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Procès de réhabilitation
IV - Relation de l'exécution
(12 février 1456) |
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révérendissime et révérend pères dans le Christ seigneur Jean, par la miséricorde divine archevêque et duc de Reims, et Guillaume, par la même miséricorde évêque de Paris, et à frère Jean Bréhal, professeur de théologie sacrée,
de l'ordre des frères prêcheurs, l'un des inquisiteurs de la
perversité hérétique au royaume de France, juges délégués
ou commissaires avec révérend père dans le Christ seigneur
l'évêque de Coutances, votre collègue en cette affaire, avec cette clause « Que vous, ou deux ou l'un d'entre vous, etc. », à vous qui avez été désignés spécialement par le très saint père dans le Christ et seigneur, seigneur Calixte, troisième pape du nom par la providence divine, pour une cause de nullité, d'iniquité et d'injustice, à propos de procès et sentences
menés et prononcées de manière nulle et sans droit
contre une certaine Jeanne, communément appelée la Pucelle,
par défunt de bonne mémoire Pierre Cauchon, alors évêque de Beauvais, et Jean Le Maistre, sous-inquisiteur
de la perversité hérétique au diocèse de Beauvais, à la demande
de maître Jean d'Estivet, promoteur, constitué par
cet évêque et ce sous-inquisiteur et pour la justification de ladite Jeanne. Sachent vos très redoutables paternités, avec
toute révérence et honneur, que moi, Gérard Toussaint,
notaire public par autorité apostolique et impériale, le douzième jour du mois de février, l'an du Seigneur 1456
[n. st.], en vertu de vos lettres de citation à moi présentées
de la part d'honorables hommes Pierre d'Arc, chevalier, de
Jean d'Arc, et d'Isabelle, leur mère, désignés dans ces lettres,
je suis allé en la cité de Beauvais et me suis présenté à révérend
père dans le Christ, le seigneur évêque de Beauvais et à son promoteur des affaires criminelles à la cour de Beauvais ; suivant la teneur et la forme de vos lettres de citation, je
les ai cités aux jour, lieu et heure fixés plus précisément dans
votre mandat. Ce seigneur évêque et le promoteur m'ont
répondu qu'ils n'étaient pas intéressés, comme ils l'avaient
déjà déclaré, et qu'ils s'en remettaient au jugement et au
bon choix de vous, seigneurs commissaires ; dirent en outre
qu'à l'époque indiquée dans vos lettres de citation le seigneur
Pierre Cauchon était évêque, et vous, révérendissime père
seigneur archevêque de Reims, lui avez succédé ; ajoutèrent qu'au temps du procès fait contre Jeanne, ledit Cauchon était absent de la ville de Beauvais et dans une autre obédience.
Ce non obstant, je leur ai présenté, à eux et à chacun
d'eux, copie de la citation et des articles dont il est fait mention
dans votre citation ; mais ils refusèrent de la recevoir ; étaient présents maîtres Jean de Frocourt, Guillaume de
Grosmesnil, chanoines de Beauvais, témoins à ce spécialement
appelés et requis. En outre, pour une exécution plus
complète, j'ai apposé et placé aux portes de la principale église de Beauvais copie de vosdites lettres de citation, faites de la main de vénérables hommes maîtres Denis Lecomte et
François Ferrebouc, notaires publics par autorité apostolique
et greffiers devant vous de cette cause ; étaient présents
vénérables hommes les seigneurs Jean Quignon, chanoine
de Beauvais, Denis Leclerc, Jean Yngier et Jean Le Flament, chapelains de ladite église de Beauvais, témoins spécialement appelés et requis. Ensuite, poursuivant l'exécution
dans la mesure du possible de vos lettres, je me suis rendu à l'église des frères prêcheurs de Beauvais, et là, parlant à frère
Germain de Morlaines en personne, prieur de cette église,
j'ai demandé s'il y avait quelque sous-inquisiteur. Il m'a
répondu ne connaître aucun sous-inquisiteur dans son église
ou couvent. Cependant ce sous-inquisiteur, s'il existait, et
tout autre croyant être intéressé, j'ai cité ouvertement et
publiquement en la personne dudit frère Germain, comme
cela m'était mandé. Ce dernier m'a en outre répondu ne pas
croire que quelqu'un était intéressé, et n'avoir jamais vu ni
connu l'inquisiteur nommé dans vos lettres ; s'en remettant à vos révérendes paternités. J'ai présenté ensuite et réellement
offert la copie de la citation et des articles, qu'ils refusèrent
d'accepter. En témoignage de ce, j'ai écrit et signé le
présent procès-verbal de ma main.
L'an du Seigneur 1456 [n. st.], le douzième jour du mois de février.
Ainsi signé : G. TOUSSAINT. »
« Reverendissimo ac reverendo in Christo patribus
domino Johanni, miseratione divina archiepiscopo et
duci Remensi, et Guillelmo, eadem miseratione Parisiensi
episcopo, etc. (1). Cum omni reverentia et honore
noverint paternitates vestræ metuendissimæ, me,
Girardum Toussaint, publicum apostolica et imperiali auctoritatibus notarium, die duodecima mensis februarii,
anno Domini MCCCCLV., vigore vestrarum litterarum
citatoriarum, mihi, pro parte honorabilium
virorum Petri d'Arc, militis, Johannis d'Arc, ac
Ysabellis, eorumdem matris, nominatorum in eisdem,
præsentatarum ; accessisse ad civitatem Belvacensem
atque ad personam reverendi in Christo patris, domini episcopi Belvacensis, necnon promotoris ejusdem
negotiorum criminalium dictæ curiæ Belvacensis, eosdemque, secundum formam et tenorem dictarum vestrarum litterarum citatoriarum, citasse ad
diem, locum et horam in dicto vestro mandato latius
declaratos. Qui quidem dominus episcopus et promotor
mihi responderunt quod non habebant interesse,
prout allas declaraverant, et ulterius se referebant ad
arbitrium et bonam discretionem vestrum (2), dominorum
Commissariorum ; ulterius dicentes quod, declarato
tempore in vestris litteris citatoriis, dominus
Petrus Cauchon, erat episcopus, cui vos, reverendissime
pater, domine Remensis archiepiscope, successistis
; et quod, tempore processus facti contra dictam
Johannam, ipse Cauchon erat absens a villa Belvacensi,
et in altera obedientia. His non obstantibus, eisdem et
cuilibet eorum præsentavi et realiter obtuli copiam
citationis et articulorum, de quibus in citatorio vestro
mentionatur ; quam recipere noluerunt. Præsentibus
ad hæc magistris Johanne de Frocourt, Guillelmo de
Grosmesnil, canonicis Belvacensibus, testibus ad præmissa
vocatis specialiter et rogatis. Et insuper, pro
ampliori exsecutione facienda, copiam dictarum vestrarum
litterarum citatoriarum manibus venerabilium
virorum magistrorum Dionysii Comitis et Francisci
Ferrebouc, publicorum auctoritate apostolica
notariorum, et hujusmodi causæ coram vobis scribarum,
ad valvas majoris ecclesiæ Belvacensis affixam
apposui et admisi ; præsentibus venerabilibus viris,
dominis, Johanne Quignon, canonico Belvacensi,
Dionysio Clerici, Johanne Yngier, et Johanne le Flament,
cappellanis dictæ ecclesiæ Belvacensis, testibus ad præmissa vocatis specialiter et rogatis. De indetenorem
vestrarum litterarum pro posse exsecutioni demandavi,
et accessi ad ecclesiam Fratrum Prædicatorum
Belvacensium, ibidemque inquisivi si erat aliquis subinquisitor,
loquendo personaliter fratri Germano (3)
de Morlaines, priori ejusdem ecclesiæ. Qui mihi respondit
quod nullum sciebat subinquisitorem in sua
ecclesia aut conventu. Ipsum tamen subinquisitorem,
si quis esset, et omnes alios interesse credentes, citavi,
prout mihi mandabatur, ad personam dicti fratris
Germani, palam et publice. Qui ulterius mihi respondit
quod non credebat quod erat aliquis cujus interesset,
et quod nunquam viderat neque cognoverat
illum inquisitorem in vestris litteris nominatum ; se referendo
reverendis paternitatibus vestris. Deinde præsentavi
et realiter obtuli copiam citationis et articulorum,
quam recipere noluerunt. In cujus rei testimonium,
præsentem meam relationem manu mea scripsi
et signavi.
Anno Domini MCCCCLV., die duodecima
mensis februarii. »
Sic signatum « G. TOUSSAINT. »
Source :
- Texte original latin : "Procès de Jeanne d'Arc" - T.II - Jules Quicherat (1844), p.277 et suiv.
- Traduction : Pierre Duparc, t.III, p.155 et suiv.
Notes :
1. La formule de la citation précédente répétée au datif.
2. Les manuscrits, vestrorum.
3. Appelé Geremarus ci-dessus , p. 133.
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