La chronique de Richemont
Guillaume Gruel - Index |
uillaume Gruel s'attacha de bonne heure à la fortune d'Arthur de
Richemont, et le suivit dans la plupart de ses expéditions.
Serviteur dévoué à son maître, il a voulu le glorifier dans la postérité, et a écrit
son histoire. Cette histoire maintes fois reproduite n'en est pas pour
cela plus véridique. C'est, dit Quicherat, une apologie plutôt qu'une
histoire. La partialité de Gruel pour son héros doit mettre en garde
contre la véracité de son témoignage. Cette réserve sera surtout de mise
en ce qui concerne les détails de la première entrevue de Richemont et de
la Pucelle. M. Achille Levasseur qui, en 1890, a donné, sous le patronage
de la Société de l'Histoire de France, une édition plus correcte de la Chronique
de Gruel ne parle pas autrement que le directeur de l'École des
chartes (1). « Le récit de Gruel, dit-il, présente plusieurs contradictions et
inexactitudes qui doivent nous mettre en garde. N'est-il pas singulier de
voir Jeanne d'Arc, qui engageait d'abord ses hommes d'armes à combattre
le Connétable, se jeter à ses pieds dès qu'ils sont en présence ? En outre,
Richemont était-il bien alors dans une situation qui lui permît de prononcer
les fières paroles que Gruel met dans sa bouche? Est-ce bien le
ton avec lequel devait parler le Connétable, formellement banni de la cour
et désireux de rentrer en grâce auprès du roi, sur lequel Jeanne exerçait
une influence qu'il pouvait utiliser à son profit? Gruel semble avoir laissé
libre carrière à son imagination pour donner quelque relief au rôle joué
par son maître dans cette entrevue. Ce n'est pas à Richemont qu'il faut
attribuer l'initiative de la marche sur les Anglais; l'honneur de la victoire
de Patay revient à Jeanne d'Arc. C'est ainsi que le racontent les autres
chroniqueurs plus désintéressés. A Montépilloy Charles VII répondit à
Bedford en lui offrant la bataille... Jeanne d'Arc devait d'ailleurs vouloir
et voulait la réconciliation de tous les Français. »
chapitre
:
...
chap. I
...
Source
: Quicherat - Tome IV p.315 à 320.
Présentation, correction, ajouts et mise en Français plus moderne : J.-B.-J. Ayroles "La vraie Jeanne d'Arc - t.III" p. 317 à 322.
Notes
:
1 Présentation de Quicherat : La famille Gruel, d'une petite noblesse de Bretagne, était au
service des seigneurs de Montauban, lorsqu'en 1420, Jean de
Montauban donna Raoul Gruel au jeune Artus de Richemont, ce
qui fit prendre pied aux Gruel dans la maison ducale de Bretagne.
Guillaume Gruel, frère de Raoul, fut écuyer du même Richemont.
Après la mort de son maître, en 1458 , il écrivit son histoire
ou plutôt son apologie. Ce livre, introduit presque en entier
dans les Cronicques des Bretons du chanoine Pierre Lebaut, fut
publié sous le nom de son auteur en 1622 seulement, par Théodore
Godefroy ; Denys Godefroy donna la seconde édition dans son
Histoire de Charles VII. Depuis il a été reproduit dans toutes les
collections de Mémoires et de Chroniques.
Guillaume Gruel se met en scène plusieurs fois dans son récit,
et notamment à l'occasion de la bataille de Formigny, où il dit
qu'il fut élu avec d'autres gentilshommes pour garder le corps du
connétable. On ne peut douter qu'il n'ait été témoin de beaucoup
des choses qu'il raconte. Lui-même le déclare ainsi : « Celui qui a « dicté ce livre , et mis en escript des faits du bon duc Artus,« la plus part en a veu, au moins despuis qu'il fut connestable de France. »
Toutefois sa partialité pour son maître doit mettre en
garde contre la véracité de son témoignage. Cette réserve sera surtout
de mise en ce qui concerne les détails de la première entrevue
de Richemont et de la Pucelle.
2 "La libératrice"
- p.255 - R.P Ayroles.
|