elle devait l'être, si Richemont achevait de les investir en les attaquant par l'autre côté du fleuve comme on l'avait résolu), le bailli d'Évreux, qui les commandait, proposa et obtint, pour les siens, une capitulation. On convint qu'ils sortiraient de la place avec les honneurs de la guerre, emmenant leurs chevaux, avec leurs harnais et la valeur d'un marc d'argent au plus. Ils promettaient de ne point reprendre les armes avant dix jours (26).

  Ils partirent le 18 au matin, et la nouvelle en fut portée à Meun par un poursuivant d'armes, quand les Anglais, ayant canonné le pont toute la nuit, s'apprêtaient à lui donner l'assaut. Ils furent heureux de ne l'avoir point passé, et ne songèrent plus qu'à reprendre, avec la garnison de Meun, la route qu'ils avaient suivie naguère. Ils firent d'ailleurs leur retraite en bon ordre. Derrière une première troupe, conduite par un chevalier anglais, marchaient l'artillerie et les bagages; puis venait le corps de bataille sous les ordres de Falstolf, de Talbot, de Raveston ; puis l'arrière-garde, toute composée d'Anglais de race (27).

       

  Cependant les Français, maîtres du château de Beaugency, avaient hâte de voir les Anglais de près, comme ils l'avaient promis la veille. Ils avaient cru les retrouver à Meun ; mais l'ennemi ayant fait retraite à la première apparition de leur avant-garde, ils gagnèrent au plus vite la route de Blois à Paris, où ils espéraient le rejoindre. Les Anglais, avertis de leur marche par les coureurs de l'arrière-garde, ne songèrent plus qu'à trouver un lieu favorable où ils pussent s'arrêter et les attendre, comme à Crécy. On donna donc à l'avant-garde l'ordre d'aller s'établir, avec l'artillerie et les bagages, le long d'un petit bois (près du hameau de Lignerolles) qui couvrait les abords de Patay. Pour y parvenir, il fallait traverser un bas-fond et au delà un passage resserré entre deux haies très-fortes. Quand le corps principal y arriva, Talbot, mettant pied à terre, promit d'y tenir avec cinq cents archers d'élite jusqu'à ce que l'arrièregarde eût rejoint le corps de bataille ; il comptait ensuite, faisant retraite le long de ces haies, gagner à son tour la position où l'avant-garde avait précédé, et où tous se devaient réunir pour soutenir le combat (28).

  Mais il en arriva autrement. Les Français marchaient en avant, ne sachant au juste où était l'ennemi, mais allant toujours, sur la foi de la Pucelle. Elle leur avait dit que les Anglais les attendraient, et comme on lui demandait où, elle avait répondu qu'on chevauchât sûrement et qu'on aurait "bon conduit." Ils allaient donc dans la direction où l'on croyait que marchaient les Anglais, ayant pour éclaireurs soixante ou quatre-vingts de leurs chevaliers les plus braves et les mieux montés. Ils n'avaient rien vu encore, empêchés par le pli du terrain, lorsqu'un cerf, qu'ils firent lever, alla donner dans le corps de bataille des Anglais, où il fut reçu à grands cris. Ces cris donnèrent l'éveil aux chevaliers français, qui reconnurent l'ennemi et bientôt le purent découvrir, marchant en parfaite ordonnance. Ils se hâtèrent d'en avertir le gros de leur armée, disant qu'il était l'heure de besogner, qu'on les aurait bientôt en face. A cette nouvelle, le duc d'Alençon demanda à Jeanne ce qu'il fallait faire.
   "Avez-vous de bons éperons ?" lui dit-elle.
  Plusieurs l'entendant s'écrièrent :
- Que dites-vous ? Nous tournerons donc le dos ?
  "Nenni, en nom Dieu, dit Jeanne, ce seront les Anglois ; ils seront déconfits, et vous aurez besoin des éperons pour les suivre."
Comme on disait qu'ils avaient plus de mille hommes d'armes :
  "Ah! beau connétable, dit-elle à Richemont, vous n'êtes pas venu de par moi, mais, puisque vous êtes venu, vous serez bien venu." Et quelques-
uns manifestant encore des doutes, sinon de la crainte : "En nom Dieu, dit Jeanne, il les faut combattre ; quand ils seroient pendus aux nues, nous les aurons, parce que Dieu nous les envoie pour que nous les châtiions." Et elle répondait de la victoire : "Le gentil roi, disait-elle, aura aujourd'hui la plus grant victoire qu'il eut pièça (de longtemps). Et m'a dit mon conseil qu'ils sont tous nôtres (29)."

       

  Elle voulait être à l'avant-garde. On la retint malgré elle, et on y mit La Hire, mais avec l'ordre d'attaquer les Anglais assez vivement pour leur faire tourner le visage, point assez pour qu'ils tournassent le dos. On voulait, en les retenant à cette escarmouche, donner au gros de l'armée française le temps d'arriver, sans leur laisser à eux celui de gagner la position où ils comptaient se réunir. Mais l'impétuosité de La Hire, et sans doute aussi la terreur que Jeanne, même de loin, inspirait, déjouèrent ce calcul. Les Français tombèrent sur l'arrière-garde des Anglais et la dispersèrent. Talbot pourtant demeurait ferme à son défilé, et Falstolf, fidèle au plan que l'on avait arrêté, faisait diligence pour aller rejoindre l'avant-garde dans ses positions sur les derrières. Mais l'avant-garde, le voyant venir à elle, crut qu'il se retirait, et, pour ne point perdre son avance, elle prit la fuite. Falstolf voulut se retourner alors et marcher à l'ennemi : il était trop tard. Déjà Talbot se voyait enveloppé, la panique était générale, et les Français, maîtres du champ de bataille, tuaient ou prenaient ceux qui leur tombaient sous la main. Falstolf céda enfin aux instances de ceux qui l'entouraient, et s'enfuit avec peu de monde. Dans son escorte était Wavrin, qui a fait ce récit de la bataille. Il dit que les Anglais perdirent deux mille morts et deux cents prisonniers. Dunois, sans distinguer, évalue leur perte à quatre mille hommes. Talbot était parmi les prisonniers. Comme on le présentait au duc d'Alençon, le jeune prince lui dit : "Vous ne pensiez pas, le matin, que cela
vous arriveroit." Il répondit : "C'est la fortune de la guerre (30)."

                           

  Cette journée eut des résultats considérables. Tout le pays, qui détestait les Anglais, ne chercha plus à cacher sa haine. Ceux de Janville, à qui ils avaient laissé leur argent au départ, leur fermèrent la porte ; et quant aux places qu'ils possédaient encore au voisinage, Mont-Pipeau, Saint- Sigismond, etc., les garnisons s'empressèrent d'y mettre le feu et d'en partir. Nulle citadelle ne leur semblait sûre. Ce qui était plus grave, c'est que, même en plaine, ils ne paraissaient plus à craindre. Les Anglais, grâce à l'habile emploi des armes de trait, à l'excellence de leur infanterie et à une tactique qui reléguait au second rang les brillants usages de la chevalerie, avaient acquis dans les combats en rase campagne un renom de supériorité consacré par les souvenirs de Crécy, de Poitiers et d'Azincourt. Ce prestige se dissipait comme les autres. Toute leur tactique avait été déjouée dans le lieu le plus propre à leur faire retrouver la gloire de ces grandes journées ; tout leur corps de bataille avait été mis en fuite par une simple avant-garde, mais une avant-garde animée de l'esprit de la Pucelle. Qui pouvait douter maintenant qu'elle ne menât le roi à Reims comme elle le promettait ? Jeanne avait prouvé qu'elle saurait s'ouvrir les chemins comme elle savait forcer les citadelles. On l'avait vue à l'œuvre : et pourtant on différait encore (31) !

  

  Jeanne avait déjà rencontré bien des résistances à l'accomplissement de sa mission. Elle en avait rencontré de toutes sortes : à Domrémy, à Vaucouleurs, à Chinon, à Poitiers. Elle avait triomphé alors, sans persuader encore. Comme on l'avait laissée aller à Chinon, on l'envoya à Orléans : mais
la défiance la suivait. Si le peuple avait foi en elle, les grands se servaient d'elle sans la croire. Ils la mettaient devant, et décidaient à son insu, qu'il s'agît ou de la marche du convoi, ou de l'attaque des forteresses anglaises : il avait fallu qu'elle commençât par leur faire en quelque sorte violence à eux-mêmes, pour forcer les Anglais dans leurs bastilles et les chasser d'Orléans. La délivrance d'Orléans, qui était plus qu'une victoire, avait imprimé un élan immense à tous les esprits. Il n'y avait qu'à le soutenir et à le suivre : on le laisse retomber, et Jeanne doit lutter encore et contre l'inertie et contre la malveillance. Elle demandait le voyage de Reims : on lui offre une campagne sur la Loire. Elle accepte, comme en attendant ; et l'on a vu avec quelle rapidité elle la termine. Le 11 juin elle attaque Jargeau, et le prend le 12 ; le 13 elle est à Orléans, où elle rallie ses troupes ; le 15 elle occupe le pont de Meun; le 16 elle attaque Baugency, qui se rend le 17. Les Anglais partis pour secourir Jargeau arrivent à Meun, le jour même où Baugency capitule ; ils n'arrivent que pour faire retraite, mais non si vite qu'ils ne soient rejoints et battus le 18 à Patay. Une semaine a tout achevé (32).

       

  L'épreuve est donc complète. Jeanne a prouvé sa mission et dans les siéges et dans les batailles. Ce n'est plus seulement le peuple, ce sont les soldais, ce sont les capitaines et tous les seigneurs qui croient en elle et ne demandent qu'à la suivre. Eux qui, au siège d'Orléans, montraient encore tant de défiance, n'avaient plus, dans la dernière campagne, rien fait que par sa direction. Mais c'était ce qui effrayait ceux qui, dans le plus intime des conseils du roi, l'avaient toujours sourdement combattue, et notamment le favori La Trémouille. Sa puissance était fondée sur l'inertie du prince et sur son isolement. Elle était fort compromise, si le roi voulait agir enfin, s'il s'entourait des princes du sang, de toute la noblesse : car il trouvait nécessairement en eux dans cette voie une concurrence fatale à son crédit. Or Jeanne, qui venait d'imprimer ce grand mouvement, devait en cela lui être suspecte à plus d'un titre. Elle avait salué dans le jeune duc d'Alençon l'un des soutiens du trône, et illustré par le triomphe le commandement dont il avait été revêtu. Elle avait, dans le cours de cette rapide campagne, accueilli le connétable : elle lui avait promis de faire sa paix avec le roi ; elle y avait engagé le duc d'Alençon et les principaux capitaines ; et comme pour rendre l'engagement plus sacré, elle l'avait scellé de la commune victoire. Elle allait donc ramener à la cour un homme qui n'y pouvait paraître sans que La Trémouille, si considérable qu'il fût par ses grands biens, rentrât sous terre. La Trémouille, sans aller de front contre un mouvement qui l'eût emporté, fit en sorte que le roi ne s'y abandonnât que le moins possible, et sut ainsi, en l'y suivant lui-même avec prudence, gagner le jour où, l'entraînement ayant perdu de sa force, il fût possible de l'en retirer. C'est le triomphe de sa politique et le malheur de la France.



                                                


Source : Jeanne d'Arc - Henri Wallon - 5° éd. 1879

Notes :
1 Jean Gerson : Il cite Debora et sainte Catherine, Judith et Judas Machabée : "Neque sequitur semper post primum miraculum quidquid, ab hominibus expectatur. Propterea, et si frustraretur ab omni expectatione sua et nostra (quod absit) dicta puella, non oporteret concludere, ea quæ facta sunt, a maligne spiritu vel non a Deo facta esse; sed vel propter nostram ingratitudinem et blasphemias, vel aliunde justo Dei judicio, licet occulto, posset contingere frustratio expectationis nostræ in ira Dei, quam avertat a nobis, et bene omnia vertat" (t. III, p. 303. Cf. p, 305.)

2 Jacques Gelu : "Credendum est quod ille qui commisit, inspirabit creaturæ suæ, quam misit, ea quæ sunt agenda, melius et expedientius quam prudentia humana exquirere posset.... Quare consuleremus quod in talibus primo et principaliter exquireretur votum puellæ, etc.....Et in hoc consilium puellæ primum et præcipuum dicimus esse debere, et ab ea ante omnes assistentes quæ rendum, investigandum et petendum. Insuper regi consuleremus quod omni die certum aliquid Deo bene placitum et ejus voluntati gratum faceret, quodque super hoc cum puella conferret, et, post ejus advisamentum, in esse deduceret quam humiliter et devote ; ne dominus manum retrehendi causam habeat, sed gratiam suam continuet » (ibid., p. 409, 410.)

3 Sur cette hostilité sourde et constante des principaux conseillers de Charles VII, voy. les Histoires de France de Sismondi, t. XIII, p.. 152 et 165, Michelet, t. V, p. 39, H. Martin, t. VI, p. 150, et J. Quicherat, Aperçus nouveaux, p. 30 et suiv.

4 Retour de Jeanne : t. III, p. 80 (Beaucroix). — Lettres de Charles VII : t. V, p. 101, 103. — Accueil du roi: t. IV, p. 168, et Chron. des Pays-Bas, etc., Coll. des Chron. belges, t. III, p. 412.
- Armoiries de la Pucelle, voyez l'appendice n° 25.

5 Conseils et opposition, t. IV, p. 11 (Cagny); p. 168 (Journal).
- Instances de Jeanne. « Audivit aliquando dictam Johannam dicentem regi quod ipsa Johanna duraret per annum et non multum amplius, et quod cogitarent illo anno de bene operando, quia dicebatse habere quatuor onera, videlicet fugare Anglicos, etc. » t. III, p. 99 (duc d'Alençon).

6 T. III, p. 12 (Dunois). Selon la version du Journal et de la Chronique (t. IV, p. 168 et 235,) le roi et « ses plus privés" hésitaient à lui faire cette question de peur qu'elle n'en fût mal contente : mais Jeanne le connaissant « par grâce divine, » vint à eux et leur dit ce qu'on a vu.

7 Les Anglais à Meun et à Jargeau : t. IV, p. 233 (Chron.)
- Attaque des seigneurs contre Jargeau, ibid., p. 167 (Journal). La Pucelle qui toujours avoit l'ueil et sa pensée aux affaires du duc d'Orléans, parla à son beau duc d'Alençon et lui dist que, en tandis que le roi se apresteroit elle vouloit aler délivrer la place de Gargueau, t. IV, p. 11 (Cagny).
- Le duc d'Alençon, t. IV, p. 169 (Journal). « Il venait d'acquitter ses hostages, touchant la rançon accordée pour sa délivrance, » t. IV, p. 236 (Chron.).

8 Jeanne d'Arc à Selles, lieu de réunion de l'armée : t. V, p. 262 (extrait des comptes d'Orléans); cf. t. IV, p. 12 (Cagny). "Le duc d'Alençon fist sçavoir aux mareschaulx de Boussac et de Reis, que eulxet leurs gens fussent à certain jour à ung village près Romorantin en Salloigne."
- Lettre de Gui de Laval : t. V, p. 107.

9 "Et aves fait bailler je ne sçay quelle lettre à mon cousin de la Trémoille et seigneur de Trèves, par occasion desquelles le roy s'efforce de me vouloir retenir avecques luy jusques (à ce que) la Pucelle ait esté devant les places Anglesches d'environ Orléans, où l'on va mettre le siége; et est déjà l'artillerie pourveue, et ne s'esmaye point la Pucelle qu'elle ne soit tantost avec le roy, disant que lorsqu'il prendra son chemin à tirer avant vers Reims, que je irois avec luy. Mais jà Dieu ne veuille, etc." (T. V, p. 109, 110.)

10 Départ de Selles : t. V, p. 110.

11 Retour de la Pucelle à Orléans : Le 9 juin ; t. IV, p. 169, 170 (Journal), et la note tirée des comptes de la ville, ibid.
- Forces des deux partis ; Du côté des François, 8000 combattants : Journal, ibid. Cagny dit "2 à 3000 combattants et autant de gens du commun ou plus (ibid., p. 12). » C'est le duc d'Alençon lui-même qui porte son armée à 600 lances, et à 1200 après l'arrivée de Dunois, etc., t. III, p. 94. J. Chartier (ibid., p. 65,) le Journal (ibid., p. 170) et la Chronique (ibid., p. 236) comptent de 6 à 700 Anglais ; Cagny (ibid., p 12) de 7 à 800. Falstolf: t. IV, p. 170 (Journal), et p.413 (Wavrin).
- Les troupes raffermies par la Pucelle : t. III, p. 95 (Alençon) : "Quod nisi esset secura quod Deus deducebat hoc opus, ipsa prædiligeret custodire oves quam tantis periculis se exponere." Cf. t.IV, p. 170 (Journal).

12 Arrivée devant Jargeau : t. III, p. 95 (Alençon); t. IV, p. 171 (Journal) et p. 12 (Cagny) : "A l'arrivée, les gens de commun à qui il estoit advis que à l'entreprinse de la Pucelle riens ne povoit tenir, ils saillirent ès fossez sans sa présence et sans les gens d'armes qui entendoient à eux loger." T. IV, p. 12 (Cagny). Les Orléanais avaient donné pour l'expédition 3000 liv., et ils prêtèrent de plus une partie de leur artillerie, la grosse bombarde, la bombarde Bergère, le canon Montargis, des coulevrines, des échelles, des pioches, des pics poinçonnés à leur marque, des bottes de traits qui furent chargés sur des charrettes et sur trois chalands. Deux bourgeois furent désignés pour accompagner la Pucelle (Mantellier, Hist. du Siège d'Orléans, p. 127. Lottin, t. I, p. 247, et Procès, t. V p. 262.)

13 En leur petite cotte : "In suis gipponibus vel tunicis.," t. I, p. 80 (c'est-à-dire sans autre chose que les vêtements qu'ils portaient sous l'armure). (Note de l'éditeur). Cf. t. IV, p. 12 (Cagny).
- Pourparlers de Suffolk et de la Hire : t. III, p. 87 (Alençon). L'Anonyme de La Rochelle dit qu'il s'adressa aussi au Bâtard d'Orléans. (Revue historique, t.IV. p. 340.)

14 Assaut de Jargeau : « Et clamaverunt præcones. Ad insultum ! ipsaque Johanna dixit loquenti : Avant, gentil duc, etc. (on sait que le mot gentil veut dire noble).
- Uxor loquentis dixit eidem Johannetæ quod multum timebat de ipso loquente et quod nuper fuerat prisonarius, et quod tantæ pecuniæ fucrant expositæ pro sua redemptione, etc. » T. III, p. 96 (Alençon); — t. IV, p. 12 (Cagny); p. 171 (Journal), etc.

15 T. III, p. 96 (Alençon); cf. t. IV,p. 171 (Journal); p. 236 (Chron.).

16 Jean le canonnier : t. IV, p. 172 (Journal); p. 237 (Chron.).
- Durée de l'assaut : t. IV, p. 173 (Journal), et t. V,p. 350 (Lettre des agents allemands). — Jeanne frappée d'une pierre : t. III, p. 97 (Alençon); cf. le Journal, la Chronique et les agents allemands, l. l.
- Suffolk et le gentilhomme : le Journal et la Chron., ibid. La scène est rendue avec vivacité dans le Mystère du siège d'Orléans, v. 16524 et suiv. L'Anonyme de La Rochelle dit : « Et quand le dit conte de Suffolc vit ladite prise, parce que Monsr d'Alançon qui y estoit et autres seigneurs le vouloyent prendre prisonnier, il dit qu'il ne se rendrait point à eux, se deust estre mort en criant à haute voix. « Je me rends à la Pucelle qui est la plus vaillante femme du monde et qui nous doit tous subjuguer et mettre à confusion, Et de fait vint à la dite Pucelle et se rendit à elle." (Revue historique, t. IV, p. 340.) Cette détermination n'est  guère d'un chevalier et ce langage encore moins d'un anglais.

17 Prise de Jargeau : Berri (t. IV, p. 45) et le Journal (ibid., p. 173) portent le nombre des Anglais tués à 4 ou 500; J. Chartier à 3 ou 400 (ibid., p. 65 ;) Alençon à plus de 1100 (t. III, p. 97). Personne ne dit qu'il y en ait eu jamais autant dans la place. Cagny compte 40 ou 50 prisonniers (ibid., p. 12.) La Chronique dit qu'il y en eut "foison" (ibid., p. 238;) les agents allemands, qu'il y avait 500 Anglais dans la place et qu'ils furent tous tués, excepté Suffolk et deux autres (t. V, p. 351). Jean Chartier et la Chronique rapportent que le siège dura huit jours, et le duc d'Alençon lui-même semble compter quelques jours (post aliquos dies) entre la première attaque et la prise de la ville (t. III, p. 95) ; mais P. de Cagny et le Journal disent expressément que la première attaque eut lieu le 11 et la prise de la ville le 12. Les agents allemands (t. V, p. 350) ne supposent dans leur récit que deux jours de siège.
- La ville pillée : t. IV, p. 173 (Journal) et p. 235 (Chron.).
- Les prisonniers tués : t. IV, p. 65 (J. Chartier) et p. 234 et 235 (Chron.).

18 La pucelle à Orléans et à Meun : t. IV, p. 13 (Cagny) ; p. 65 (J. Chartier); p. 175 (Journal). Mystère du siége d'Orléans, v. 16829 et suiv.; 17950 et suiv.

19 Beaugency : t. IV, p. 14 (Cagny); p. 65 (J. Chartier) ; p. 174 (Journal); Mystère du siége d'Orléans, v. 18102 et suiv.

20 Richemont : t. IV, p. 316 (Gruel) ; p. 175 (Journal), etc. Il amenait 5 à 600 combattants, selon Cagny (t. IV, p. 14;) 1000 à 1200, selon Chartier, ibid., p. 65.). Gruel prétend que Richemont ne s'arrêta point sur l'ordre du roi, quand il venait pour le siège d'Orléans. Mais de quel pas a-t-il marché, puisqu'il n'arrive à Amboise qu'au temps du siège de Baugency ?

21 Richemont et Jeanne : t. IV. p. 317 (Gruel).

22 Richemont accueilli, t. III, p.98 (Alençon); t. IV, p. 175 (Journal); p. 24 (Chron.); Myst. du siége d'Orléans,v. 18538, 18640 et suiv.

23 Talbot venant de Baugency : t. IV, p. 239 (Chron.).
- Falstolf : t. IV, p. 415. (Jean de Wavrin, dans ses additions à Monstrelet.) Wavrin faisait partie du corps de Falstolf: il en porte le nombre à 5000 hommes, à quoi Talbot joignit 40 lances et 200 archers (ibid.). Les historiens français diminuent ce nombre, loin de l'accroitre : Jean Chartier donne aux Anglais 4 à 5000 hommes (ibid., p. 67 ;) le Journal du siége, 4000 (ibid., p. 176.).

24 Les Français et les Anglais en présence, t. IV, p. 417 (Wavrin) cf. p. 176 (Journal) : ... "tendans avec les autres à secourir Beaugency et cuidans faire délaisser le siége ; mais ils ne purent y entrer, combien qu'ils fussent quatre mil combattants, car ils trouvèrent les François en telle ordonnance qu'ils délaissèrent leur entreprise. Et s'en retournèrent au pont de Meung et l'assaillirent moult asprement." t. IV, p. 176 (Journal).

25 Les Anglais à Meun : t. IV, p. 417 (Wavrin) : "Et chevauchèrent vers Meung, où ils se logèrent cette nuit, car ils ne trouvèrent nulle résistance en la ville, fors tant suellement que le pont se tenoit pour les François." — Si les Anglais avaient abandonné la ville, les Français, on le voit, n'avaient point cherché à la reprendre, mais les autres témoignages établissent que la garnison anglaise n'en était pas sortie. Cagny dit que Falstolf y vint prendre le sire de Scales et sa troupe, pour les ramener à Janville (ibid., p. 15) ; cf. t. III, p. 20 (Dunois) ; t. IV, p. 176 (Journal).

26 Capitulation de Baugency : t. III, p. 97 (Alençon). — "Et veoyent que rien ne povoit résister contre la Pucelle, et qu'elle mettait toute l'ordonnance de sa compagnie en telle conduite comme elle vouloit, tout ainsi comme le devroient et pourroient faire le connestable et les maréchaulx d'ung ost," t. IV, p. 14-15 (Cagny) ; cf. p. 45 (Berri); p. 175 (Journal); p. 241 (Chronique); p. 318 (GrueI); p. 370 (Monstrelet), et p. 419 (Wavrin) : Mystère du siége d'Orléans, v. 19 334 et suiv. La Chronique évalue la garnison à 500 combattants. Le Journal raconte qu'ils allèrent à Meaux; Berri dit avec plus de vraisemblance qu'ils se retirèrent en Normandie, "ung baston en leur poing."

27 Retraite des Anglais : Nous suivons le récit de Wavrin qui y était (t. IV, p. 420, 421.)

28 Bataille de Patay : Procès, t. IV, p. 68 (J. Chartier) ; p. 176 (Journal); p. 421 (Wavrin). Cf. Mantellier, Hist. du siége d'Orléans, p. 138.

29 Bataille de Patay : t. IV, p. 422 (Wavrin); t. III. p. 98 (Alençon) ; t. IV, p. 243 (Chron.).

30 Bataille de Patay : t. IV, p. 419 (Wavrin). "Et habuit l'avant- garde La Hire; de quo ipsa Johanna fuit multum irata, quia ipsa multum affectabat habere onus de l'avant-garde. » T. III, p. 71 (L. de Coutes). - Et parce que la Pucelle et plusieurs seigneurs ne vouloient pas que la grousse bataille fust ostée de son pas, ils esleurent La Hire, Poton,... et leur baillièrent charge d'aler courir et escarmoucher devant les Angloys pour les retenir et garder d'eux retraire en lieu fort. Ce qu'ilz feirent et oultre plus ; car ils se frappèrent dedans eulx de telle hardiesse, combien qu'ils ne l'eussent que quatorze à quinze cens combatans, qu'ils les mirent à desaroy et desconfiture, nonobtant qu'ils estoient plus de quatre mil combatans. » T. IV, p 177 (Journal); cf. t. III, p. 120 (Th. de Thermes). "Percutiatis audacter, et ipsi fugam capient. » T. IV, p. 339 (P. Cochon, Chron. normande, ch. XLVIII dans l'édition de Vallet de Viriville.) Sur les pertes des Anglais à la bataille de Patay, voy. l'appendice n° 26.

31 Suites de la batailla de Patay; t. IV, p. 46 (Berri) ; p. 173 (Journal) ; p. 244 (Chron.).

32 Tout cela n'empêche pas Sismondi de dire : "Les chefs s'aperçurent bien vite que c'était à eux à la diriger" (Histoire des Français, t. XIII, p. 123).


 

Jeanne d'Arc
Henri Wallon - 5°éd. 1879

Index

Avertissement
Préface

Introduction :

- La guerre de cent ans
- Charles VII et Henri VI
- Le siège d'Orléans

Livre IDomrémy et V...
I - L'enfance de J. d'Arc
II- Le départ

Livre II : Orléans
I - L'épreuve
II - Entrée à Orléans
III - La délivrance d'Orléans

Livre.III : Reims
I - La campagne de la Loire
II - Le sacre
III - La Pucelle

Livre.IV : Paris
I - La mission de J. d'Arc
II - La campagne de Paris
III - L'attaque de Paris

Livre.V :
Compiègne
I - Le séjour sur la Loire
II - Le siège de Compiègne

Livre.VI : Rouen - Les juges
I - Le marché
II - Le tribunal
III - Les procès-verbaux

Livre.VII : L'instruction
I - Les interrog. publics
II - Les interrog. de la prison
III - Les témoins

Livre.VIII : Le jugement
I - L'accusation
II - Les douze articles
III - Les consultations...
IV - La réponse de...

Livre.IX : L'abjuration
I - Le cimetière de St-Ouen
II - La relapse

Livre.X : Le supplice
I - La visite à la prison
II - La pl. du Vieux-marché

Livre.XI : La réhabilitation
I - La mémoire de Jeanne...
II - Le second procès...

Livre.XII : L'histoire

I - Les contemporains...
II - L'inspiration de J.d'Arc




Légal         Contacts
 
© 2006-2024 - SteJeannedArc.net
1412-2012
Jeanne d'Arc, histoire et dictionnaire