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Procès
de condamnation
Les
religieux rouennais |
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Le couvent des Augustins à Rouen :
Les Augustins ou Grands-Augustins étaient établis
à Rouen, rue Malpalu et rue des Grands-Augustins au XIV°
siècle.
Il reste de ce monastère le logis construit
au XVIII° siècle. On y remarque encore les arcades du
cloître. La chapelle qui subsiste presqu'en entier, appartient
au XIV° siècle.
Derrière un porche du XVII° siècle, on y voyait
encore apparaître à la fin du XIX° siècle
une belle fenêtre à réseau rayonnant et une
petite fenêtre abritée par un arc saillant porté
sur consoles, le tout encadré par deux tourelles circulaires
à toît conique de pierre.
C'est dans cette chapelle que fut inhumé, en
1463, Jean Le Fèvre, évêque de Démétriade,
après avoir assisté au triomphe de Charles VII et
à l'expulsion définitive des Anglais.
Jean LE FEVRE,
Ce religieux, qui était bachelier en théologie,
prit une part assez active au procès de Jeanne d'Arc, où
Il figura aux séances importantes. Le 12 avril, il participa
à la délibération collective sur les douze
articles. Il assista à la séance du 2
mai et à celle du 19 mai, où il déclara s'en
tenir à la délibération du 12 avril et
à celle de la Faculté de théologie de l'Université
de Paris, ajoutant toutefois que "ladite Jeanne doit être
encore une fois avertie charitablement, et qu'il faut lui assigner
jour pour cette dernière monition." (1).
Enfin, il fut présent à la scène de l'abjuration
au cimetière de St-Ouen et à la séance du 29
mai où Jeanne fut déclarée relapse et condamnée
à mort.
Après le supplice de la Pucelle, on retrouve
Jean Le Fèvre à Rouen, où il paraissait jouir
d'une grande réputation comme prédicateur. On le voit
prêcher fréquemment (1438, 1439, 1440), notamment à
St-Ouen, "pour ce que les ennemis (les Français) s'estoient
fuis de devant Pontoise". Ce passage caractérise suffisamment
son patriotisme.
Favori des Anglais, dont il soutenait si fidèlement
la cause, il fut grand pénitencier de l'église de
Rouen, sous l'archevêque Louis de Luxembourg, négociateur
de la vente de la Pucelle. Il fut même nommé évêque
de Démétriade in partibus (2),
et remplaça souvent les archevêques de Rouen, en qualité
de suffragant. C'est ainsi qu'il fit en leur nom les ordinations
de 1452 à 1461, sauf en l'année 1457.
En 1444, il assista à la réception qui
fut faite, à la cathédrale, de Raoul Roussel, autre
favori de Cauchon et de Bedford, nommé archevêque de
Rouen, et dont il devint le confesseur.
Il mourut en 1463, sous l'épiscopat du cardinal
d'Estouteville, qui contribua à la solennité de son
service par l'offre de seize livres de cire. Nous le
verrons aussi, non sans surprise, figurer au procès de réhabilitation.
Le couvent des Carmes à Rouen :
Le quartier des Carmes à Rouen avait groupé,
pour ainsi dire, les personnages les plus hostiles à la Pucelle.
En face de la rue de la Chaîne, aujourd'hui Place des Carmes,
se trouvait la maison canoniale de Nicolas Loiseleur, fréquentée
par Pierre Cauchon et le chanoine Nicolas Midi.
Tout près s'élevaient deux hôtels
somptueux occupés par Jean de Rinel, neveu de Cauchon
et decrétaire de Henri VI ; et un peu plus loin, la demeure
de Jean Rubé, qui abrita l'évêque de Beauvais
et réunit ses confidents lors des préliminaires du
procès !
A la révolution, l'église des Carmes et
le couvent ont complètement disparu et forment aujourd'hui
la place des Carmes.
Pierre HODENC, prieur,
Nous avons mentionné précédemment
les donations importantes que Bedford avait faites au couvent des
Carmes, dont il avait été proclamé le second
fondateur.
Il n'est donc pas surprenant de trouver le prieur de
ce couvent, Pierre de Hodenc, parmi les assesseurs les plus hostiles
à la Pucelle, assistant à la plupart des séances
et prenant part à toutes les délibérations
importantes, comme aussi à la séance de l'abjuration
et au supplice sur la place du Vieux Marché.
Le 14 août 1431, il avait approuvé, au
nom de sa communauté, l'acte par lequel les chanoines déchargeaient
les religieux carmes des dettes qu'ils avaient contractées
envers eux, moyennant la donation qui leur était faite des
dîmes de Sierville, achetées à cette fin par
le Duc de Bedford (3). Cette donation
et la faveur du régent avaient fait du prieur un servile
instrument de la vengeance exercée par les Anglais contre
La Pucelle.
Pierre de Hodenc devait avoir quelque talent de parole
car il prêcha au compte de l'archevêque de Rouen de
1430 à 1439.
On trouve encore associé au procès un
autre religieux de ce couvent, Guillaume LE BOUCHIER, docteur
en théologie, qui résidait en la maison de Rouen dès
l'année 1422. Il se montra aussi hostile que le prieur et
fut l'un de ceux qui déclarèrent Jeanne relapse.
Figurait aussi la présence d'un illustre carme
anglais, Thomas de Valden, confesseur et prédicateur
d'Henri VI, qui y mourut le 3 des nones de 1430.
Les Dominicains ou Jacobins de Rouen :
Le
couvent des Jacobins, qu'on voyait encore avant la révolution
où s'élève aujourd'hui l'hôtel de la
préfecture, était représenté au procès
de Jeanne par son prieur, Jean Lemaître, qui avait été
appelé officiellement à siéger à raison
de son titre de vice-inquisiteur.
Plusieurs autres religieux jacobins donnèrent
leur avis dans le procès. Ce furent Isambard de La Pierre,
Thomas Amouret et Jean Le Sauvage (4).
Ce dernier assista à la sentence d'abjuration. Son avis sur
Jeanne d'Arc fut relativement modéré. Il avait adhéré
à la délibération collective des vingt deux
théologiens, qui constituait une véritable déclaration
de culpabilité ; mais il parut regretter ultérieurement
cette manifestation et rédigea une longue consultation où
il osa conclure que "pour donner à la sentence définitive
plus de certitude et de poids, et la mettre à l'abri de toute
critique, il lui semblait pour l'honneur de la majesté royale
et la paix de beaucoup de consciences, il serait bon que
les douze articles fussent adressés avant tout au saint-Siège."
On se garda bien de tenir compte de cet avis. Plus tard,
ce religieux rappelait comme à regret cette inique procédure.
Il déclarait, en parlant de Jeanne, "qu'il n'avait
jamais vu d'accusé donner tant de peine aux juges, et qu'il
était resté émerveillé de ses réponses
et de sa mémoire". (5)
Il devait avoir quelque talent comme orateur car il
prêcha à la Cathédrale dans les années
1427, 1438, 1439, 1440, 1447.
Isambard
de LA PIERRE et Martin LADVENU, également dominicains,
méritent une mention spéciale à cause
de l'assistance à cause de l'assistance qu'ils ont prêtée
à Jeanne dans la journée du 30 mai et jusque sur le
bûcher du Vieux-Marché.
Ladvenu était fort jeune alors et n'avait guère
que vingt-cinq ans. Tous deux avaient été entraînés
par la masse des théologiens et des hauts dignitaires du
clergé normand. C'est avec regret qu'on constate leur présence
à la séance générale du 19 mai,
où ils adhérent aux délibérations de
l'université, et surtout à la réunion suprême
du 29 mai où Jeanne fut déclarée relapse et
par conséquent condamnée à mort.
Tout en retenant cette lourde responsabilité
à leur charge, il serait injuste d'oublier le rôle
tout de charité et d'humanité qu'ils remplirent le
lendemain envers celle qu'ils avaient condamnée.
Ils allèrent la visiter dans sa prison où
ils la trouvèrent le visage défiguré et outragé
par la violence des Anglais. Après lui avoir donné
la communion, loin de l'abandonner, ils l'accompagnèrent
jusqu'au lieu du supplice. Pendant que Ladvenu
montait avec elle sur le bûcher, au risque d'être gagné
par les flammes, Isambard de La Pierre et Massieu allèrent
chercher la croix de l'église Saint Sauveur qu'ils tinrent
élevée devant ses yeux jusqu'à sa mort. Ils
avaient eu ses derniers secrets et crurent à sa sainteté
et à son martyre.
Ces marques de sympathie de la dernière heure
rattachent d'une manière intéressante ces deux moines
rouennais au souvenir de l'immortelle suppliciée.
Frère
Jean VALLÉE, autre dominicain, a siégé
à la seule séance du 27 mars.
Les Cordeliers de Rouen :
Jacques
GUESDON, frère mineur, docteur en théologie,
représentait au procès le couvent des Cordeliers,
fondé à Rouen en 1246 par Eudes Rigaud et saint Louis.
On est surpris que cette communauté nombreuse
et abondamment pourvue de
théologiens n'ait fourni qu'un assesseur. les contestations
que ces religieux eurent avec l'archevêque Roussel permettent
de croire qu'ils étaient peut-être aussi suspects en
politique qu'en droit canonique (3). Dans tous les cas le choix
de Cauchon fut heureux, car Jacques Guesdon assita à presque
toutes les séances et fut l'un des plus empressés
à condamner la Pucelle.
Dans son adhésion à la délibération
du 12 avril, "vénérable père maître
Jacques Guesdon, maître en théologie du couvent des
Frères mineurs de Rouen", se joignit entièrement
à l'avis des seigneurs et maîtres en théologie
réunis dans la chapelle du manoir archiépiscopal,
et "parce qu'il est appelé au dehors pour ses affaires,
il nous a demandé, dit l'évêque de Beauvais,
la permission de quitter Rouen, toujours prêt, lorsqu'il sera
de retour, à se rendre toutes fois et quantes, et à
nous obéir ainsi qu'il en est tenu".
On trouve aussi ce religieux aux deux séances
solennelles des 19 et 29 mai, qui décidèrent su sort
de l'accusée.
Le couvent des Cordeliers était fort important.
On voyait encore au milieu du XIX° siècle, les restes
de l'ancienne église, magnifique vaisseau du XIII° siècle,
dont les fenêtres étaient parfaitement conservées
sur les côtés. On apercevait aussi le chevet éclairé
par une haute et belle fenêtre de la même époque.
Sources
: Albert Sarrazin - "Jeanne d'Arc et la Normandie au XV°
siècle" - 1896
Illustration : "La grande histoire illustrée de Jeanne
d'Arc" H.Debout - 1922
Notes :
1 O'Reilly - t.2 p.362
2 C'est à dire ayant reçu sans juridiction réelle,
le siège épiscopal supprimé du fait de la
disaprition du christianisme en pays infidèle ou schismatique.
3 Ch.de Beaurepaire - "Fondations pieuses du Duc de Bedford
à Rouen"
4 Il est dénommé au procès Raoul Le Sauvage.
5 Déposition de Marcel au procès de Réhabilitation.
6 De Beaurepaire (Notes sur les juges...)
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