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Procès
de condamnation
Etude
de l'abjuration - Introduction |
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' un des épisodes les plus importants de l'héroïque
carrière de Jeanne d'Arc a récemment donné
lieu à un intéressant travail de M. le chanoine Ulysse
Chevalier. L'auteur lui-même nous explique ainsi le motif
qui l'a conduit à l'entreprendre
"Comment, nous dit-il, ai-je été amené
à m'occuper d'une question spéciale en dehors de mes
recherches d'objet général sur le moyen âge
? Il y a plusieurs mois, la poursuite de la béatification
de Jeanne d'Arc se trouva arrêtée à Rome par
le fait de l'abjuration. Le cardinal Parocchi, protecteur de la
cause, déclara à Mgr Touchet que les consulteurs ne
semblaient pas disposés à passer outre : si la cédule
insérée dans le procès était inattaquable,
Jeanne avait manqué de l'héroïsme nécessaire.
L'évêque d'Orléans confia l'examen de cette
difficulté à un érudit français de marque.
J'ignore le contenu et la trame de sa dissertation : peut-être
se borna-t-il à plaider les circonstances atténuantes.
Aux yeux du cardinal, cette étude ne faisait pas avancer
la question d'un pas. Le prélat s'adressa alors à
M. le chanoine Dunand, théologal du chapitre de Toulouse,
qui venait de terminer une Histoire complète de Jeanne d'Arc,
en trois gros volumes. L'auteur avait consacré tout un chapitre
à l'abjuration extorquée dans le cimetière
Saint-Ouen ; il la reprit à fond et en fit l'objet d'une
Étude critique (2). Sa
brochure a fait une impression favorable auprès des avocats
et des consulteurs de la congrégation. Le 7 janvier dernier
(1902), il me fit part de son désir de voir porter la question
au tribunal du Congrès des sociétés savantes
(3). Après des hésitations
que justifiait la difficulté du sujet, je me chargeai de
lui présenter les conclusions auxquelles un examen approfondi
du travail de M. Dunand et des éléments qu'il mettait
en oeuvre pourrait m'amener.
Le scrupule qui a tenu en suspens les doctes consulteurs
de la Congrégation des rites a, pour ainsi dire, deux faces
diverses et se rapporte à deux questions distinctes. L'une
est une question de théologie morale et même de théologie
ascétique ; elle n'est pas de notre ressort. L'autre est
une question de critique historique, et, par conséquent,
elle rentre directement dans le programme de ce recueil, tel que
l'énonce son titre même. C'est elle que l'on a bien
voulu nous demander d'examiner en toute liberté, selon les
règles propres à cette critique, car chaque science
a sa méthode. Nous prendrons pour point de départ
et, au besoin, pour point de repère, le travail de M. le
chanoine Ulysse Chevalier, et aussi l'étude, non seulement
fort estimable, mais fort remarquable, de M. le chanoine Dunand.
Mais nous userons de procédés un peu différents.
La question historique dont il s'agit se subdivise, selon nous,
en deux problèmes qu'il vaut mieux ne pas confondre :
1° La cédule d'abjuration de Jeanne d'Arc, telle qu'elle
a été insérée au procès de condamnation,
est-elle authentique ou suspecte ?
2° Comment les choses se sont-elles passées dans la scène
du cimetière Saint-Ouen ?
Sources
: Etude critique de Marius Sepet sur l'abjuration (Revue des questions
historiques)
Illustration :
- Entrée du parc actuel de l'abbaye ("La grande histoire
illustrée de Jeanne d'Arc" - H.Debout - 4° éd.1922)
Notes
:
1 L'Abjuration
de Jeanne d'Arc au cimetière de Saint-Ouen et l'authenticité
de sa formule. Étude critique. Paris, Alphonse Picard
et fils, 1902, in-8 de 88 p.
A l'occasion du point spécialement examiné dans
cette étude, M. le chanoine Chevalier a brièvement
passé en revue toute la carrière de Jeanne d'Arc,
en joignant à cet exposé de nombreuses et précieuses
indications bibliographiques.
2 L'Abjuralion du cimetière Saint-Ouen d'après les
textes. Étude critique, précédée d'une
lettre à Mgr Touchet, évêque d'Orléans,
par M. l'abbé Ph.-H. Dunand. Paris, Ch. Poussielgue ; Toulouse,
Edouard Privat, 1901, in-8 de189 p.
3 N'y a-t-il pas quelque excès à présenter
le congrès annuel des sociétés savantes comme
un tribunal ? Ne suffit-il pas de le considérer comme un
auditoire d'élite ?
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