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24 novembre 2024  

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Procès de condamnation
Les docteurs de l'Université de Paris.

' UNIVERSITÉ de Paris n'ayant pu obtenir que la Pucelle fût jugée dans la capitale, voulut remettre ses pouvoirs à ses docteurs les plus autorisés, afin de paraître au procès avec un éclat digne d'elle.
  Cauchon eut l'habileté de se couvrir par des hommes tels que Guillaume Érart, le fougueux prédicateur de Saint-Ouen, qu'on qualifia plus tard : "vir clarissimæ virtutis et eximia sapientæ". Nicolas Midi, qui devait prêcher au Vieux-Marché ; enfin et surtout, Thomas de Courcelles qui devait être la lumière du Concile de Bâle. Il sut compromettre complètement ce dernier en le chargeant de rédiger en latin l'acte authentique du procès.
  Ces docteurs, hommes politiques considérables, rompus aux affaires et vendus aux Anglais, devaient tenir à Rouen une grande place et entraîner par leur autorité le clergé local et les assesseurs timorés ou indécis.
  Ce choix fut d'autant plus habile, remarque Quicherat, qu'ils n'apparaissaient point à la foule comme des énergumènes, poursuivant avec acharnement une vengeance politique. Leur gravité connue, la considération dont ils jouissaient et la nature du tribunal autour duquel ils allaient se grouper, devaient produire généralement une attente mêlée de respect.
  Cauchon envoya chercher spécialement les délégués de l'Université à Paris. Ce fut son neveu par alliance (1), Jean de Rinel, secrétaire du roi Henri VI, qui fut chargé de cette mission.
  L'évêque de Beauvais, réunissait ainsi à Rouen, avec le représentant de l'Inquisition tous ceux qui avaient qualité pour statuer en matière de foi.

JEAN BEAUPÈRE,

  Docteur en théologie, occupait un rang élevé dans l'Université de Paris où il avait exercé les fonctions de chancelier, en l'absence de l'illustre Gerson.
  Il avait été nommé en 1430 par Henri VI, à la prébende canoniale vacante à Rouen par le décès de Robert Malderrée. II y fut reçu, en personne, en 1431, quand il vint à Rouen (20 février) pour le procès de Jeanne d'Arc, dont il se montra l'ennemi acharné (2).
  Il devait jouer plus tard un rôle important au Concile de Bâle. Accusé d'avoir adhéré à la déposition du Pape, il se vit privé de son canonicat de Rouen, mais il put justifier de son orthodoxie et rentra dans sa prébende. Il la conserva même plus tard, en invoquant sa qualité de bon Français, quand Charles VII eut repris Rouen !
  Il fut interrogé, lors du procès de réhabilitation, et il prouva qu'il avait quitté Rouen pour se rendre à Bâle, le lundi qui suivit l'abjuration à Saint-Ouen, et "qu'il ne sceut aucunes nouvelles de sa condampnation jusques à ce qu'il oyt dire à Lille en Flandre".

GUILLAUME DE LA CHAMBRE,

  Maître ès-arts et licencié en médecine, né en 1403, tout ce qu'on sait de lui, c'est que son père, Guillaume de la Chambre, était maître en médecine et physicien de la Reine. Son frère et lui vendirent, en 1430 à la Nation de Normandie en l'Université de Paris, une maison située rue Galande. Cet universitaire était très jeune alors : car, lorsqu'il déposa au procès de réhabilitation, on lui donnait quarante-huit ans environ.

THOMAS DE COURCELLES,

   Fut l'une des lumières de l'Eglise gallicane et le plus renommé professeur de l'Université de Paris. Son rôle au procès de Rouen fut des plus accentués.
  Il était né à Amiens vers 1402, et il décéda en 1469, avec le simple titre de doyen du Chapitre de Paris, bien qu'il eût été honoré de l'amitié de Charles VII, dont il prononça l'oraison funèbre, phénomène inexplicable de ce siècle étrange, dit M. O'Reiilly. Si ce choix fait honneur à ses talents oratoires, il ne relève assurément ni son caractère, ni la valeur morale de son temps.
  L'Université le délégua à Arras, avec l'abbé de Sainte-Catherine de Rouen (1434), puis au Concile de Bâle où il fut un de ceux qui déclarèrent le pape relaps et qui furent nommés commissaires pour l'élection d'un nouveau pape.
  A Rouen, de Courcelles se montra l'un des plus acharnés contre la Pucelle. Il travailla au réquisitoire et fut chargé de traduire le procès en latin. Il fut aussi un des rares assesseurs qui votèrent pour qu'elle fût livrée à la torture.
  On l'entendit comme témoin au procès de réhabilitation, où il reconnut que des informations préparatoires avaient été faites à Domrémy sur la Pucelle ; mais il soutint ne pas en avoir eu connaissance.
  Thomas de Courcelles fut inhumé dans la cathédrale de Paris, où sa pierre tombale était placée jadis derrière le choeur.

ERART EMENGARD,

   Docteur en théologie, était étranger au diocèse de Rouen. Il est cependant mentionné dans les registres capitulaires de la Cathédrale comme exécuteur testamentaire de son frère, Hugues Emengard qui avait été chapelain du collège d'Albane.

GUILLAUME ERART,

   Était docteur en théologie du diocèse de Langres et, si l'on en croit des auteurs autorisés, l'une des illustrations de son temps ; il a quelquefois été confondu avec un homonyme qui fut recteur de l'Université et délégué par elle aux Conciles de Bâle et de Bourges. Celui qui parut au procès de la Pucelle fut chanoine des églises de Langres et de Beauvais. Il n'entra au Chapitre de Rouen que le 17 juillet 1432, après le supplice de la Pucelle. Il fut curé de Hautot et de Cliponville, archidiacre du Grand-Caux, sous Signature de Guillaume Érart Hugues d'Orges (1433), puis chantre, en 1435 ; vicaire général et exécuteur testamentaire de cet archevêque, enfin doyen de Rouen après le décès de Gilles Deschamps. En 1434, on le voit interjeter un appel au pape contre le Chapitre qui l'avait molesté dans ses fonctions de vicaire général. Le Chapitre soutenait qu'il n'avait pas été visé à l'occasion de ses fonctions. On voit que ces appels au pape étaient fréquents et souvent motivés par des causes peu graves. Erard fut ensuite le confident et le principal agent de Louis de Luxembourg et, comme lui absolument dévoué à Henri VI, qui le nomma chapelain et le récompensa, ainsi que Jean de Rinel, par la donation des manoirs de Combe et de Moneston, au comté de Southampton.
  Anglais de coeur comme son maître, il mourut comme lui en Angleterre, en 1439.
  On ne saurait oublier qu'il prêcha la Pucelle avec véhémence au cimetière de Saint-Ouen.

GERARD FEUILLET,

   Docteur en théologie, fut des plus assidus au procès, depuis le 13 février, jour de l'arrivée à Rouen des universitaires, jusqu'au 18 avril où il cessa de paraître. Etant rentré à Paris avec les trois délégués qui y portèrent les douze articles, il ne revint pas avec eux.

THOMAS FIEFVET,

  Était picard d'origine et fut recteur de l'Université de Paris, en 1427. Il représenta aussi l'Université au Concile de Bâle, oit il se trouvait encore en 1435.

NICOLAS MIDI,

   Docteur en théologie, fut reçu chanoine de Rouen le 4 mai 1431, pendant le procès de Jeanne, par droit de régale, en vertu de lettres de Henri VI. Il prit possession de son canonicat par Nicolas Loiseleur, dont il fut l'hôte assidu, rue de la Chaîne, et fut installé onze jours avant le supplice de la Pucelle. Les chanoines lui firent remise du droit d'annates qu'il devait à raison de sa prébende "de gracia speciali, actentis serviciis pro ecclesia factis," pour services par lui rendus à l'Eglise. Entendait-on par l'hostilité qu'il manifesta plus que tout autre contre Jeanne ? Ce qui est certain, c'est qu'il assista à toutes les séances, sauf pendant le temps qu'il passa à Paris avec les délégués chargés de soumettre les pièces du procès à l'Université, et notamment les douze articles dont il était l'auteur. Il fut choisi aussi pour haranguer la victime au Vieux-Marché et l'on sait en quels termes durs et inexorables il s'acquitta de cette odieuse mission. Son canonicat à Rouen ne fut qu'un traitement, comme l'observe justement M. de Beaurepaire : car après avoir insinué le privilège de Saint-Romain, le 4 mai 1432, il fut envoyé à Bâle. II devint plus tard suspect aux Anglais qui le privèrent de sa prébende.

JEAN TIPHAINE,

   Prêtre, maître ès-arts, docteur en médecine, chanoine de la Sainte-Chapelle à Paris, résigna cette prébende en faveur de l'Anglais Alain Kyrketon qui lui abandonna, en échange, son canonicat de Rouen (1432). II ne résida pas à Rouen, où il ne vint que pour le procès de Jeanne d'Arc. Le Chapitre le citait à Paris lorsque des délibérations importantes exigeaient sa présence. Sa mort fut annoncée à ses collègues en février 1469.

JACQUES DE TOURAINE,

   Appelé aussi Texier ou Tessier, docteur en théologie, de l'Ordre des Frères mineurs. Il siégea assidûment au procès, du 13 février au 18 avril, date à laquelle il se rendit à Paris avec Beaupère, Feuillet et Midi. Depuis lors il ne fut plus mentionné aux procès-verbaux. D'après Manchon, il fut l'un des docteurs les plus hostiles à l'accusée avec Beaupère et Midi.
  D'autres délégués de l'Université de Paris ne sont connus que par l'insertion de leurs noms aux actes du procès. Ce sont : Jean de Nibat, Richard Dupré, Maurice du Quesney, et Guillaume Foucher.
On peut se demander pourquoi on ne consulta pas d'autres personnages qui apparaissent au procès : Guillaume Adelie, l'un des docteurs qui exhortèrent Jeanne à se soumettre à l'Eglise ; Gilles Canivet, docteur en médecine ; Nic. Lamy et Denis Sabrevois, docteur en théologie, qui fut aussi chanoine de Rouen, mais ne résida pas dans cette ville.


                                                 


Source : Albert Sarrazin - "Jeanne d'Arc et la Normandie au XV° siècle" - 1896.

Illustrations :
- Pierre tombale de Thomas de Courcelles (Jeanne d'Arc et la Normandie au XV° siècle)
- Signature de Guillaume ÉRART (Jeanne d'Arc et la Normandie au XV° siècle)

Notes :
1 Il avait épousé Guillemette, nièce de Pierre Cauchon et fille de Jean Bidault.

2 Il toucha une indemnité spéciale de 30 livres tournois par jour.


Procès de condamnation

Présentation :

- L'organisation du tribunal
- Les sources existantes
- Plan chateau de Rouen
- La prison de Jeanne

Procès :
- Procès


Complément :
- Etude de l'abjuration
- Lettres de garantie




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