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22 novembre 2024  

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V-4 - Déposition du Sire de Termes : Thibaud d'Armagnac

[Témoins produits en cette cause, reçus, jurés et interrogés par nous, Jean, par la miséricorde divine archevêque de Reims, juge désigné par l'autorité apostolique, en présence de vénérable et religieuse personne frère Thomas Verel, professeur de théologie sacrée, de l'ordre des frères précheurs, vicaire et substitut du seigneur inquisiteur de la foi, et de Gérard de la Salle, prêtre, notaire public, désigné par nous en l'absence des notaires de la cause, en la ville de Paris, l'an du Seigneur mille quatre cent cinquante-six, aux jours contenus dans les dépositions des témoins. Les déclarations, dépositions et attestations de ceux-ci suivent en cette forme :]

  En premier noble et prudent seigneur, Thibauld d'Armagnac, ou de Termes, chevalier, bailli de Chartres, âgé d'environ cinquante ans, interrogé sur le contenu des articles présentés en cette cause le septième jour de mai,

  Et d'abord sur le contenu des Ier, IIe, IIIe et IVe articles, il déclare avoir fait la connaissance
de Jeanne seulement lorsqu'elle vint dans la ville d'Orléans, pour faire lever le siège mis par les Anglais ; le témoin se trouvait dans cette ville d'Orléans pour la garder, en compagnie du sire de Dunois. Lorsqu'ils apprirent l'arrivée de Jeanne, ledit sire comte de Dunois, le témoin et plusieurs autres traversèrent le fleuve de Loire et allèrent chercher Jeanne, qui était du côté de Saint-Jean-le-Blanc ; et ils conduisirent Jeanne dans cette ville d'Orléans. Après cette arrivée, le témoin la vit au cours des assauts contre les bastilles de Saint-Loup et des Augustins, de Saint-Jean-le-Blanc et du pont ; dans ces assauts Jeanne fut si vaillante et se comporta de telle sorte, qu'il n'eût pas été possible à quelque homme de mieux agir en fait de guerre. Et tous les capitaines admiraient sa vaillance, son activité, et les peines et fatigues qu'elle supportait.
  Le témoin croit que c'était un être bon et honnête, et ce qu'elle faisait relevait plus du divin que de l'humain, car elle reprochait souvent leurs vices aux hommes d'armes ; il a même entendu dire par un certain maître Robert Baignart, professeur de théologie sacrée, de l'ordre des frères précheurs, qui avait reçu plusieurs fois sa confession, que cette Jeanne était une femme de Dieu, et ce qu'elle faisait venait de Dieu, enfin que son âme et sa conscience étaient bonnes.
  Il déclare aussi qu'après la levée du siège d'Orléans, le témoin, avec plusieurs autres hommes d'armes, se rendit en la société de Jeanne à Beaugency, où étaient les Anglais. Le jour où les Anglais perdirent la bataille de Patay, le témoin et feu La Hire, sachant les Anglais rassemblés et prêts au combat, dirent à Jeanne que les Anglais venaient et en ordre, prêts à combattre. Celle-ci répondit aux capitaines : « Frappez hardiment : ils prendront la fuite et ne resteront pas longtemps ici ». Alors, à ces paroles, les capitaines se préparèrent à combattre et aussitôt les Anglais furent mis en fuite. Or Jeanne avait annoncé aux Français qu'aucun d'entre eux ne serait tué ou blessé sauf peut-être un petit nombre ; ce qui arriva, car de tous nos hommes un seul fut tué, un noble de la compagnie du témoin.
  Il dit aussi le témoin qu'il se trouva avec notre sire le roi devant la ville de Troyes, et jusqu'à la ville de Reims en la compagnie de ladite Jeanne. Et tout ce qui a été fait par Jeanne, il croit que cela relève plus du divin que de l'humain ; car, comme le dit le témoin, elle se confessait très souvent, recevait le sacrement de l'eucharistie et était très pieuse en entendant la messe. Dit aussi qu'en dehors du fait de guerre elle était simple et innocente ; mais, dans la conduite et la disposition des troupes, dans les faits de guerre et dans l'organisation du combat et l'encouragement aux troupes, elle se comportait comme si elle avait été le plus habile capitaine du monde, entraîné de tout temps à la guerre. Ne sait rien d'autre.

                               

[Testes in hac causa producti, et per nos, Johannem, miseratione divina archiepiscopum Remensem, judicem auctoritate apostolica deputatum, in præsentia venerabilis et religiosi viri, fratris Thomæ Verel, sacræ theologiæ professoris, ordinis Fratrum Prædicatorum, vicarii et substituti domini inquisitoris fidei, et Gerardi Delasalle, presbyteri, notarii publici, ad hoc in absentia notariorum causse per nos deputati, recepti, jurati et examinati, in villa Parisiensi, anno domini MCCCCLVI , diebus in ipsorum testium depositionibus contentis. Dictaque et depositiones et attestationes eorumdem sequntur in hæc verba :]

  Et primo, nobilis et prudens dominus Theobaldus d'Armignac, alias de Termes, miles, baillivus Carnotensis, ætatis L annorum, vel cocirca, examinatus super contentis in articulis in hac causa productis, die vii. maii.

  Et primo, interrogatus de contentis in I., II., III. et IV. articulis ipsorum articulorum : deponit quod de eadem Johanna solum habuit notitiam quando ipsa recessit ad villam Aurelianensem, ad levandum obsidionem ibidem per Anglicos positam : in qua villa Aurelianensi, et pro ejus custodia, ipse loquens erat in societate domini Dunensis. Et dum sciverunt ipsam Johannam advenisse, dictus dominus comes Dunensis, ipse loquens et plures alii transfretaverunt fluvium Ligeris, et iverunt quæsitum eamdem Johannam, quæ erat de latere Sancti Johannis Albi ; et eamdem Johannam adduxerunt ad dictam villam Aurelianensem. Post cujus adventum ipse loquens eam vidit in insultibus factis in bastiliis Sancti Laudi et Augustinensium, Sancti Johannis Albi et Pontis ; in quibus insultibus ipsa Johanna fuit ita valens et ita se gessit, quod non esset possibile cuicumque homini melius agere in facto guerræ. Et mirabantur omnes capitanei de sua valentia et diligentia, ac poenis et laboribus per eam supportatis.
  Et credit quod erat bona et proba creatura, et quod ea quæ faciebat plus erant divinitatis quam humanitatis, quia reprehendebat sæpe vitia armatorum ; et (ut audivit etiam dici a quodam magistro Roberto Baignart, sacræ theologiæ professore, ordinis Fratrum Prædicatorum, quod ipse eam audiverat pluries in confessione), quod ipsa Johanna erat mulier Dei, et quod ea quæ faciebat erant a Deo ; quodque ipsa erat bonæ animæ et bonæ conscientiæ.
  Dicit etiam quod, post levatam obsidionem Aurelianensem, ipse loquens cum pluribus aliis armatis ivit in societate dictæ Johannæ à Baugency, ubi erant Anglici. Et die qua Anglici perdiderunt bellum apud Patay, ipse loquens et defunctus La Hire, scientes Anglicos esse congregatos et ad bellum paratos, dixerunt eidem Johannæ quod Anglici veniebant et erant in bello parati ad pugnam. Quæ respondit, dicendo capitaneis : « Percutiatis audacter, ipsi fugam capient ; » nec diu ibidem starent. Et tunc ad ejus verbum, capitanei se disposuerunt de invadendo, et illico Anglici conversi fuerunt in fugam. Et prædixerat ipsa Johanna Gallicis, quod de gentibus suis nulli vel pauci interficerentur, nec haberent damnum : quod ita accidit, quia de omnibus hominibus nostris, fuit interfectus solus quidam nobilis de societate loquentis.
  Dicit etiam ipse loquens quod ipse fuit cum domino nostro rege ante villam Trecensem et usque ad villam Remensem, in societate dictæ Johannæ. Et de omnibus factis per eamdem Johannam plus credit esse divinitatis quam humanitatis, quia, ut dicit loquens, ipsa sæpissime confitebatur, recipiebat sacramentum Eucharistiæ, eratque devotissima audiendo missam. Dicit tamen quod extra factum guerræ erat simplex et innocens ; sed in conductu et dispositione armatorum, et in facto guerræ, et in ordinando bella et animando armatos, ipsa ita se habebat ac si fuisset subtilior capitaneus mundi, qui totis temporibus suis edoctus fuisset in guerra. Nec aliud scit.


Sources :
- Texte original latin : Quicherat - Procès t.III p. 118.
- Traduction: source Pierre Duparc, t.IV, p. 84 à 86.

Notes :
/

Procès de réhabilitation
Témoins de Paris

Les dépositions :

Jean Tiphaine
Guillaume de la Chambre
Mgr Jean de Mailly
Me Thomas de Courcelles
Me Jean Monnet
Louis de Coutes
Gobert Thibault
Simon Beaucroix
Jean Barbin
Marguerite de La Touroulde
Jean Marcel
Mgr le Duc d'Alençon
Fr. Jean Pasquerel
Fr. Jean de Lenizeul
Simon Charles

Le Sire de Termes
M. Haimond de Macy
Colette Milet
Pierre Milet
Me Aignan Viole





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