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Procès
de réhabilitation
V-2 - Déposition
de Gérard Guillemette |
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Gérard Guillemette de Greux, laboureur, âgé de quarante
ans environ, treizième témoin produit dans cette cause d'inquisition,
juré et interrogé audit Domremy devant nous,
en présence desdits témoins, l'an susdit et le vendredi avant-dernier
jour du mois de janvier, requis par son serment [...]1.
Donc venant aux articles de l'interrogatoire présentés en
cette cause, à savoir sur le premier des articles commençant
par « Premièrement au sujet du lieu d'origine, etc. »,
et aussi sur les deuxième et troisième articles suivant, à lui
exposés, requis déclara par serment que Jeanne la Pucelle
fut engendrée par Jacques d'Arc et Isabet, mariés, laboureurs
dudit village, vrais catholiques, de bonne renommée, de
bonne réputation, exempts de reproches, comme tout bon
laboureur ; à ce qu'il croit elle fut baptisée dans cette paroisse
de Domremy, et à ce qu'on dit, elle eut de bons parrains et
marraines. Il connaît Jean Morel, son parrain, et Jeannette
Roze et Jeannette veuve de Thiesselin, ses marraines, à ce
qu'il affirme. Ne sait rien d'autre.
Sur l'article suivant, le quatrième de l'interrogatoire, commençant
par « De même si dans son plus jeune âge, etc. »,
et aussi sur les cinquième, sixième, septième et huitième articles
suivant, requis déclara avoir vu ladite Jeannette et
l'avoir bien connue depuis le temps qu'il l'a rencontrée ;
c'était une fille bonne, honnête et franche, qui s'entretenait
avec les honnêtes filles et femmes du village, allait volontiers
et souvent à l'église, se confessait volontiers et dévotement
comme il le vit, et, croit-il, une meilleure n'existait pas dans
le village. Elle aimait travailler, filant, accomplissant les
tâches domestiques et se rendant utile à ses père et mère ;
parfois elle allait à la charrue, suivant la volonté paternelle.
Ne saurait rien ajouter à sa déposition.
Sur l'article suivant, le neuvième, commençant par « De
même qu'en est-il, etc. », requis déclara avoir souvent entendu
appeler cet arbre « l'arbre des fées » ; et anciennement les dames
des seigneurs de Domremy avaient coutume d'aller avec
leurs demoiselles et leurs servantes sous cet arbre pour se
promener. Déclara que parfois les jeunes filles et les jeunes
gens du village de Domremy, au dimanche du Letare Jerusalem
appelé « des Fontaines » vont « pour faire leurs fontaines » et se promener sous cet arbre ; ils apportent du pain
et mangent là ; ensuite ils reviennent à la fontaine des Rains
et boivent de son eau. Déclara en outre qu'il vit une fois cette Jeannette au dimanche susdit avec les jeunes filles,
mais ne la revit plus ensuite. Déclara que les jeunes filles et
jeunes gens de Greux vont « faire leurs fontaines » à l'église
Notre-Dame de Bermont. N'a rien à ajouter à sa déposition.
Sur l'article suivant, le dixième, commençant par « De
même qu'on enquête, etc. », requis déclara que, lorsque cette
Jeannette partit du domicile paternel, il la vit passer devant
cette maison avec un oncle, nommé Durand Laxart ; et alors
Jeannette dit à son père : « Adieu ! Je vais à Vaucouleurs. (1)»
Et ensuite il entendit dire qu'elle allait en France. Ne sait
rien d'autre.
Sur l'article suivant, le onzième, commençant par « De
même si dans ledit pays, etc. », requis déclara ne rien savoir.
Sur l'article suivant, le douzième, commençant par « De même si quand, etc. », requis déclara par serment que lui, témoin qui parle, fut à Neufchâteau avec ladite Jeanne, ses
père et mère, et il la vit toujours avec ses père et mère, sauf
que pendant trois ou quatre jours cette Jeannette, en présence
de ses père et mère, aidait l'hôtesse du lieu où ils étaient
logés, une certaine la Rousse, honnête femme de la ville ;
mais sait bien qu'ils ne restèrent à Neufchâteau que quatre
ou cinq jours, jusqu'au départ des bandes armées ; alors
Jeanne revint avec son père et sa mère audit village de
Domremy. N'en sait pas plus.
Cité il vint, et a déposé sans passion
ni sollicitation, sans être payé, sans haine ni crainte ni partialité.
Et il lui fut enjoint, etc.
Gerardus Guillemete, de Greu,
laborator, etatis XL annorum, vel circa, decimus tercius testis
in huiusmodi inquisicionis causa productus iuratus et examinatus
in dicto Dompno Remigio, coram nobis, in presencia predictorum testium,
anno predicto, et die veneris penultima mensis ianuarii requisitus,
per suum iuramentum [...] Videlicet
Super I° eorumdem articulorum, sive interrogatoriorum, articulo,
incipiente : "Primo, de loco originis, etc..." ; eciam
super II° et III° sequentibus articulis sibi expositis,
requisitus,
"Dixit per suum iuramentum quod dicta Iohanna la
Pucelle fuit ex Iacobo Darc et Ysabelleta coniugibus, laboratoribus
dicte ville, veris catholicis, bone fame, boni nominis, absque diffamacione,
ut laboratores, procreata. Et, ut credit, fuit baptizata in parrochia
dicte ville de Dompno Remigio, in ecclesia beati Remigii. Et, ut
dicitur, habuit bonos patrinos et matrinas. Cognoscit Iohannem Morelli,
suum patrinum, et Iohannetam Roze, ac lohannetam, relictam Thiescelini,
suas, ut asseritur, matrinas. Nec aliud scit."
Super IV° sequente articulo sive interrogatorio, incipiente
: "Item, si in primitiva etate, etc..." ; eciam super
V°, VI°, VII° et VIII° sequentibus articulis, requisitus,
"Dixit quod vidit dictam Iohannetam, ac a tempore
sue noticie bene eam agnovit. Que erat bona, honesta et simplex
filia, conversans cum bonis puellis et mulieribus dicte ville ;
ac ibat libenter et sepe ad ecclesiam ; libenter et devote confitebatur,
prout vidit ; et, ut credit, non erat melior ipsa in dicta villa.
Libenter operabatur, nendo, neccessaria et utilia domus patris et
matris suorum faciendo et preparando. Et aliquociens ibat ad aratrum,
et animalia custodiebat secundum voluntatem patris. Nec alias sciret
deponere."
Super IX° sequente articulo, incipiente : "Item, quod
habet, etc...", requisitus,
"Dixit quod audivit semper vocare illam arborem l'obre dominarum. Et antiquitus domine temporales dicte ville
de Dompno Remigio solebant, cum suis domicellis et ancillis, ire
ad spaciandum subtus illam arborem. Dixit quod aliquando puelle
et pueri iuvenes dicte ville de Dompno Remigio, in dominico Letare
Iherusalem, dicto des Fontaines, vadunt ad faciendum suos
fontes et spaciandum ad illam arborem ; portant panem, et ibidem
comedunt ; et postea rediunt ad fontem rannorum, et de aqua eiusdem
bibunt. Dixit eciam quod vidit dictam Iohannetam semel in dicto
dominico, cum dictis puellis. Nec unquam ipsam ulterius vidit. Dixit
quod et puelle ac pueri ville de Greu vadunt factum suns
fontes, ad ecclesiam beate Marie de Bermont. Nec aliud deposuit."
Super X° sequente articulo, incipience : "Item, inquiratur,
etc...", requisitus,
"Dixit quod, dum ipsa Iohanneta recessit a domo
patris, vidit ipsam Iohannam transire ante domum patris sui, cum
quodam avunculo suo, nuncupato Durando Laxart ; et tunc ipsa
Iohanneta dixit suo patri : "Ad Deum ! Ego vado ad Valliscolorem."
Et audivit dici postea quod ipsa Iohanna ibat ad Franciam. Nec aliud
scit."
Super XI° sequente articulo, incipiente : "Item, si in
dicta patria, etc...", requisitus,
"dixit se nichil scire."
Super XII° sequente articulo, incipiente : "Item, si
quando, etc...", requisitus,
"Dixit per suum iuramentum, quod ipse testis qui
loquitur fuit in Novo Castro cum dicta Iohanna, patre et matre suis
; viditque dictam Iohannam semper cum patre et matre ; excepto quod,
per tres aut quatuor dies, ipsa Iohanneta, in presencia patris et
matris, adiuvabat hospitissam ubi erant locati, videlicet to Rousse,
dicte ville honestam mulierem. Sed bene scit quod ipsi non steterunt
in dicto Novo Castro, nisi per quatuor aut quinque dies, donec armati
fuerunt transacti. Et tunc ipsa Iohanna rediit cum patre et matre
suis, ad dictam villam de Dompno Remigio."
Plura nescit. Citatus venit. Nec amore [...]
Et fuit sibi iniunctum, etc...
Sources :
- "La rédaction épiscopale du procès de 1455-1456", Paul Doncoeur et Yvonne Lanhers, 1961
- Traduction : Pierre Duparc.
- Articles du questionnaire
Notes :
* Voir serment Jean Morel.
1 Il est permis de douter qu'elle dit à son père : "je vais à Vaucouleurs" alors qu'elle a demandé à son oncle de l'emmener chez lui pour justement cacher ce voyage à Vaucouleurs.
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