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Journal
de Clément de Fauquembergue
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Mardi
10 mai 1429 |
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ardy X° jour de may, fut rapporté et dit à Paris
publiquement que, dimenche derrain passé (1),
les gens
du Dauphin, en grant nombre, aprez pluiseurs assaulz continuelment
entretenuz par force d'armes, estoient entrez dedens la bastide
que tenoient Guillaume Glasdal (2) et
autres capitaines et gens d'armes anglois de par le Roy, avec la
tour de l'yssue du pont d'Orleans par delà Loyre, et que,
ce jour, les autres capitaines et gens d'armes tenans le siege
et les bastides par deçà Loyre, devant la ville d'Orleans,
s'estoient partiz d'icelles bastides et avoient levé leur
siege pour aler conforter ledit Glasdal et ses compaignons et pour
combatre les ennemis, qui avoient en leur compagnie une pucelle
seule ayant baniere entre lesdis ennemis, si comme on disoit. Quis
eventus futurus, novit Deus, bellorum dux et princeps potentissimus
in prelio.(3)
Vide infra in registro xxv° diei maii sequentis,
de capcione hujus puelle per gentes ducis Burgundie. (4)
Mardi Xe jour de mai, il fut rapporté et dit publiquement à Paris, que dimanche dernier passé, les gens du Dauphin en grand nombre, après plusieurs assauts continuellement entretenus par force d'armes, étaient entrés dans la bastide que tenaient de par le roi, Guillaume Glasdal et les autres capitaines et gens d'armes anglais, avec la tour de l'issue du pont d'Orléans par delà la Loire; et que ce jour les autres capitaines et gens d'armes tenant le siège et les bastides, par deçà la Loire, devant la ville d'Orléans, s'étaient partis d'icelles bastides, et avaient levé leur siège pour aller conforter ledit Glasdal et ses compagnons, et pour combattre les ennemis qui avaient en leur compagnie une Pucelle, seule ayant bannière entre les ennemis, ainsi qu'on le disait. Quis eventus fuerit, novit bellorum dux et princeps potentissimus in prælio...
Source : édition A.Tuetey - 1909
Mise en Français plus moderne : J-B-J. Ayroles (La vraie Jeanne d'Arc - T.III, p.474 et suiv.)
Notes :
1 Ce n'est pas le dimanche 8 mai, comme le dit ici Fauquembergue,
qu'eut lieu le combat qui aboutit à la prise de la bastille
des Tourelles, c'est le 7 que se passa le fait. Ce qui eut lieu
le dimanche 8, c'est la retraite des Anglais, de toutes les autres
bastilles, vers Jargeau, Meung et Beaugency. La même erreur
se retrouve dans la lettre italienne, adressée de Bruges
à Venise, et relatant ces évènements. Seulement
toute l'affaire y est indiquée comme survenue le samedi
7. Voir Chronique d'Antonio Morosini, édit. G. Lefèvre-Pontalis
et L. Dorez, t. III, p. 32-33, note 6; cf. p. 9.0; note 2.
2 William Glasdale, bailli d'Alençon pour le roi d'Angleterre,
resta capitaine des tours et de la bastille des ponts d'Orléans
après la mort du comte de Salisbury ; il se noya, avec
nombre d'Anglais, le jour de l'assaut donné à la
bastille des Tourelles. Son corps, bouilli et embaumé,
fut apporté à Paris et exposé huit jours
dans l'église Saint-Merry. Voir la Chronique de Perceval
de Cagny, édit. Moranvillé, p. 147, et le Journal
d'un bourgeois de Paris, p. 237.
3 Cet épisode de la mission de Jeanne d'Arc, narré
par Fauquembergue, est accompagné en marge d'un petit
croquis à la plume représentant une femme de profil,
tenant une épée d'une main et de l'autre une bannière
avec le monogramme de Jésus ; ce portrait de l'héroïne
est de pure fantaisie, attendu qu'elle est représentée
avec une robe et de longs cheveux ; il a été reproduit
en fac-similé avec le texte du greffier dans le Musée
des Archives nationales, n° 447. Le récit de Fauquembergue
a été maintes fois imprimé, notamment par
L'Averdy, Notices et extraits des manuscrits, t.III, p. 324, J.
Quicherat, Procès de condamnation et de réhabilitation
de Jeanne d'Arc, t. IV, p. 451.
4 ndlr : renvoi en Latin au § reportant la capture de Jeanne à Compiègne.
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