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Procès de réhabilitation
V-1 - Déposition de Richard de Grouchet en 1452 |
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Vénérable et discrète personne messire Richard de Grouchet, prêtre, maître ès arts et fait bachelier en théologie, chanoine de l'église collégiale de Salcey au diocèse d'Évreux, âgé de soixante ans ou environ, témoin produit, entendu et juré, ledit jour de mardi.
1. Sur le Ier article, il déclare croire que cet article contient la vérité sur les faits et gestes des Anglais.
2. Sur le IIe article, il déclare qu'il contient la vérité, et la renommée était que les Anglais craignaient Jeanne.
3. Sur le IIIe article, il déclare qu'elle fut conduite dans cette cité de Rouen ; et il la vit au château de Rouen où elle fut incarcérée ; mais ne sait déposer à propos de la crainte et des appréhensions des juges, dont il est question ; la renommée publique cependant, dans cette cité de Rouen, était que les Anglais faisaient faire tout par haine et colère.
4. Sur le IVe article, il déclare qu'il lui semble que certains des assistants au procès étaient volontaires et partiaux, d'autres contraints et forcés, et beaucoup craintifs, dont certains s'enfuirent pour ne pas être présents au procès ; parmi ceux-ci messire Nicolas de Houppeville fut en grand péril. En outre maîtres Jean Pigache et Pierre Minier, comme il l'apprit d'eux, et lui-même qui parle demeurant avec eux, donnèrent leur avis sous la crainte, les menaces et dans la terreur, et assistant au procès ils formèrent le projet de fuir ; et il déclare avoir entendu plusieurs fois de la bouche de maître Pierre Morisse que celui-ci, après la première prédication, avait exhorté Jeanne à persévérer dans son bon propos, mais que les Anglais en avaient été mécontents et qu'il avait été en grand péril d'être battu, à ce qu'il disait.
5. 6. Sur les Ve et VIe articles, il déclare croire que les notaires écrivaient fidèlement. Il vit cependant et entendit l'évêque de Beauvais injurier violemment les notaires, quand ceux-ci ne faisaient pas ce qu'il voulait ; et la scène était très violente, à ce qu'il assure, d'après ce qu'il a vu et entendu.
7. Sur le VIIe article, il déclare n'avoir pas su ou vu que quelqu'un se fût mêler d'instruire ou de conseiller Jeanne, et il n'a pas vu qu'elle eût demandé ou qu'on lui eût offert un conseiller ; il pense cependant qu'au début du procès elle demanda un conseiller, mais ne peut l'affirmer avec certitude. Dit en outre ignorer si quelqu'un fut en péril de mort pour l'avoir défendue ; mais il sait bien que, au cours d'autres interrogatoires difficiles, certains ayant voulu diriger Jeanne furent réprimandés durement et sévèrement, et ils étaient taxés de partialité, tantôt par ledit évêque de Beauvais, et tantôt par maître Jean Beaupère ; ce dernier disait à ceux qui la dirigeaient de la laisser parler, et qu'il était désigné pour l'interroger.
8. Sur le VIIIe article, il déclare bien savoir que Jeanne était en prison dans le château de Rouen, et qu'elle était gardée, amenée et emmenée par les Anglais ; mais ne sait rien des entraves et des chaînes, bien qu'il eût entendu dire qu'elle était détenue durement et étroitement.
9. Sur le IXe, il croit qu'elle était bien de l'âge indiqué ; elle répondait cependant avec sagesse, très exactement, et il entendit dire au seigneur abbé de Fécamp de l'époque qu'un grand clerc aurait bien pu faillir dans les réponses aux interrogations difficiles qui lui étaient faites ; sait cependant qu'elle était ignorante du droit et de la procédure.
10. Sur le Xe, il déclare ne rien savoir.
11. 12. Sur les XIe et XIIe articles, il déclare l'avoir vue interrogée sur des questions difficiles, peu claires et captieuses, dans l'intention lui semble-t-il, de la surprendre en parole et de la détourner de son propos ; et néanmoins, en considérant sa faiblesse de femme, elle répondait bien ; et parfois elle faisait remarquer qu'elle avait déjà répondu à certaines questions qui lui étaient à nouveau posées, en indiquant le jour.
13. Sur le XIIIe, il déclare avoir entendu plusieurs fois au cours du procès, de la bouche de Jeanne, le contenu de l'article.
14. Sur le XIVe article, il déclare avoir vu et entendu au procès Jeanne interrogée si elle voulait se soumettre à l'évêque de Beauvais et à quelques-uns des assistants, alors désignés ; elle répondait que non, et qu'elle se soumettait au pape et à l'Église catholique, demandant à être conduite au pape. Et comme on lui disait que son procès serait envoyé au pape pour qu'il en fût juge, elle répondait ne pas vouloir qu'on agît ainsi, car elle ne savait pas ce qu'on mettrait dans le procès ; mais elle voulait être conduite devant le pape et être interrogée par lui.
15. 16. Sur les XVe et XVIe articles, il déclare ne pas savoir s'il fut inséré ou inscrit dans le procès qu'elle ne se soumettait pas à l'Église, et il n'a pas vu que cela fût écarté ; mais il sait qu'en présence de lui, qui parle, Jeanne se soumit toujours au jugement du pape et de l'Église.
17. Sur le XVIIe article, il déclare ne rien savoir d'autre que ce qu'il a déposé ci-dessus.
18. Sur le XVIIIe article, il déclare que le notaire écrivait le procès en français, et quand il y avait doute sur le texte il le relisait. Mais sur la traduction ne sait rien.
19. Sur le XIXe, il déclare l'article vrai, pour ce qui est du droit. Mais quant au fait déclare que lui et les dénommés Pigache et Minier donnèrent leur avis par écrit, suivant leur conscience, ce qui ne plut pas à l'évêque, ni aux assesseurs, et l'évêque dit : « C'est cela que vous avez fait ? ».
20. Sur le XXe, il déclare croire que les notaires ont bien et fidèlement rédigé.
21. Sur le XXIe article, il déclare que la sentence lui parut toujours, à lui qui parle, injuste, et il ne sait où on a pris les motifs et raisons de la condamner. Sur les autres points contenus dans l'article s'en rapporte au droit.
22. Sur le XXIIe, il déclare qu'elle répondait toujours elle-même, et ne vit pas qu'elle eût quelque défenseur. Pour le reste il a déposé ci-dessus.
23. Sur le XXIIIe article, il déclare que le contenu de l'article était de renommée publique dans cette cité de Rouen.
24. Sur le XXIVe article, il déclare qu'il n'a pas eu connaissance, et qu'il n'a jamais entendu dire, qu'il y ait eu une sentence prononcée par un juge séculier contre Jeanne, car il ne fut pas présent alors ; mais la voix publique et la rumeur étaient qu'elle avait été conduite au supplice par force et injustement.
25. Sur le XXVe, il déclare qu'il ne fut pas présent ; mais la renommée publique était conforme au contenu de l'article.
26. Sur le XXVIe article, il déclare croire que Jeanne fut mise à mort pour les raisons contenues dans l'article ; ignore cependant si on avait l'intention de déshonorer le roi notre sire ; mais il croit bien que c'est par mépris pour le roi qu'elle fut mise à mort, étant donné la manière de procéder et le genre du jugement.
27. Sur le XXVIIe, il déclare vrai ce qu'il a déposé ci-dessus.
Venerabilis et discretus vir, magister Ricardus de Groucheto, presbyter, in artibus magister, et in theologia baccalarius formatus, canonicus ecclesiæ collegiatæ de Salceya, Ebroicensis diæcesis, astatis LX annorum, vel circa, testis produetus, receptus et juratus, die martis prædicta.
Super I. articulo, dicit quod credit ipsum articulum continere veritatem, ex factis et gestis ipsorum Anglicorum.
Super II. articulo, dicit quod continet veritatem, quodque fama erat quod Anglici timebant ipsam Johannam.
Super III. articulo, dicit quod fuit adducta ad hanc civitatem Rothomagensem ; et vidit eam in castro Rothomagensi, ubi fuit incarcerata ; sed de metu et timore judicum articulatis nescit deponere ; sed fama publica erat, in hac civitate Rothomagensi, quod Anglici faciebant fieri ex odio et iracundia.
Super IV. articulo, dicit quod videtur ei quod aliqui de adstantibus in processu erant voluntarii et favo rabiles, alii coacti et inviti, et multi timidi, quorum quidam fugerunt, nolentes adesse processui ; et, infer cæteros, magister Nicolaus de Houppevilla fuit in magno periculo. Necnon magistri Johannes Pigache, et Petrus Minerii, ut audivit ab eis, et ipsemet loquens, qui cum eis manebat, metu et minis ac terroribus tradiderunt opiniones suas, et adstiterunt processui, et fuerunt in proposito fugiendi ; dicitque audivisse pluries ab ore magistri Petri Mauricii quod, cum post primam prædicationem monuisset eam de stando in bono proposito, Anglici fuerunt male contenti, et fuit in magno periculo verberationis, ut dicebat.
Super V. et VI. articulis, dicit quod credit notarios fideliter scripsisse. Vidit tamen et audivit quod episcopus Belvacensis, quando notarii non faciebant sicut volebat, aspere increpabat eos ; eratque res ipsa valde violenta, ut asserit, ex his quæ vidit et audivit.
Super VII. articulo, dicit quod non percepit seu vidit quod aliquis se intromitteret de instruendo aut consulendo ipsam Johannam, nec vidit quod peteret aut fuerit sibi oblatum consilium ; putat tamen quod ab initio processus petiit consilium ; sed ex certitudine nescit. Dicit præterea quod nescit si aliquis fuerit in periculo mortis occasione eam defendendi ; sed bene scit quod, dum alia interrogatoria difficilia fiebant eidem Johannæ, et aliqui ipsam dirigere volebant, dure et rigide reprehendebantur, et de favore notabantur, quandoque per dictum episcopum Belvacensem, et quandoque per magistrum Johannem Beaupère, qui dicebat dirigentibus eam quod dimitterent eam loqui, et quod commissus erat ad eam interrogandum.
Super VIII. articulo, dicit quod bene scit quod dicta Johanna erat in carceribus, in dicto castro Rothomagensi, quodque custodiebatur, ducebatur et reducebatur per Anglicos ; sed de compedibus aut catenis nihil scit, quamvis audiverit semper teneri quod bene aspere et districte tenebatur.
Super IX., credit ipsam fuisse ætatis articulatæ ; respondebat tamen prudenter, multum substantiali ter, audivitque ab ore domini tunc abbatis Fiscampnensis, quod unus magnus clericus bene defecisset respondere interrogationibus difficilibus sibi factis ; scit tamen quod ignara juris et ritus judiciorum erat.
Super X., dicit quod nihil scit.
Super XI. et XII. articulis, dicit quod vidit eam interrogari difficilibus, involutis et captiosis interrogationibus, ut caperetur in sermone, prout sibi videtur, et ut distraheretur a proposito suo ; et, hoc non obstante, secundum fragilitatem muliebrem, bene respondebat ; et aliquando advertebat, designando diem in qua, super aliquibus iterum interrogatis, alias responderat.
Super XIII., dicit quod audivit pluries injudicio, ab ore ipsius Johannæ, contenta in articulo.
Super XIV. articulo, dicit se vidisse et audivisse in judicio quod, cum ipsa Johanna interrogaretur an vellet se submittere episcopo Belvacensi et aliquibus de adstantibus, tunc nominatis, ipsa Johanna respondebat quod non, quodque se submittebat Papæ et Ecclesiæ catholicæ, petendo quod duceretur ad Papam. Et cum sibi diceretur quod processus suus mitteretur ad Papam ut ipsum judicaret, respondebat quod nolebat sic fieri, quia nesciebat quid per eos in processu poneretur ; sed volebat ibi duci, et per Papam interrogari.
Super XV. et XVI. articulis, dicit quod nescit si fuerit positum vel scriptum in processu quod se non submitteret Ecclesiæ, nec vidit prohiberi ; sed scit
quod, in præsentia loquentis, ipsa Johanna semper se submisit judicio Papæ et Ecclesiæ.
Super XVII. articulo, dicit quod nihil aliud scit quam [quod] supra deposuit. Super XVIII. articulo, dicit quod notarius scribebat processum in gallico, et, quando erat dubium super scriptura, ei repetebatur. De translatione vero, nihil scit.
Super XIX., dicit articulum esse verum quoad jus. Quantum vero ad factum, dicit quod ipse, et prænominati Pigache et Minier, tradiderunt opinionem suam in scriptis (1), secundum conscientiam suam ; quæ non fuit episcopo et assessoribus grata, dicendo : « Est hoc quod fecistis ? »
Super XX., dicit quod credit notarios bene et fideliter scripsisse.
Super XXI. articulo, dicit quod dicta sententia semper visa fuit eidem loquenti injusta, nec scivit unde sumpserunt titulos et causas eam condemnandi. De aliis in articulo contentis, se refert ad jus.
Super XXII., dicit quod per se ipsam respondebat, nec vidit quod haberet aliquem defensorem. De residuo supra deposuit.
Super XXIII. articulo, dicit quod decontentis in articulo erat vox publica in hac civitate Rothomagensi.
Super XXIV. articulo, dicit quod non habet notitiam, nec unquam audivit dici quod fuerit aliqua sententia per judicem sæcularem lata contra dictam
Johannam, quia præsens non fuit ; sed vox publica et rumor erat quod violenter et injuste fuit tradita supplicio.
Super XXV., dicit quod non fuit præsens ; sed fama publica ita erat, prout articulus continet.
Super XXVI. articulo, dicit quod, pro causis contentis in articulo, credit ipsam Johannam fuisse morti traditam ; si tamen tendebant ad infamandum dominum nostrum Regem, nescit ; sed bene credit quod in contemptum ejus, attento modo procedendi et modo judicii, fuit morti tradita.
Super XXVII., dicit quod ea quæ sunt supra deposita per eum, sunt vera.
Sources :
- Texte original latin : Quicherat - t.II p.356.
- Traduction: Pierre Duparc, t.III, p.215 à 218.
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