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Procès
de réhabilitation
V-2 - Enquête sur les informations évoquées lors du
premier procès. |
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yant reçu au début de ce procès, avec les livres, registres et textes du premier procès, comme il a été dit, les informations sus-mentionnées, faites par le révérendissime seigneur cardinal et par ses commissaires sous son autorité, lesdits archevêque, évêques et inquisiteur, juges délégués, ont voulu
que ces informations fussent tenues comme préalables et
préparatoires au nouveau procès, et qu'elles fussent rédigées
et placées en tête des informations et enquêtes faites tant
d'office qu'à la requête des parties. Lesdits seigneurs délégués,
désireux de tout vérifier complètement et de rechercher par un examen approfondi l'entière vérité, aussi bien pour que
contre la justification du premier procès intenté à Jeanne,
voulurent agir avec la plus grande diligence, à la demande
spécialement de vénérable et discrète personne Simon Chapitault,
promoteur constitué pour cette affaire ; par eux mêmes
et par leurs commissaires ils firent et ordonnèrent
de faire des recherches pour obtenir et recueillir certaines
informations que les juges du premier procès, dans leur exorde,
prétendent avoir été faites de leur autorité au lieu de naissance
de Jeanne et ailleurs ; ils prétendent, à ce qu'ils disent,
les avoir reprises dans certains articles par délibération des
conseillers appelés au procès ; et après leur reconnaissance et
reprise, ils déclarent plusieurs fois dans le procès, affirment
et assurent avoir vu ces informations et les avoir montrées aux
notaires et conseillers du procès.
Après la réception du premier procès et son inspection,
en notre présence, et devant ceux de la main desquels on avait
reçu ledit procès, les seigneurs délégués interrogèrent vénérable
homme maître Guillaume Manchon, principal notaire
de ce procès, qui l'a souscrit à chaque page et l'a écrit en original
pour la plus grande partie ; ils interrogèrent aussi les
deux autres notaires du procès et plusieurs officiers et conseillers
qui y avaient assisté. Attendu qu'ils ne purent rien
trouver desdites informations, que les notaires et conseillers
susdits affirmèrent n'avoir jamais vu, ni entendu, quelque
information pendant le procès, bien que cela eût été relaté
et déclaré sur l'ordre et le commandement des juges du premier
procès ; attendu que les seigneurs délégués prennent
note avec insistance de cette relation et déclaration, et font
une grande confiance à ces informations pour être guidés
dans le cours de ce procès ; à la demande dudit promoteur, pour que la vérité apparaisse à propos de ce premier procès,
et que lui-même agisse de manière plus convenable pour ou
contre le procès ; pour ces raisons lesdits seigneurs délégués,
siégeant en tribunal dans la salle publique de la demeure archiépiscopale
de Rouen, donnèrent plusieurs commissions et firent plusieurs monitions, verbalement et par écrit afin
que, si une personne avait connaissance desdites informations
ou savait quelque chose à leur sujet, elle le produisît et le
notifiât dans un certain délai ; et ils avertirent spécialement
ceux qui avaient été convoqués au nom de l'évêque de
Beauvais, des religieux de l'ordre des frères prêcheurs du
couvent de Beauvais et de l'inquisiteur. Enfin, parce que,
ni par les interrogations, ni par les monitions, on ne put découvrir
quoi que ce fût au début de ce procès, lesdits seigneurs
délégués, enquêtant sur les articles sus-mentionnés des
parties, interrogèrent spécialement et firent interroger sur lesdites informations de nombreux témoins, surtout des
conseillers, des officiers, et de nouveau lesdits notaires.
Tous, ainsi entendus, déclarèrent qu'ils n'avaient jamais
vu ni ouï lesdites informations, et qu'elles ne leur avaient
pas été montrées, ni à eux, ni à d'autres ; en particulier ledit
Manchon déclara dans sa déposition qu'il ne les avait jamais
vues, et que, s'il les avait vues ou appris leur présentation aux
conseillers, il l'aurait mis dans son registre. De même vénérable
personne, maître Thomas de Courcelles, professeur de
théologie sacrée, l'un des conseillers auxquels on prétend que
ces informations furent montrées, désigné au début de ce
procès, déclare ne se rappeler en aucune manière que lesdites
informations aient été faites ou montrées ; il ajoute en outre dans sa déposition ce qui est contenu plus au long ci-dessous,
dans les enquêtes faites à Paris : à savoir que vénérable personne,
maître Jean Loyer, cité à ce procès après son commencement,
refusa de paraître et déclara que le procès n'était pas
conduit conformément au droit, parce que les informations
préalables n'avaient pas été faites ou présentées, comme on devait le faire en droit ; et tout ceci se trouve plus développé
dans l'enquête et la déposition dudit maître Thomas. Dans ces enquêtes, tant par les susdits que par les autres
officiers et conseillers, rien n'a pu être découvert sur ces informations
qui auraient été faites, renouvelées, communiquées
ou montrées. Toutefois un seul homme, un certain honnête
Jean Moreau, marchand, demeurant à Rouen, originaire
de Ville en Bassigny, près de la paroisse de Jeanne, affirme
dans sa déposition qu'à l'époque du procès mené à Rouen
contre Jeanne, certain homme notable vint des régions de
Lorraine en la cité de Rouen ; il déclara au déposant qu'il
venait de Lorraine pour apporter certaines informations, à
propos desquelles il avait été commis dans l'affaire de Jeanne,
ainsi que pour enquêter sur sa réputation dans sa patrie de
Lorraine ; mais, parce que ces informations ne plurent pas au seigneur évêque de Beauvais, il fut injurié et ne put rien
recevoir pour son travail ; de tout cela il se plaignit audit
déposant, disant n'avoir rien trouvé sur cette Jeanne qu'il
n'eût voulu trouver sur sa propre soeur. Ces choses et d'autres
sont contenues dans sa déposition insérée plus bas, parmi
les enquêtes faites dans la cité de Rouen.
Tel est le soin apporté par les seigneurs délégués à propos
desdites informations, dont il est fait mention dans le procès.
Ce soin les seigneurs délégués ont voulu qu'il fût précisé ici,
ordonnant même de faire de nouvelles informations dans le
lieu de naissance de Jeanne, et aussi d'enquêter spécialement
sur les informations faites auparavant.
[Inquisitio de informationibus in primo processu memoratis.]
RECEPTIS autem in hujus processus exordio una
cum libris, registris et monumentis dicti primi processus,
sicut superius est descriptum, informationibus
prædictis, tam per reverendum dominum Cardinalem
Legatum antedictum, quam per ejus commissarios,
sub eo et ejus auctoritate, factis ; et quas informationes
prædicti domini Archiepiscopus, Episcopi et Inquisitor
delegati, ut supra, tanquam præambulas et præparatorias,
in hoc processu haberi voluerunt, et hic in
principio informationum et inquestarum, tam ex officio,
quam ad requisitionem partium, factarum, in hoc
processu describi et præmitti voluerunt : præfati domini
Delegati, cupientes ad plenum cuncta scrutari, et
veritatem omnimodam plena discussione perquirere,
tam pro justificatione processus ipsius primi, contra
dictam Johannam agitati, quam e contra, instante ad
hoc specialiter venerabili et discreto viro Simone Chapitault,
promotore ad causam constituto ; diligentiam
exactissimam fieri et adhiberi voluerunt, et tam per se
quam per commissarios suos, fecerunt ac fieri mandaverunt,
in exquirendis et recuperandis certis informationibus,
quas judices primi processus, in ejus
exordio, in loco originis Johannæ antedictæ et alibi
factas, eorum auctoritate, prætendunt, et quas, ut
dicunt, ex deliberatione consiliariorum ad processum
evocatorum, se sub certis articulis renovasse prætendunt, ac post confessionem et renovationem earum,
easdem informationes se vidisse, ac notariis processus
et consiliariis ostendisse, in eodem processu multipliciter
recitant, affirmant et asserunt.
Et interrogato, post dicti primi receptionem processus
ac ejus, in præsentia nostra et eorum de quorum
manibus dictum processum dicti domini Delegati receperant,
visitationem, venerabili viro, magistro Guillelmo
Manchon, principali ejusdem processus notario,
et qui ipsum processum in singulis foliis subscripsit,
ac pro magna parte originaliter scripsit ; interrogatisque
etiam aliis duobus ejusdem processus notariis,
ac officiariis pluribus et consiliariis qui in dicto processu
fuerant assistentes : quia nihil de dictis informationibus
præfati domini Delegati reperire potuerunt,
affirmantibus notariis et consiliariis prædictis
se nunquam aliquas informationes vidisse vel audivisse,
durante prædicti processus agitatione, licet hoc in
processu, ex ordinatione et injunctione judicum dicti primi processus, sit descriptum et expressum ; quam
descriptionem et expressionem præfati domini Delegati
plurimum adnotantes, et per ipsas informationes
in hujus agitationibus processus plurimum dirigi
confidentes ; instante ad id promotore prædicto, ut veritas
dicti processus primi appareret, et ipse convenientius
pro processu vel contra faceret ; opportunas præfati
domini Delegati plurimas commissiones dederunt, et
plurimas monitiones, in aula publica domus archiepiscopalis
Rothomagensis pro tribunali sedentes, verbo et scriptis fecerunt, ut, si qui dictas informationes
haberent vel de his aliquid scirent, infra certum
diem afferrent et notificarent ; ipsos specialiter qui
sub nomine episcopi Belvacensis ac conventualium
de ordine Fratrum Prædicatorum conventus Belvacensis,
ac inquisitoris, evocati venerant, commonendo.
Et quia, nec per interrogationes, nec per monitiones
prædictas, aliquid potuit in dicti processus principio
reperiri, prædicti domini Delegati, inquestas faciendo
super prænotatis partium articulis, testes quam plurimos,
et præsertim consiliarios, officiarios, et iterum
etiam notarios prædictos, specialiter interrogaverunt
et interrogari fecerunt super informationibus
prædictis.
Qui omnes sic examinati, dixerunt se nunquam
vidisse et audivisse informationes prædictas, nec eas
sibi vel aliis ostensas ; et præsertim dictus Manchon,
deposuit iterum eas nunquam vidisse, et quod, si vidisset
vel eas agnovisset consiliariis ostensas, in suo
registro posuisset. Similiter et venerabilis vir, magister
Thomas de Courcellis, sacræ theologiæ professor, unus
ex consiliariis quibus ostensæ dicuntur informationes
prædictæ, in dicti processus exordio nominatus, dicit
se nullo modo recordari de dictis informationibus factis
vel ostensis ; superaddens in depositione sua, sicut inferius inter inquestas Parisius factas latius continetur,
quemdam venerabilem virum, magistrum Johannem
Loyer, ad dictum processum post ejus inchoationem
evocatum, noluisse interesse, ac dixisse
processum dejure non procedere, quia informationes præambulae lactæ non fuerant vel ostensæ, sicut de
jure fuerat faciendum, sicut hæc in dictis inquestis in depositione dicti magistri Thomæ latius continentur.
In quibus etiam inquestis, tam per prædictos, quam
per alios officiarios et consiliarios, nihil potuit reperiri
de dictis informationibus confectis, renovatis,
communicatis vel ostensis. Solus duntaxat quidam vir
honestus Johannes Moreau, mercator, Rothomagi
commorans, de Villa-en-Bassigni (1), prope locum
parochiæ dictae Johannæ, affirmative deponit quod,
tempore processus contra dictam Johannam Rothomagi
agitati, quidam notabilis homo de partibus Lotharingiæ
venit ad civitatem Rothomagensem et dixit
ipsi deponenti se de Lotharingia venisse, et quasdam
informationes apportasse, ad quas fuerat commissus
in facto dictæ Johannæ, et ad inquirendum de fama
ejus in patria Lotharingiæ ; sed, quia non placuerunt
domino episcopo Belvacensi, dictæ sunt ei injuriæ,
nec potuit aliquid recipere de suo labore ; super quo
dicto deponenti conquestus est, dicens se nullum reperisse
in dicta Johanna quin vellet reperisse in propria
sorore ; sicut hæc et alia continentur in sua depositione
inferius descripta, inter inquestas factas in Rothomagensi civitate.
Hæc est diligentia per Dominos adhibita super
informationibus præfatis, de quibus fit mentio in processu.
Quam diligentiam ordinaverunt præfati domini
Delegati hic describi, ordinando etiam novas informationes
in loco originis Johannæ antedictæ fieri, et de ipsis informationibus dudum factis etiam specialiter
inquiri.
Source : Texte original latin : "Procès de Jeanne d'Arc" - T.III - Jules Quicherat, p.378 et suiv.
Traduction : Pierre Duparc, "Procès en nullité de la condamnation de Jeanne d'Arc", t.III, p. 232 et suiv.
Notes :
1 Ville-au-Bois, dans le département de la Haute-Marne.
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