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Livre
IV - PARIS
III
- L'attaque de Paris p. 289 à 303 |
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e mardi 23 août, la Pucelle et le duc d'Alençon
partirent en effet de Compiègne avec une nombreuse
troupe d'hommes d'armes. Ils rallièrent en
passant une partie de ceux qui étaient demeurés
à Senlis, et le vendredi suivant, 26, ils se logeaient à Saint-Denis. Le roi, sous peine de rester presque
seul à Compiègne, était bien forcé de les suivre,
car tous les voulaient rejoindre. La trève signée,
il vint donc jusqu'à Senlis d'abord (du 28 au 30),« à grand regret, dit l'historien du duc d'Alençon ; » — et la teneur de l'acte qu'il venait de conclure
marque bien en effet que cela n'entrait pas dans
ses vues : — « et semblait qu'il fût conseillé au
contraire du vouloir de la Pucelle, du duc d'Alençon
et de ceux de leur compagnie (1). »
Au moment où le roi hésitait à se rapprocher de
Paris, Bedfort n'osait plus y rester, craignant le
soulèvement, non point tant de la ville que de la
Normandie. A Paris, les haines civiles lui donnaient
encore, dans le parti bourguignon, des auxiliaires
contre les Armagnacs. Mais la Normandie
n'était point travaillée des mêmes passions : l'empire
des Anglais y était devenu une domination étrangère, et au commencement de cette année même on avait découvert un complot qui ne tendait
pas moins qu'à leur enlever Rouen. L'exemple
de Beauvais, puis d'Aumale, montrait au régent la
défection gagnant de proche en proche ; et il savait
aux frontières de cette province le connétable, qui,
exclu du voyage de Reims, brûlait de montrer ce
qu'il pouvait à lui seul. Il laissa donc, pour garder
Paris, Louis de Luxembourg, évêque de Thérouanne,
son chancelier de France, un chevalier
anglais, nommé Radley, avec environ deux mille
Anglais, et L'Isle-Adam avec ses Bourguignons, et
il partit pour Rouen.
Les représentants de Bedfort, à Paris, ne négligèrent rien pour assurer la défense de la ville. Le
26, le jour où la Pucelle et le duc d'Alençon arrivaient à Saint-Denis, le chancelier Louis de Luxembourg
réunit en la chambre du parlement tous les
membres du corps, l'évêque et le prévôt de Paris
(Simon Morhier) les maîtres des comptes, les
prieurs des couvents, les curés des paroisses, etc...,
et il leur fit renouveler le serment de fidélité qu'ils
avaient déjà prêté en présence de Bedford, et tout
récemment encore avant son départ; puis il commit
deux magistrats pour aller dans les couvents
et les églises recevoir pareil serment des clercs,
tant réguliers que séculiers. En même temps les
vingt-quatre chefs de quartiers s'occupaient de
fortifier, chacun dans sa section, les portes de la
ville et les maisons qui étaient sur les murs. On y
mettait les canons en batterie; on y disposait des
tonnes pleines de pierres ; on réparait les fossés,
on établissait de nouvelles barrières au dedans et
au dehors. Il fallait des hommes pour donner force à ces dispositions : on excitait la multitude en faisant
appel à la haine et à la peur. On disait que le
prétendu roi avait promis d'abandonner à ses gens
Paris tout entier, hommes et femmes, grands et
petits, et que son intention était de passer la charrue
sur la ville : « ce qui n'est pas facile à croire, »
dit l'honnête greffier du parlement, auquel on doit ces détails ; mais la foule, en pareil cas, croit tout
sans raisonner (3).
Le duc d'Alençon avait commencé par inviter les échevins à recevoir le roi, et il avait fait jeter des
proclamations dans la ville pour agir sur le peuple. Mais on lui répondit comme il pouvait l'attendre
de ceux qui commandaient au nom des Anglais,
et on l'engagea à s'abstenir de pareilles
démarches. Il en vint donc aux armes, et il ne se
passait pas de jour qu'il n'y eût deux ou trois escarmouches
aux portes de Paris, sur un point ou
sur un autre, et notamment auprès d'un moulin
qui s'élevait entre la porte Saint-Denis (du temps)
et la Chapelle. La Pucelle assistait à ces escarmouches
et examinait avec grande attention la situation
de Paris, afin de voir où donner l'assaut. Mais
l'assaut ne pouvait se donner tant que le roi n'amenait
pas le reste des troupes. Les messages qu'on
lui envoyait restant sans réponse, le duc d'Alençon
vint lui-même à Senlis, le 1er, puis, sa démarche
n'ayant pas eu plus de résultat, le 5 septembre, et
cette fois il fit tant que le roi se mit en route et vint,
le mercredi 7, dîner à Saint-Denis. Son arrivée fut
saluée comme une victoire. On ne doutait plus du
succès, après avoir triomphé de cette étrange résistance;
et il n'y avait personne qui ne dît dans
l'armée : « Elle mettra le roi dedans Paris, si à lui
ne tient (4). »
Dès que le duc d'Alençon eut rapporté l'assurance
que le roi venait, la troupe, logée à Saint-Denis, alla s'établir à la Chapelle (le 6). Le jour
même de son arrivée (le 7) il y eut une plus forte
escarmouche; et les Parisiens, se figurant que dès
cette heure on voulait prendre la ville, s'applaudissaient comme d'un triomphe du résultat de la
lutte. Ils étaient fiers surtout d'avoir tenu contre« cette créature qui étoit en forme de femme avec
eux, que on nommoit la Pucelle. Que c'étoit, Dieu
le sait, » dit le Bourgeois de Paris (5). L'assaut qu'on ne songeait point à donner ce
jour-là fut tenté plus sérieusement le lendemain.
C'était encore un jour de fête (la Nativité) : mais la Pucelle ne croyait pas que ces temps fussent
moins propices à la sainte mission qu'elle avait
reçue. Et si, comme elle le dit dans son procès, les
seigneurs qui eurent la pensée d'attaquer Paris
en ce jour, ne voulaient faire encore « qu'une escarmouche
ou une vaillance d'armes, » elle avait
résolu « d'aller outre» et de les entraîner après elle
au delà des fossés. Ils partirent à huit heures de
la Chapelle, divisés en deux corps : les uns devaient attaquer, les autres demeurer en observation pour
prévenir les sorties et couvrir les assaillants. Alençon
et Clermont, chargés du second rôle, allèrent
se loger derrière une forte butte (le marché aux
Pourceaux, depuis butte des Moulins ou butte
Saint-Roch), d'où ils pouvaient surveiller la porte
Saint-Denis. Rais, Gaucourt, et la Pucelle se dirigèrent
vers la porte Saint-Honoré ; et dès l'abord ils
forcèrent la barrière et enlevèrent le boulevard
qui la protégeait. Comme la porte restait close et
que d'aucun côté on ne sortait de la ville, la Pucelle,
tenant à la main son étendard, se jeta avec
les plus hardis dans les fossés, sous le feu de la
place. Pierriers, canons, coulevrines étaient dirigés
contre les assaillants ; et un obstacle imprévu les
tenait exposés à tous les coups sans qu'ils pussent
arriver aux murailles. Ils avaient bien franchi le premier
fossé, qui était à sec, et le dos d'âne ; mais au
revers ils avaient trouvé le second fossé rempli
d'eau.
Jeanne quoique surprise ne s'en rebuta point;
et, tout en sommant la ville de se rendre, elle sondait
du bois de son étendard la profondeur de l'eau, et donnait ordre d'apporter des fagots qu'elle y faisait
jeter pour établir un passage, quand elle fut
frappée à la cuisse d'un trait d'arbalète. Il était
soir ; et cependant Jeanne, bien qu'elle fût blessée,
demeurait là ; elle continuait de faire combler le
fossé, et pressait les soldats de courir aux murs,
leur disant que la place serait prise. Et en effet,
l'émotion était grande dans le peuple. Dès le commencement de l'assaut on avait vu des gens criant par la ville que tout était perdu, que les ennemis étaient entrés dans Paris, qu'il n'y avait plus qu'à
songer chacun à soi-même; et la multitude, que
les prédicateurs haranguaient dans les églises,
s'enfuyait en désordre ; on rentrait dans les maisons,
on fermait les portes. Mais l'assaut durait
depuis midi; et les capitaines, voyant les troupes
lasses et Jeanne blessée, résolurent de le suspendre.
Vainement elle insistait, refusant de s'éloigner : ils rappelèrent les troupes. Quant à elle, il
fallut que le duc d'Alençon, Gaucourt et d'autres
vinssent la prendre de force et la missent à cheval pour la ramener à la Chapelle : et, sous le feu des
canons qui, de la porte Saint-Denis, la poursuivaient
de leurs boulets jusque par de la Saint-Lazare,
elle ne cessait de protester, affirmant que la
place eût été prise (6).
Jeanne comptait bien encore qu'elle le serait. Le
lendemain, malgré sa blessure, elle se leva de
grand matin ; et, faisant appeler le duc d'Alençon qui était toujours comme l'interprète de ses volontés
dans le commandement, elle le pria de faire
sonner les trompettes et monter à cheval pour retourner
devant Paris, promettant de n'en point
partir qu'elle n'eût la ville. Le duc d'Alençon et
plusieurs autres ne demandaient pas mieux; et
leur espoir n'était pas sans fondement. Quoique
dominée par les Anglais, cette grande cité était loin d'être unanime dans le parti bourguignon, et
l'on a vu le trouble excité la veille, moins par
l'assaut peut-être qu'à l'occasion de l'assaut. Au
milieu de ces alarmes, il n'eût pas été difficile, il était encore possible de forcer la place. Et ce n'était
pas seulement une multitude cédant à la peur:
c'étaient les plus nobles de la chevalerie, qui regardaient
la venue de la Pucelle comme un signal de
se rallier au roi. Au moment où le duc d'Alençon
donnait l'ordre de marcher sur la ville, le baron
de Montmorency et cinquante ou soixante gentilshommes
en sortaient pour se joindre à la compagnie
de la Pucelle. Mais comme tous réunis approchaient
des murailles, pleins d'ardeur, René d'Anjou et le comte de Clermont vinrent au nom
du roi inviter la Pucelle à retourner vers lui à
Saint-Denis ; ordre était donné en même temps
au duc d'Alençon et aux autres capitaines de revenir
et de la ramener (6).
Ils obéirent, la douleur dans l'âme. Mais en s'éloignant
de la place, ils ne perdaient point l'espérance
d'y retourner par un autre chemin. Le roi
avait cédé peut-être à la crainte de renouveler
contre de trop forts obstacles un assaut malheureux.
Or le duc d'Alençon avait fait jeter un pont sur la Seine à Saint-Denis. On pouvait passer la
rivière et attaquer brusquement la ville par un
côté où elle ne craignait rien. Le roi ne s'expliqua
point sur ce projet; mais dans la nuit suivante
(du vendredi au samedi), il fit détruire le pont. C'était assez déclarer qu'il ne voulait plus attaquer
Paris d'aucune manière. Il demeura quelques
jours encore à Saint-Denis. « Il s'y fit introniser,
selon l'usage, » dit Thomas Basin. Mais il semblait
qu'une fois investi de tous les symboles de la
royauté il pût sans inconvénient en abandonner
tous les gages. Il tint plusieurs conseils: il y pourvut
au gouvernement des pays récemment réunis.
Il les confia au comte de Clermont, et laissa à
Saint-Denis le comte de Vendôme et le sire de Culan,
amiral de France, avec des forces capables de
surveiller momentanément, mais non plus de menacer
Paris. Évidemment il ne s'agissait plus que
de protéger le roi dans sa retraite. Il partit le 13 (7),
adressant de ce jour même aux principales villes
une circulaire où il donnait pour motif à son départ
la trêve conclue avec le duc de Bourgogne
jusqu'à Noël, la nécessité d'alléger le pays de la
présence de troupes qu'il ne pouvait plus employer
au fait de la guerre, et le dessein d'aller outre
Seine rassembler une armée plus grande afin de
poursuivre le recouvrement du reste de sa seigneurie.
La trêve ne le gênait pas du côté des Anglais; et s'il avait eu vraiment à cœur de travailler à l'achèvement de la conquête, ce ne sont pas les
troupes qui lui faisaient défaut (8).
Quand la Pucelle vit que par aucune raison elle
ne pouvait plus le retenir, elle vint dans l'abbaye
de Saint-Denis, et déposa ses armes en offrande aux pieds de l'image de la sainte Vierge et devant
les reliques du saint patron du royaume : pieux
hommage à celui qu'on invoquait dans les batailles, « pour ce que c'est le cry de France, » dit-elle;
et en même temps protestation muette contre
une résolution qui désarmait le roi. Mais
elle-même ne le quittait point, parce que moins
que jamais elle devait croire sa mission terminée.
Elle le suivit donc, pleine de tristesse, dans un
chemin si différent de celui où elle le conduisait
naguère. Naguère on marchait en avant, et chaque
pas était marqué par un triomphe qui acheminait
vers la libération du royaume : maintenant
on se retirait de cette capitale où Jeanne avait
compté introduire son roi couronné; et la retraite
se faisait avec une telle précipitation, que parfois
elle aurait pu ressembler à une fuite. On passait non par les villes qu'il eût fallu rallier encore, mais
par celles dont la soumission promettait un plus
sûr passage : Lagny, Provins, Bray : cette fois les
Anglais n'étaient plus là pour fermer la route.
Sens refusait d'ouvrir ses portes : on passa l'Yonne à gué, près de la ville, et l'on revint enfin par
Courtenay, Château-Regnart et Montargis à Gien,
d'où l'on était parti en un bien autre appareil trois
mois auparavant (21 septembre) (9).
Quelle était la cause de ce départ précipité du
roi, et quelles raisons pouvait-on alléguer dans
ses conseils pour l'amener à cette retraite, quand celle qui avait délivré Orléans, vaincu l'Anglais et
accompli le voyage de Reims, selon qu'elle l'avait
prédit contre toute apparence, continuait de dire qu'elle mettrait le roi dans Paris ? Ce qu'on alléguait,
c'étaient les promesses du duc de Bourgogne,
promesses qu'il venait de renouveler,
dit-on, par un héraut devant Paris même et auxquelles
on affectait toujours de croire. Mais ne
valait-il pas mieux prendre Paris sans le duc que
par le duc ? Oui, sans doute, de l'aveu de tout le
monde, à l'exception toutefois de ceux qui dominaient
dans les conseils de Charles VII. Prendre
Paris sans le duc de Bourgogne, c'était le prendre
par la seule force de la Pucelle et de l'armée ; c'était faire passer aux capitaines toute l'importance
que se donnaient les favoris : car il ne suffisait
pas de le prendre, il le fallait garder. Il eût
donc fallu que le roi fût dès lors ce qu'il devint
plus tard, qu'il entrât sérieusement dans la conduite
de son gouvernement; et, pour cela, il avait
besoin d'autres hommes. Prendre Paris par le duc
de Bourgogne, c'était peut-être le lui laisser; mais
on acquérait la sécurité sans contracter l'obligation
d'agir, et le roi pouvait continuer plus à l'aise
la vie qu'il menait dans ses châteaux de la Loire.
Le choix des courtisans fut donc bien vite arrêté.
C'était à leur corps défendant, et comme sous la
contrainte de la Pucelle, qu'ils avaient laissé le roi aller de Compiègne à Senlis, et de Senlis à
Saint-Denis : l'accident qui avait fait suspendre
l'assaut avait été pour eux une trop bonne occasion d'y renoncer. On partit, sans vouloir se dire
que partir après une attaque manquée, c'était en
faire un véritable échec ; c'était exalter dans Paris
les ennemis du roi, et mettre le duc de Bourgogne,
l'eût-il voulu, dans l'impossibilité de lui donner la
ville. Et on le vit bientôt. Le duc de Bourgogne,
muni du sauf-conduit du roi, vint à Paris (30 septembre),
traversant tout le pays repris par les
Français, salué au passage par l'archevêque de
Reims, chancelier de France, et par le comte de
Clermont, commandant des troupes françaises en
ces contrées; et il répondit à ces avances en resserrant
son alliance avec Bedford. Bedford lui
donna la lieutenance du royaume et bientôt l'investiture de la Champagne, c'est-à-dire la charge
de reprendre Reims et de garder Paris, ne retenant pour lui-même, avec son titre de régent, que
le gouvernement de la Normandie ; et les Anglais,
qui avaient craint même pour cette province, se prirent de nouveau à espérer la conquête de la
France (10).
Cette retraite devait avoir une autre conséquence
fâcheuse; mais il semble qu'au gré des
courtisans ce fût encore une bonne fortune : c'était
de compromettre l'autorité de la Pucelle. Jeanne
avait dit qu'elle était envoyée pour délivrer Orléans,
faire sacrer le roi à Reims et chasser les
Anglais du royaume. On l'avait volontiers laissée
délivrer Orléans ; on l'avait suivie de mauvaise
grâce jusqu'à Reims, et par contrainte jusqu'à
Paris. Si on entrait à Paris comme à Reims, il
faudrait donc lui obéir encore quand elle voudrait ne laisser aucun repos que l'Anglais ne fût chassé
de France. Il était plus que temps de s'arrêter, si
on ne voulait être jeté dans le mouvement de cette grande guerre. L'échec de Paris mettait en doute
une parole que le peuple tenait pour prophétique,
et dispensait de lui céder à l'avenir. A voir comme les ennemis triomphent de cet échec, on peut deviner
combien les esprits dans le camp du roi pouvaient en être ébranlés. « Elle leur avoit promis, dit le faux Bourgeois, que sans nulle faute ils
gagneroient à celui assaut la ville de Paris, par
force, et qu'elle y gîroit celle nuit, et eux tous, et
qu'ils seroient tous enrichis des biens de la cité....
Mais Dieu qui mua la grande entreprise d'Holopherne
par une femme nommée Judith, ordonna
par sa pitié autrement qu'ils ne pensoient. » Est-il
besoin de répondre aux allégations du Bourgeois ?
Les paroles de Jeanne et les faits n'en sont-ils pas
une réfutation suffisante ? Jeanne disait aux siens
que la place serait prise; mais à une condition,
c'est qu'on persévérât. Pour prendre aussi une
comparaison dans la Bible, elle n'avait pas dit que
devant son étendard les murs de Paris crouleraient
comme ceux de Jéricho devant l'Arche ; mais qu'on
les assaillît, qu'on fît effort, et que Dieu aiderait.
A Orléans aussi, devant les Tourelles, les capitaines
voulaient se retirer après sa blessure : elle les
retint, et la bastille fut prise. Si à Paris on eût fait
de même, on aurait eu, tout permet de le croire,
semblable succès. L'affaire de Paris ne prouve donc rien contre la Pucelle et sa mission. Sa mission,
comme elle l'avait définie dans sa lettre à
Bedford, impliquait bien qu'elle y menât le roi.
Après Reims c'est à Paris qu'il fallait aller pour
hâter l'heure où les Anglais seraient « boutés hors
de toute France. » C'est ce qu'avait fait Jeanne.
Même après son échec, ses voix lui commandaient
(elle-même le déclare) de persévérer en demeurant à Saint-Denis ; mais elles ne lui avaient pas révélé qu'on y entrerait, quoi qu'on fit, ni que
l'assaut dût réussir ou échouer. C'est à ceux qui
l'arrêtèrent quant elle disait d'aller en avant, et le
lendemain quand elle voulait renouveler la tentative,
c'est à ceux-là de répondre de l'échec (11).
Source : Jeanne d'Arc - Henri Wallon - 5° éd. 1879
Notes :
1 C'est sans aucun fondement que P. Cochon, dans sa Chronique
normande, ch. LI, porte à trente ou quarante mille hommes les
troupes menées par le roi devant Paris. Le Bourgeois de Paris
est aussi fort suspect d'exagération quand il compte douze mille
hommes, ou plus, à l'assaut du 8, t. IV, p. 464.
2 Conjuration de Ricard Mites et de Pierre de Cauville, à
Rouen, Chéruel, Histoire de Rouen sous la domination anglaise
au XVe siècle, p. 84 et pièces justific. p. 92.
Bedford en Normandie.
Chron., ch. LXI, et t. IV; p. 25 (Cagny.); p. 47 (Berri);
p. 87 (J. Chartier); p. 197 (Journal); P. Cochon. Chron. norm.,
ch. XLIX. Plusieurs lettres ayant pour objet d'envoyer des renforts à Paris sont écrites de Vernon au nom du roi ou du régent, les 27
août et 1er septembre. Stevenson, Letters and papers of the reign
of Henry IV, t. II, p. 112-119.
Richemont en Normandie ; t. IV, p. 377 et 391 (Monstrelet, II, 63 et 70) : (Bedford) « s'en alloit en
Normandie pour combattre le connestable, lequel vers Évreux travailloit
fort le pays. » (Cf. Gruel, ap. Godefr. Vie de Charles VII
p, 756.) Voyez l'appendice n°40.
3 Préparatifs de défense à Paris, t. IV. p. 452,455-458. Clém.
de Fauquemberque, f° 17, v°); p . 463 (Bourgeois de Paris).
4 Quicherat t.IV; p. 25-29 (Cagny). — Le moulin dont il est question était, selon toute apparence, sur la hauteur où s'élève aujourd'hui l'église
de N.-D. de Bonne-Nouvelle.
5 Attaque du 7 septembre: « Ils la cuidoient prendre, mais
peu y conquestèrent, si ce ne fut douleur, honte et meschef ; car
plusieurs furent navrés (blessés) pour toute leur vie qui, par avant l'assaut, étoient tous sains : mais fol ne croit jà tant qu'il prend.
Pour eux le dis qui estoient pleins de si grand malheur et de si
malle créance. Et le dis pour une créature qui estoit en forme
de femme avec eux, que on nommoit la Pucelle. etc. » (T. IV,
p. 464.)
6 Nouveau projet d'attaque, etc. : t. IV, p. 27 (Cagny). Monstrelet
(II. 70), qui doit être moins bien informé, mentionne la soumission
du sire de Montmorency pendant le séjour du roi à Compiègne.
(Procès, t. IV. p. 391.) Par lettres du 10 septembre 1429
expédiées au nom de Henri VI, la baronie de Montmorency est déclarée
confisquée et donnée au bâtard de Saint-Pol. (Duchesne,
Hist. de la maison de Montmorency, p. 232, et Vallet de Viriville, Hist. de Charles VII, t. II, p. 119.)
7 Voy. l'appendice n°42.
8 Pont de Saint-Denis : t. IV; p. 28 (Cagny).
Intronisation à Saint-Denis : Th. Basin, Histoire de Charles VII, liv. II,
ch. XIII.
Conseils et dispositions avant le départ : t. IV, p. 88 (J. Chartier)
; p. 200 (Journal) ; Monstrelet, II, 72. Le duc de Savoie qui venait
de se porter pour médiateur entre le roi et le duc de Bourgogne, à Arras et à Compiègne, se montra vivement blessé de cette
attaque de Paris qui lui semblait aller à l'encontre des négocialions
dont il avait été chargé. (Voy. D. Plancher, t. IV; p. 133.)
On se rappelle, en effet, la clause de la trêve du 28 août, relative à Paris. — Sur la retraite de Charles VII, voy. l'appendice
n°43.
9 Le cry de France : t. I, p. 179.
Retraite du roi : t. IV,
p. 29 (Cagny) ; p. 48 ; (Berri) ; p. 89 (J. Chartier) ; p. 20 (Journal)
; Monstrelet, II, 72. Le roi laisa Ambroise de Loré dans la ville
de Lagny, qui resta un des plus fermes boulevards de sa cause aux
environs de la capitale.
10 Le duc de Bourgogne à Paris, Clém. de Fauquemberque,
Registres du Parlement, t. XV, f° 16, vo; et l'appendice n°44.
Monstrelet, I I , 7 3 ; Bourgeois de Paris, p. 398 (Édit. Buchon),
Cf. Procès, t. IV, p. 48 (Berri), et p. 201 (Journal) ; Godefroy, Vie
de Charles VII, p. 332 (Abrégé chronol., 1400-1467). P. Cochon,
Chronique normande, ch. LII.
11 Impression de l'échec de Paris : t. IV. p. 466 (Bourgeois de
Paris). Sur l'échec de Paris et la mission de Jeanne d'Arc, voy. l'appendice n°45.
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