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Introduction
La
France et l'Angleterre : Le siège d'Orléans - p. 41 à 68 |
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a
ville d'Orléans formait une sorte de carré long, comprenant
à l'Est, et pour la plus grande partie, l'ancienne ville
romaine ; à l'Ouest, l'aucien bourg d'Avignon (Avenum), joint
à la ville en 1345 par Philippe de Valois. Le plus grand
côté, au Sud, longeait la Loire sur une étendue
d'environ mille mètres ; le côté parallèle,
au Nord, ne dépassait pas une ligne que l'on pourrait tracer
de la place actuelle du Martroi aux dépendances de l'Évêché.
Les deux autres descendaient de ces points vers le fleuve, celui
de l'Est en ligne droite : c'était le côté de
l'enceinte romaine, celui de l'Ouest, par une ligne plus courbe
qui enveloppait l'église Saint-Paul : c'était le côté
du bourg d'Avignon. La ville était donc loin d'atteindre
aux limites qu'elle a aujourd'hui, mais la population s'y acheminait
déjà par des faubourgs "les plus beaux du
royaume," qui se prolongeaient à l'issue
des portes (porte de Bourgogne à l'Est ; portes Parisis et
Bannier au Nord ; porte Renart à l'Ouest). Devant la porte
du Sud, un pont de dix-neuf arches, qui s'appuyait vers le tiers
de sa longueur sur une île aujourd'hui supprimée (motte
SaintAntoine et motte des Poissonniers), menait à la rive
gauche de la Loire, où s'élevaient le grand couvent
des Augustins, et au delà, un nouveau faubourg, dit "Portereau
Saint-Marceau."
Réduit à son enceinte, Orléans
faisait encore une imposante tête de pont au passage de la
Loire. Ses murs, qui, pour les trois quarts de leur étendue,
reposaient sur les fondements romains, épais de deux mètres,
hauts de six et même de dix au-dessus du niveau de la plaine,
étaient bordés d'un fossé large de treize mètres,
profond de six, et flanqués de tours à trois étages,
qui dominaient la muraille et faisaient une saillie de dix mètres
au moins dans les fossés de la place. Les portes, resserrées
chacune entre deux de ces tours, étaient en outre défendues
par des boulevards, ouvrages en terre, de forme carrée, entourés
d'un fossé et d'une forte palissade. Le pont, sur la rive
gauche, avait une défense de même sorte : c'était
d'abord un pavillon élevé sur la culée même
du pont, et séparé de la rive par un fossé
où coulaient les eaux de la Loire (on le nommait, des deux
tours dont il était flanqué, les Tourelles ou Tournelles)
; et au delà du fossé, un vaste boulevard qui en couvrait
les approches, et qu'on appelait le boulevard des Tourelles. Cette
forteresse, jointe à la ville, mais séparée
d'elle par un pont d'une telle longueur, était bien aventurée.
Pour y suppléer, au besoin, on avait élevé
un autre bastion à l'endroit où le pont s'appuyait
sur l'île de la Loire : la bastille Saint-Antoine. Elle datait,
comme les boulevards, de l'an 1417, c'est-à-dire du moment
où le vainqueur d'Azincourt, revenu à la conquête
de la Normandie, menaçait toute la France. Dès ce
jour, les habitants d'Orléans avaient agi comme s'ils étaient
les premiers en péril. Au quinzième siècle
(de 1400 à 1490), des revenus de la ville, un quart était
consacré aux dépenses communes, et les trois autres
quarts aux fortifications. Ils en usèrent largement pour
mettre leurs murs en bon état, remplir leur arsenal, raffermir
leur organisation militaire, et pas une année ne s'était
passée sans qu'on ajoutât, par des achats ou des travaux,
aux moyens de défense et d'attaque. En 1421, ils avaient
pu braver Henri V lui-même, quand il s'avança jusque
sous leurs remparts. Ils étaient prêts à soutenir
cette autre attaque où se concentrait, cette fois, tout l'effort
des Anglais.
Tout, en effet, dans la marche des Anglais prouvait
que c'était là leur fin suprême.
Salisbury, avant d'approcher de la place, avait voulu
s'en assurer la route et les abords. Il avait pris sur la route,
par capitulation ou par force, Rambouillet, Rochefort, le Puiset,
Thoury, Janville ; et il réduisit de la même sorte
les alentours d'Orléans sur la basse Loire, Meun et Beaugency
; sur la Haute Loire, Jargeau et Châteauneuf. C'est alors
que, maître du fleuve au-dessus et au-dessous d'Orléans,
il fit une première démonstration contre la ville.
Il passa la rivière, prit Olivet à une lieue d'Orléans,
et envoya quelques coureurs jusqu'aux premières barrières
de la place (1).
Les Orléanais tinrent compte de l'avertissement.
Ils avaient, par des contributions volontaires, ajouté encore
à leurs approvisionnements d'armes et de vivres. Ils tirèrent
de leur magasins toutes les machines qui se plaçaient aux
murailles en cas de siège, pour en protéger les défenseurs
ou repousser les assaillants : mantelets fixes ou mantelets mobiles,
percés de meurtrières et faisant parapets ; et les
engins tant de l'ancienne que de la nouvelle artillerie : catapultes
et ribaudequins (longues arbalètes à lancer des piques)
; bombardes et canons (on en comptait soixante-quinze avant le siège).
Ils travaillèrent avec une nouvelle ardeur à leurs
tours, à leurs boulevards, à leurs barrières,
à leurs fossés, sans que personne fût dispensé
de mettre la main à la pioche ou à la brouette. Bourgeois, artisans, religieux, étudiants
(il y en avait beaucoup dans la ville à cause de l'Université),
rivalisaient de zèle dans les travaux de la défense.
Un privilège (c'en était un dans ces temps de désordre)
confiait exclusivement aux habitants la garde de leur ville ; mais
c'était le royaume tout entier qu'il y fallait défendre.
En ces conjonctures ils n'hésitent point à s'adjoindre
tous ceux qui les y pouvaient aider ; et en même temps que
plusieurs villes (Bourges, Poitiers, La Rochelle, Montpellier) leur
envoyaient des secours en vivres et en munitions, ils ouvraient
leurs portes à quiconque voulut bien partager leur fortune.
Ils avaient à leur fête, comme lieutenant de leur duc
prisonnier, le jeune bâtard d'Orléans (Dunois) (2),
celui dont Valentine de Milan, voyant en lui le digne héritier
et le vengeur de son mari, disait : "On me l'a volé"
et comme bailli du même prince et gouverneur de la ville,
un brave chevalier, Raoul de Gaucourt, qui avait combattu à
Nicopolis en 1396, et vaillamment défendu Harfleur contre
les Anglais en 1415 (3). Si le Orléanais
étaient résolus à se défendre, le bâtard
d'Orléans ne l'était pas moins à garder dans
leur ville l'apanage de son frère ; et Raoul de Gaucourt,
retenu depuis la prise d'Harfleur dans les prisons des Anglais,
venait d'en sortir après onze ou douze ans avec le désir
de prendre sur eux une éclatante revanche.
La prise d'Olivet, la reconnaissance poussée
jusqu'aux Tourelles, avaient démasqué les vues de
l'ennemi. Il voulait prendre le pont d'Orléans, non pour
passer la Loire, mais pour bloquer la ville. C'est au delà
de la Loire qu'il voulait s'établir pour la tenir en échec
: tentative téméraire si Charles VII avait eu une
armée capable de le combattre ; mais rien ne semblait à
redouter du roi. Le 12 octobre 1428, Salisbury ayant passé
la Loire vint donc se loger au Portereau, devant le pont. A son
approche, les Orléanais en avaient détruit les maisons
; ils avaient en même temps mis le feu au couvent des Augustins,
ne pouvant l'occuper et ne voulant pas laisser à l'ennemi
une position si forte en face des Tourelles (4).
Mais ils ne purent tellement le détruire, que l'ennemi ne
trouvât moyen d'en relever les ruines; et en même temps
que ses batteries, établies derrière la jetée
de la Loire, lançaient des pierres de plus de cent livres
sur la ville et détruisaient douze moulins qu'elle avait
sur le fleuve, Salisbury, de cette bastille improvisée, attaquait
le boulevard des Tourelles par la mine comme par le canon (5).
Le 21 octobre il lui donna l'assaut ; mais tout Orléans
s'était disputé l'honneur de le défendre. Les
femmes mêmes y étaient accourues. Elles étaient
là, versant du rempart sur les assaillants des cendres brûlantes,
de la chaux vive, de l'eau bouillante et de la graisse fondue ;
et plusieurs s'armaient de lances pour les rejeter dans le fossé.
Après un combat de quatre heures, les Anglais se retirèrent
pour recommencer leur travail de mine. Ils le poussèrent
rapidement, malgré les contremines : et déjà
le boulevard ne reposait plus que sur les étais des mineurs
; pour le faire crouler, il ne s'agissait que d'y mettre le feu
(c'était encore, malgré l'usage de la poudre, le moyen
ordinaire de faire jouer la mine), quand les Orléanais prirent
le parti de l'abandonner, ils avaient, on l'a vu, en-deçà
des Tourelles, une bastille qui fermait le pont vers la sixième
arche à partir de la rive droite : la bastille Saint-Antoine.
Dès la veille, prévoyant la nécessité
de la retraite, ils avaient construit vers la onzième arche,
près de l'endroit où s'élevait une croix, un
boulevard en charpente, qui leur servît d'avant-poste, le
boulevard de la Belle-Croix : ils rompirent une arche entre le boulevard
et la bastille, ne les rejoignant que par un pont volant, afin que
les communications de l'un à l'autre pussent être maintenues
ou supprimées selon les besoins de la défense. Alors,
mettant le feu aux palissades du premier boulevard menacé,
ils se retirèrent dans les Tourelles, dont ils levèrent
le pont ; et des Tourelles, trop ébranlées elles-mêmes
par le canon, et trop découvertes après la perte de
leur boulevard pour qu'on y pût tenir encore, dans le boulevard
nouveau et dans la Bastille destinés à y suppléer
(samedi 23 octobre). (6)
Salisbury prit les Tourelles (24 octobre) et n'alla
point au delà : car ce n'était point par ce chemin
qu'il comptait entrer dans Orléans. Comment supposer en effet
que les Anglais, maîtres du nord de la Loire, fussent allés,
pour prendre la ville, s'établir au sud, ayant à dos
toutes les forces des Français ? Comment admettre qu'ayant
par le nord toute liberté d'en attaquer directement les murailles,
ils eussent entrepris d'ouvrir la brèche par-dessus la rivière,
sans autre moyen d'y arriver qu'en forçant un pont parfaitement
défendu ? Ce que voulait Salisbury, c'était d'occuper
la tête du pont, pour ôter aux Orléanais toute
communication avec ces provinces du Midi où était
leur espérance. Aussi, pour s'y mieux garder, fit-il rompre
les deux premières arches attenantes aux Tourelles : le midi
ainsi fermé, il semblait difficile que la ville pût
résister longtemps quand on viendrait en force l'attaquer
par le nord. Avant de s'éloigner, le soir même de la
prise des Tourelles, Salisbury monta au deuxième étage
de la forteresse, et il examinait l'enceinte de de la place, quand
un éclat de boulet le frappa au visage, et le renversa blessé
à mort auprès d'un chevalier tué du même
coup. Les Anglais l'emportèrent à Meung en secret,
mais non pas de telle sorte que la nouvelle n'en vint à Orléans.
Elle s'y répandit avec des circonstances merveilleuses. On
racontait que William Glasdale, nommé par Salisbury capitaine
des Tourelles, lui en faisait les honneurs et lui montrait Orléans
de la fenêtre, disant : "Monseigneur, regardez ici
votre ville ; vous la voyez d'ici bien à plein."
Salisbury regarda et reçut le coup dans l'oeil. L'attaque
était suspendue après la rude affaire de cette journée
; les canonniers étaient allés diner : c'était
un enfant qui, rôdant sur les remparts et voyant une pièce
abandonnée, avait eu l'idée d'y mettre le feu. Jamais
coup visé n'atteignit mieux le but.
Salisbury mourut au bout de trois jours, recommandant
à ses capitaines de ne point abandonner l'entreprise. Mais
les Orléanais venaient de recevoir des renforts. Le lendemain
de la perte des Tourelles, le bâtard d'Orléans (Dunois)
rentrait dans la ville avec le maréchal de Boussac ou Sainte-Sévère (8), le Lombard Théode de Valpergue,
depuis bailli de Lyon, Jacques de Chabannes (9),
sénéchal du Bourbonnais, les seigneurs de Beuil et
de Chaumont-sur-Loire, des plus nobles de la Touraine, La Hire et
huit cents hommes environ qui venaient s'associer aux périls
de la place (lundi 25 octobre). Les Anglais, sans renoncer à
l'attaque, jugèrent prudent de la suspendre. Ils achevèrent
de mettre en bon état les Tourelles et leur boulevard, et
la nouvelle bastille des Augustins. Ils y laissèrent cinq
cents hommes sous la conduite de William Glasdale, offïcier
de second ordre, à ne voir que l'origine, mais qui ne le
cédait à personne en habileté, en courage et
en haine des Français ; il jurait, dit-on, qu'à son
entrée dans Orléans, il y tuerait tout, hommes et
femmes. Les autres se retirèrent dans leurs cantonnements,
sur la haute et sur la basse Loire, à Meung et à Jargeau,
attendant, pour reprendre le siége dans sa vraie direction,
un nouveau chef et des renforts de Paris (8 novembre). (10)
Les Orléanais, ne se faisant pas illusion sur
leur retraite, s'apprêtèrent à les recevoir
par où ils devaient venir ; et ils sacrifièrent leurs
beaux faubourgs de la rive droite
comme ils avaient fait les maisons du Portereau : couvents, églises,
tout fut détruit comme autant de places d'armes où
l'ennemi n'eût pas manqué de s'établir. En attendant,
des deux côtés de la rivière on échangeait
des coups de canon. Les Anglais des Tourelles, ravitaillés
le ler décembre par Talbot et Scales (11),
rouvrirent le feu avec plus de vigueur : munis de pièces
de fort calibre, ils lançaient des boulets de pierre de 164
livres jusqu'au cœur de la ville. Les Orléanais firent
si bien, qu'ils purent, même à cet égard, leur
tenir tête : ils fondirent une bombarde dont les boulets pesaient
120 livres, et qui, avec deux autres canons de grosseur inusitée,
appelés, l'un, Montargis, à cause de son origine,
l'autre, Rifflard, à cause de ses prouesses, répondaient
avantageusement, du pied des murailles, au feu des Anglais. D'autres
pièces, beaucoup moindres d'ailleurs, n'en faisaient pas
moins bien leur office : un coup, tiré du boulevard de la
Belle-Croix contre les Tourelles, en abattit le toit, qui écrasa
six hommes dans sa chute. (12)
Ce boulevard de la Belle-Croix, par sa position comme
par l'audace de ses défenseurs, incommodait tout particulièrement
les Anglais. Un jour ils tentèrent de le surprendre ; mais
on y faisait trop bonne garde. Là s'était établi
de préférence un Lorrain, Jean de Montesclère,
vulgairement nommé maître Jean, qui manœuvrait
un de ces canons longs et légers appelés couleuvrines
; et nul, lui présent, ne se montrait impunément à
découvert aux meurtrières des Tourelles. Les Anglais
le connaissaient bien ; ils auraient donné beaucoup pour
être débarrassés de sa personne, et parfois
maitre Jean leur procurait le plaisir de croire que leurs vœux
étaient exaucés : il se laissait choir comme s'il
eût été frappé lui-même, et on
l'emportait dans la ville ; mais il revenait bientôt à
l'embuscade, et de nouveaux coups prouvaient aux Anglais que maître
Jean n'était pas mort (13).
Tout cela n'était qu'un prélude.
L'avant-dernier jour de l'année les Anglais se
montrèrent enfin sur la rive droite, pour commencer le vrai
siège d'Orléans. Suffolk (14),
donné pour successeur à Salisbury, ayant avec lui
Talbot, John Pole, son propre frère, Scales, Lancelot
de Lisle et les plus braves chevaliers d'Angleterre, vint à
la tête de deux mille cinq cents hommes, et s'établit,
non sans une vive résistance, sur les ruines de l'église
Saint-Laurent, à l'ouest d'Orléans, près des
bords de la Loire, où il se fortifia. Pour se relier au corps
qui occupait, sur la rive opposée, les Tourelles et la bastille
des Augustins, il fit construire, dans une île de la Loire
et de l'autre côté du fleuve, deux boulevards formés
de fascines et de terre : le boulevard Charlemagne, ainsi appelé
de l'île, aujourd'hui supprimée, où il était
bâti, un peu au-dessous d'Orléans, et le boulevard
du champ Saint-Privé, non loin de l'église de ce nom,
mais plus près de la Loire ; et d'autre part, il prolongeait
son front d'attaque vers le nord, en élevant le boulevard
de la Croix-Boissée, en face de la porte Renart (à
l'ouest). Douze cents hommes, amenés le 16 janvier par Falstoff,
lui permettaient, de mieux garnir cette ligne d'attaque et de défense.
En somme, la position des Anglais était loin
d'être dominante. Huit cents hommes, qui ne pouvaient que
garder les Tourelles ou faire la patrouille sur les bords de la
Loire, et trois mille sept cents hommes en bataille, ce n'était
pas assez pour forcer une ville comme Orléans ; et on ne
s'expliquerait pas cette disproportion entre les moyens et le but,
si on ne tenait compte de la nécessité où les
Anglais se voyaient d'éparpiller leurs forces, à mesure
qu'ils étendaient leurs conquêtes car rien n'était
à eux que ce qu'ils occupaient en effet. La ville, de son
côté, n'avait point reçu du dehors les renforts
que réclamait son importance. On ne méconnaissait
point le péril sans doute à la cour de Charles VII.
Les états du royaume réunis à Chinon (octobre
et novembre 1428) avaient accordé au roi une aide de quatre
cent mille francs, spécialement "pour résister
aux Anglais, qui étaient à présent à
puissance sur la rivière de Loire, pour le service de la
ville d'Orléans et autres affaires d'État."
Ils le pressaient en même temps d'appeler à lui avec
toutes leurs forces les principaux seigneurs du royaume, notamment
les comtes de la Marche, de Clermont, de Foix, d'Armagnac ; et le
prince lui-même avait fait un traité avec le roi d'Écosse
pour en obtenir plus de secours : mais ni l'argent ni les hommes
n'arrivaient encore. La ville d'Orléans avait six à
sept cents hommes de garnison avant les premières attaques
des Anglais ; elle en avait reçu un millier depuis, de telle
sorte que sa principale force était toujours dans la bourgeoisie.
Selon le recensemeut fait par Gaucourt en septembre 1428, elle comptait
trente mille habitants, ce qui suppose cinq mille hommes capables
de porter les armes; cinq mille hommes dont trois mille seulement,
peut-être, étaient armés : mais c'étaient
trois mille hommes aguerris, distribués par corps de métier,
et se partageant la défense des portes et des tours ; et
les deux mille autres, dans une ville aussi résolue à
se défendre, formaient évidemment une réserve
prête à remplir les vides qui viendraient à
se produire et à répondre à tous les
besoins (16).
C'est avec ces combattants, et ce fut principalement
entre les bastilles de la rive droite et la partie correspondante
des murailles, que s'établit la lutte. Chaque jour il y avait
quelque alerte, soit que les Anglais assaillissent la ville, soit
que les défenseurs d'Orléans se portassent aux boulevards
ennemis ; car les Orléanais, assiégés chez
eux, étaient assiégeants à l'égard des
bastilles anglaises, et ils prenaient même l'offensive plus
souvent que les autres. Il semblait que les Anglais, trop peu nombreux
encore pour tenter de pénétrer dans la ville, voulussent
en lasser les habitants avant de l'envahir ; et leurs canons servaient
moins à faire brèche aux murailles qu'à lancer
à toute volée leurs boulets sur les maisons des bourgeois.
Mais les Orléanais ne s'en émouvaient guère,
et le Journal du siège, fidèle écho
de la voix publique, s'amuse à raconter les bizarreries du
canon. Quelquefois la lutte générale faisait place
à des combats singuliers : deux contre deux, six contre six,
ou bien à des combats de pages. D'autres fois aussi, il y
avait des trèves, mais elles étaient courtes, et il
ne fallait pas s'attarder : Lancelot de Lisle, un des principaux
chefs anglais, s'en revenant, l'heure passée, d'une conférence
avec La Hire, eut la tête emportée d'un boulet (17).
Ni la défense ni l'attaque n'en pouvaient rester
là, et de temps en temps, les secours envoyés à
l'un ou à l'autre parti les remettaient aux prises. La ville,
n'étant bloquée au nord que sur une moitié
à peine de son enceinte, pouvait, comme les bastilles anglaises,
recevoir des vivres et des renforts. Les Anglais épiaient
ces convois, et les Orléanais ne réussirent pas toujours
à les soustraire à leurs attaques : un jour la couleuvrine
de maître Jean resta entre leurs mains, et peu s'en fallut
qu'il n'y restât lui-même. D'autres fois, c'est aux
Anglais que les secours étaient envoyés, et les Orléanais
à leur tour, par d'audacieuses sorties, enlevaient et faisaient
entrer dans la ville les provisions qui n'y étaient pas destinées (18) ;
Un incident de cette sorte amena entre les deux partis
une rencontre qui eut l'importance d'une véritable bataille.
Vers le commencement de février 1429, Falstoff
était revenu à Paris pour en ramener de nouveaux renforts,
et, sous leur garde, tout un convoi de munitions et de vivres. Ce
n'était pas moins de trois cents chariots avec un millier
de gens du commun, marchands et autres, le prévôt de
Paris, Simon Morhier, et quinze cents combattants anglais, normands
ou picards. On entrait en carême : le convoi se composait
surtout de barriques de harengs. L'occasion était excellente
pour surprendre les Anglais dans l'embarras de ces voitures, et
leur enlever leurs approvisionnements pour prix de la victoire ;
mais les défenseurs d'Orléans n'eussent pas suffi
à cette entreprise : la cour, à laquelle ils s'étaient
adressés plusieurs fois, parut enfin consentir à tenter
un effort. Le comte de Clermont, fils aîné du duc de
Bourbon, amenait au secours du roi des hommes du Bourbonnais et
de l'Auvergne. Avec lui se trouvait à Blois Jean Stuart,
connétable d'Écosse, récemment revenu de Terre
Sainte, et impatient de se retrouver en présence des Anglais.
Ils se concertèrent avec plusieurs autres capitaines, et
tandis que ceux-ci, passant par Orléans, allaient marcher
au-devant du convoi pour lui barrer le chemin, eux, partant de Blois
au nombre de trois ou quatre mille, se devaient rendre au point
de la route, où l'on comptait bien le rejoindre : vainqueurs,
ils se rabattaient sur la ville assiégée ; et, les
habitants se joignant à eux, tout faisait croire que les
bastilles anglaises, privées de leurs renforts et attaquées
de deux côtés à la fois, n'auraient pas résisté
(19)
Les choses se passèrent d'abord comme on l'avait
résolu. Le 8 février, arrive à Orléans
William Stuart, frère du connétable d'Écosse,
avec mille combattants, dont la belle tenue fit l'admiration de
la ville. La nuit suivante, trois cent vingt autres, soit au sire
d'Albret, soit à La Hire ; le lendemain, trois cents autres
encore, avec le maréchal Gilbert de La Fayette. Tous venaient
pour le coup projeté : on les retrouvera dans la bataille.
Il importait que le comte de Clermont n'y fût pas moins exact
: pour en être plus sûr, le bâtard d'Orléans,
avec deux cents hommes, traversa les lignes anglaises et le vint
prendre à Blois (10 février). Le 11, ceux d'Orléans
se mettent en route ; c'était un corps de quinze cents hommes,
à la tête desquels on comptait Guillaume d'Albret,
William Stuart, Boussac, les deux Xaintrailles, Verduzan,
La Hire. Ils venaient de passer Rouvray-Saint-Denis, quand le convoi
des Anglais débouchait d'Angerville. Rien n'était
plus facile que de l'attaquer pendant qu'il s'avançait en
longue file par la route, de le rompre et de le détruire
ou de le prendre; c'était l'avis de La Hire, de Poton de
Xaintrailles, et de tous ceux qui venaient avec lui d'Orléans.
Mais le comte de Clermont n'était pas encore là :
il arrivait (il était à Rouvray depuis la veille !),
il ordonnait de l'attendre, disant qu'il amenait trois à
quatre mille hommes, avec lesquels on était sûr d'accabler
les Anglais. Ils attendirent donc, et laissèrent à
Falstolf le temps d'aviser à la situation. L'habile général,
se faisant une barrière de ce qui naguère était
pour lui un embarras, disposa ses chariots en la forme d'un parc,
large par derrière, et n'offrant qu'une longue et étroite
issue par devant à qui voudrait l'y forcer. Derrière
ses chariots, il se fit un autre retranchement de ces pieux aiguisés
dont les Anglais étaient toujours pourvus en marche, et il
s'y renferma avec ses hommes d'armes, résolu de vaincre ou
de mourir ; car, d'échapper par la fuite, il n'en avait ni
l'espoir ni la pensée (1).
Le retard avait tout compromis ; la précipitation
fit tout perdre. Le comte de Clermont approchait ; déjà
le bâtard d'Orléans et le connétable d'Écosse,
le laissant à Rouvray, avaient rejoint la troupe établie
en face des Anglais dans la plaine. Il avait été convenu
qu'on resterait à cheval, et qu'on laisserait les gens de
trait engager l'attaque des retranchements. Ces derniers s'en acquittèrent
fort bien. Ils n'avaient pas seulement l'arc et l'arbalèle
; ils avaient apporté d'Orléans force couleuvrines
dont les coups mettaient en pièces les chariots laissés
à la garde des archers anglais et des marchands. Comme les
archers anglais, au lieu d'être soutenus, étaient reçus
derrière les palissades, et qu'il n'en sortait plus que des
flèches fort incommodes pour l'assaillant, l'Écossais
n'y tint pas : il mit pied à terre ; son frère William
Stuart et les chevaliers français, non moins impatients de
combattre, firent de même, et ils se portèrent assez
confusément vers les barricades anglaises, afin de les forcer.
Mais les Anglais, voyant que le principal corps de bataille ne se
mettait point en devoir de les soutenir, sortirent en bon ordre,
et, tombant brusquement sur eux, les accablèrent, les mirent
en déroute. lls allèrent même jusqu'à
s'aventurer à les poursuivre dans la plaine, et ils le firent
impunément. Vainement La Hire, Poton de Xaintrailles et plusieurs
autres, rassemblant soixante à quatre-vingis compagnons autour
d'eux, tombèrent-ils sur les vainqueurs dispersés,
dont ils tuèrent plusieurs : ils ne furent ni imités
ni soutenus. Le comte de Clermont, qui s'était fait armer
chevalier ce jour-là, demeura spectateur de la lutte, comme
si les Anglais agissaient pour lui, en châtiant ceux qui avaient
combattu contre son ordre. Il prit la route d'Orléans, laissant
à l'ennemi le champ de bataille, et, dans cette plaine, les
corps de trois à quatre cents soldats et des chevaliers les
plus braves : Guillaume d'Albret, les deux Stuart, Verduzan, Châteaubrun,
Rocbechouart, Chabot (12 février 1429). (21)
Cette troupe qui devait chasser les Anglais de devant
Orléans, dut se garder de leurs bastilles, pour y entrer sans un nouvel échec. Elle n'y vint que pour
assister du haut des murailles à l'arrivée toute différente
de Falstolf (le 17), ramenant son convoi intact, moins les barriques
défoncées sur le champ de bataille, et qui, le jonchant
de leurs débris, firent nommer cette journée la bataille
des harengs. Le comte de Clermont se trouvait mal à l'aise
dans cette ville qu'il avait compromise au lieu de la délivrer.
Il partit le lendemain de l'arrivée de Falstolf (18 février)
avec Regnault de Chartres, archevêque de Reims, chancelier
de France (22) et l'évêque
d'Orléans même, disant qu'il allait trouver le roi
à Chinon, et requérir de nouveaux secours ; il commençait
par emmener de la ville l'amiral Louis de Culan (23),
La Hire et plus de deux mille combattants (24).
Les Orléanais, comptant peu sur le secours du
roi, se tournèrent vers le duc de Bourgogne, et lui firent
demander, au nom du sang de France, de prendre en garde l'héritage
de son cousin le duc d'Orléans. Le conseil d'Angleterre avait
promis au duc prisonnier d'épargner son apanage ; les Orléanais
réclamaient contre Bedford le bénéfice de cette
promesse : menacés de devenir Anglais, ils cherchaient sous
le patronage du duc de Bourgogne un refuge dans une neutralité
qui était si peu selon leur cœur. Leur situation, en
effet, allait empirant. Un instant ils avaient cru trouver contre
l'ennemi un auxiliaire dans le fleuve : la Loire grossissant tout
à coup avait monté jusqu'aux parapets des boulevards
que les Anglais avaient construits dans la rivière ou sur
ses bords (boulevards de l'île Charlemagne, du champ Saint-Privé,
des Tourelles). Les Orléanais espérèrent qu'ils
avaient été minés par les eaux et ne pourraient
tenir ; mais les Anglais, à force de travail, avaient conjuré
le péril (25).
Les Anglais gardaient donc la basse Loire ; ils entreprirent
de tenir aussi la haute. Ayant rappelé à eux une partie
de leurs garnisons de Jargeau et des villes de la Beauce (8 mars),
ils commencèrent dès le surlendemain (le 10) une bastille
de Saint-Loup, à l'est d'Orléans ; et, tout en prenant
position de ce côté jusqu'alors demeuré libre,
ils travaillaient à se fortifier sur leur principal front d'attaque.
Ils avaient commencé une tranchée, qui, menée
de leur boulevard de la Croix-Boissée vers Saint-Ladre d'Orléans, leur devait permettre d'aller à couvert
jusque sous les murs de la ville. Les assiégés interrompirent
leur travail par une sortie vigoureuse où maître Jean
prouva aux Anglais qu'ils n'avaient pas tout pour avoir pris sa
couleuvrine : armé d'un autre instrument de même sorte,
il leur tua cinq hommes en deux coups, et parmi les cinq, lord Gray.
Mais les assiégeants se remirent à l'œuvre, et
bientôt ajoutèrent sur ce front deux nouveaux boulevards
à leurs défenses : le boulevard des Douze-Pierres
ou des Douze-Pairs (vers le 20 mars), et le boulevard du
Pressoir-Ars (vers le 9 avril) ; ils nommèrent le
premier, Londres, le second, Rouen. Un peu après (15 avril)
ils achevèrent une grande bastille au nord entre Saint-Pouair
et Saint-Ladre, et la nommèrent Paris (26).
Ainsi le blocus allait se resserrant, et le moment semblait
proche où l'ennemi, maître des principales routes,
pourrait, en interceptant les arrivages de vivres, tourner contre
la ville le nombre même de ses habitants. Leur résolution
tiendrait-elle devant cette épreuve ? Le doute au moins gagnait
les esprits dans la foule : on commençait à craindre
les trahisons. Un jour, on découvrit dans le mur de l'Aumône
d'Orléans, près la porte Parisis, un trou assez large
pour donner passage à un homme. Le peuple s'ameuta : coupable
ou non, le directeur de la maison dut chercher son salut dans la
fuite. Un autre jour, le jeudi saint, sans nul autre indice, le
bruit courut qu'on était trahi : chacun se tint sous les
armes (27). Ces rumeurs, par les effets
qu'elles produisaient, montraient au moins que le peuple n'était
pas disposé à se rendre ; et il ne cessait de le prouver
par sa vigueur. Les chefs pouvaient bien encore faire entre eux
échange de politesses, s'envoyant et recevant tour à
tour ce qui leur rendait la vie plus supportable quant aux hommes
d'armes, ils n'échangeaient guère que des coups. De
moins en moins attaqués dans leurs murailles, ils prenaient
plus souvent l'offensive. Ils allaient chercher l'assiégeant
dans ses lignes ; et plusieurs fois de hardis coureurs tombèrent
à l'improviste sur l'ennemi dans la campagne, et purent même
ramener leurs prisonniers dans Orléans (28).
C'est au milieu de ces incidents divers que l'on vit
revenir les députés envoyés au duc de Bourgogne.
Le duc avait accueilli volontiers le message, et, sans
se presser d'ailleurs beaucoup d'y
donner suite, il avait emmené les envoyés à
Paris, où il voulait en parler lui-même à Bedford.
Recevoir sous sa garde la ville d'Orléans, c'était
établir son influence au centre de la France, enlever aux
Armagnacs la tête de leur parti : mais c'était par
le même coup se rendre plus fort vis-à-vis des Anglais,
et c'est ce que les Anglais ne voulaient pas. Aussi Bedford n'usa-t-il
guère de ménagement pour éconduire son beau-frère.
Il déclara qu'il comptait bien avoir la ville à sa
volonté, et que les Orléanais lui payeraient ce que
lui avait coûté ce siège : ajoutant, sans plus
d'égard pour le solliciteur intéressé, "qu'il
seroit bien marry d'avoir battu les buissons et que d'autres eussent
les oisillons." Le duc de Bourgogne se retira blessé.
Il dut renvoyer les députés d'Orléans sans
autre réponse ; mais il envoyait avec eux un trompette chargé
de rappeler du siège tous ceux de son obéissance (29).
Les Anglais s'émurent peu de ce rappel, qui pourtant
leur enlevait des auxiliaires (mille à quinze cents hommes
peut-être) dans un moment où ils n'en pouvaient trop
avoir pour compléter leur ligne de blocus. Ils s'en consolaient
en pensant qu'ils seraient seuls à garder la conquête
: le duc de Bourgogne se retirait à point pour perdre le
fruit qu'il aurait pu attendre de son concours ; et, malgré
le départ très précipité des Bourguignons,
ils se firent de Saint-Jean le Blanc, sur la rive droite, une nouvelle
bastille qui devait concourir avec celle de Saint-Loup à
la garde de la haute Loire (vers le 2o avril). Quant aux Orléanais, ils se consolèrent aussi en voyant qu'ils restaient à
eux-mêmes ; car déjà avait paru celle qui se
disait envoyée de Dieu pour les délivrer, celle qui
devait associer leur nom au plus beau nom de l'histoire : Jeanne
d'Arc, la Pucelle d'Orléans.
Source : Jeanne d'Arc - Henri Wallon - 5° éd. 1879
Ilustrations :
- Vue d'Orléans pendant le siège (reconstitution
de M.Lisch)
- Artillerie d'époque (musée des Invalides)
- Vue générale d'Orléans (musée
d'Orléans)
- Les Tourelles (dessin de M. Vergnaud-Romagnési)
- Portait de John Talbot
- "La bataille des harengs" - miniature du XV° siècle
- sceaux divers (bibliothèque nationale)
- Portrait de Philippe Le Bon.
Notes :
1 Progrès
de Salisbury : Chronique de la Pucelle, ch.30
et 34...Les nobles et tenants-fiefs
étaient en même temps convoqués à Chartres,
pour observer Ies troupes qui, de Blois, pouvaient inquiéter
les opérations de Salisbury. (Ordre du bailli de Rouen
6 novembre 1428, pour le paiement des frais du messager envoyé
à cette fin - Archives de France p.153 P.Teulot)
2 Jean, bâtard d'Orléans, était né
en 1403, et ainsi n'avait que dix-neuf ans à l'avènement
de Charles VII. Attaché de bonne heure à la personne
du prince, il fut un des otages que Richemont réclama en
garantie des offres qu'on lui faisait pour le ramener au roi.
En 1425, il défendait contre les Anglais le Mont Saint-Michel
et nous l'avons cité en 1427 à la rescousse de Montargis. Le bâtard d'Orléans sera quelquefois
appelé par anticipation Dunois dans notre récit,
comme il l'est dans les chroniqueurs qui ont écrit postérieurement
à l'époque où il recut du duc d'Orléans
son frère, le comté de ce nom (21 juillet 1439).
Voir Godefroy, Vie de Charles VII, p. 805.
3 Raoul de Gaucourt était à quatorze ans écuyer
tranchant de Charles VI. Aprés tant de vicissitudes dans
sa vie militaire, déjà bailli du duc d'Orléans
en la capitale de ce duché, il y avait remplacé,
en 1427, André Marchand conme gouverneur. II fut en outre
conseiller et chambellan du roi, et nous le retrouverons parmi
les principaux de son entourage. Voir Lotlin, Recherches historiques
sur Orléans, t.I, p.198, et aussi J.Quicherat, note sur sa déposition au Procès de réhabilitnlinn,
t.III, p. 16.
4 Voyez I'appendice 3
5 Journal da siiège, Q.t.IV, p.96-98, chronique de La Pucelle chap.35
Les moulins furent remplacés par onze moulins à
chevaux établis dans la ville. (Journal
du siège)
6 Perte des Tourelles : Journal
du siège ; Chronique
de la Pucelle
7 Mort de Salisbury, voir les chroniques : Journal du siège, 24 oct.1428, Chronique
de la Pucelle, ch.38, Jean
Chartier, Robert Blondel, Monstrelet.
Thomas Basin, liv.II, chap.VII "Qui lapis ferramento allisus
quo eadem muniebatur fenestru, et in parte divisus; in caput ipsius
comitis prope alterum oculorum impegit eumque lethaliter vulneravit"
8 Jean de Brosse, seigneur de Boussac et de Sainte-Sévère,
nommé maréchal de France par le crédit de
Richemont pour l'avoir débarrassé de Beaulieu (1427).
II en sera souvent question dans la suite de cette histoire.
9 C'est le frère d'Antoine de Chabannes, comte de Dammartin,
ce chef des écorcheurs, si fameux dans la seconde moitié
du règne de Charles VII.
10 - Arrivée de Dunois, etc...(Journal du siège).
- Gladsdale (Glacidas) : "Et disoit-on que ce siége
se gouvernoit plus par lui que par nuls autres, combien qu'il
ne fust pas de si grand estat que plusieurs des dessus nommés" (Chartier) ; "de haut courage, plein de toute tyrannie
et orgueil" (Chron. de la Pucelle, chap.37)
; "usa souvent de grands menaces, et s'alloit vantant
par son orgueil, qu'il feroit tout meurtrir à son entrée
dans la ville, tant hommes que femme, sans en espargner aucuns."
- Délibération des Anglais, (ibid., chap.38)
11 - John Talbot, comte de Shrewsbury, né vers 1373, une
des figures les plus imposantes d'un temps où l'Angleterre
compta de si grands Capitaines
- Thomas Lord Scales, avait paru déjà aux journées
de Cravant (Chron. de la Pucelle, chap.4),
de Verneuil (ibid., chap.10),
etc...
12 - Destruction des faubourgs (Journal du siège,
08/11/1428, 29/12/1428)
- Arrivée de Talbot : (ibid, 30/12/1428)
- Le 8 novembre 1428, La Hire se trouve à Tours, demandant,
au nom de Charles Vll, des secours pour la ville assiégée.
La municipalité vota un subside qui fut avancé par
un bourgeois. (Archives de Tours, cité par Vallet de Viriville)
13 Maître Jean (Journal du siège, 25/12/1428),
appendice 4
14 William Pole, comte et plus tard duc de Suffolk, petit-fils
du fameux ministre de Richard II.
15 Suffolk, (Chronique de la Pucelle, chap.46),
Monstrelet (Il, 63) désigne SuffoIk comme, général
capitaine ayant au-dessous de lui Scales, Talbot, Lancelot de
Lisle et Gladsdale.
- Boulevard Charlemagne et boulevard du Champ Saint-Privé,
du 1er au 6 janvier 1429, (Journal du siège, 06/01/1429),
boulevard de la Croix-Boissée (ibid., avant le 16
janvier)
- John Falstolf ou Falstalf, né vers 1399, lieutenant du
roi d'Angleterre à Harfleur, après la prise de cette
ville, et, depuis la mort de Henri V, grand maître d'hôtel,
c'est-à-dire chef de la mission militaire du duc de Bedford.
16 Forces des Anglais : 500 hommes aux Tourelles avec Glasdale,
(Q.t.IV, p.102) ; renfort de 300 hommes avec Talbot, 1er décembre
1428 (ibid.p.103). 2.500 hommes avec Suffolk, à
Saint-Laurent, 29 décembre, (ibid. p.106) renfort
de 1200 hommes avec Falstolf, le 16 janvier 1429, (ibid.,
p.110)
- Forces des Orléanais : Indépendamment de la population
armée, qui pouvait être de 3000 à 6000 combattants,
et de la garnison primitive d'environ 600 à 700 hommes
: 800 hommes, 25 octobre 1428. (ibid. p. 101) : 200, le
6 janvier 1429, sous l'amiral de Culan (ibid., p.108),
Pour les renforls postérieurs, voyez l'indication que j'en
donne à leur date et l'appendice
n°22
- Etats de Chinon, octobre 1428. Hist.de Languedoc, t. IV, p.472
et 473. Le clergé y participa dans la forme qui lui était
propre ; nobles, clercs, étudiants, ouvriers des monnaies,
tous les privilégiés durent payer leur part de cette
aide. Et en même temps les États sommaient les fendataires
de s'armer pour la défense du royaume, selon leurs obligations
féodales. (Voir Loiseleur, Compte des dépenses faites
par Charles VII pour secourir Orléans, p.64)
- Traité avec le roi d'Écosse, Jacgues 1er, pour
le mariage de Marguerite sa fille avec Louis Dauphin de France,
30 octobre 1428. Ce mariage fut célébré à
Tours, le 2 juin 1436, en vertu d'une dispense, Ie Dauphin n'ayant
même pas alors quatorze ans.
17 Bizarreries du canon : Un boulet tombe sur une table
entourée de cinq convives, sans autre effet que de briser
le service ; un autre, au milieu de cent personnes réunies,
atteint l'une d'elles et lui emporte un soulier. (Q. Procès,
t. IV, p.104 et 111)
Combats singuliers : Un jour ce sont deux Gascons qui battent
deux Anglais ; un autre jour six Français qui défient
six Anglais: les Anglais ne vinrent pas. (Ibid. p.106 et
111)
Combat de pages à coups de pierres : Ies petits
Anglais y perdirent leur chef ; les Français leur étendard.
(Ibid. p.143 et 144.)
Mort de Lancelot, le samedi 29 janvier (ibid. p.115).
Voyez aussi l'appendice n°5.
18 Nouveaux renforts à Orléans : 30 hommes
d'armes, le 24 janvier
(Q.t. IV, p.114), 26 combattants le 5
février (ibid.)
Convois de vivres, les 3, 5, 10, 12, 25, 31 janvier ; 25
février, 6, 7, 8 mars ; 5, 16, 21 avril - interceptés,
25, 28 janvier et 27 avril (voir le Journal du siège
à ces dates)
Affaire de l'île des Moulins (ibid., p.112).
Convois aux Anglais, 7 et 19 avril (voir le Journal
du siège à ces dates).
19 Convoi de Falstoff (Q.t.11, p.120 - Journal du siège).
Monstrelet dit quatre à cinq cents charettes. La Normandie
avait fourni 200 lances et 600 archers (Beaurepaire : Administration
de la Normandie sous la domination anglaise p. 69). -Le comte
do Clermont (Chronique de la Pucelle, ch.40),
Berri p.376 (éd.Godefroy). Charles, comte de Clermont devint
Duc de Bourbon après son père qui monrut prisonnier
des Anglais en 1434.
20 Arrivée des troupes à Orléans pour l'expédition
projetée (Q.t.IV, p.118-120 (Journal du siège).
- Préparatifs de la bataille (ibid., p.120) Chroniques
de la Pucelle, Monstrelet.
21 Bataille de Rouvray ou la Détrousse des harengs : Journal
du siège, Chronique de la Pucelle, et Monstrelet, aux lieux
cités ; Perceval de Cagny ; Chron. de la Fête du
8 mai, t.V, p. 288.
22 Regnault de Chartres, né vers 1380, chanoine, puis doyen
de Saint-Pierre de Beauvais en 1408, et archevêque de Reims
en 1414 : c'est en cette qualité qu'il se rendit l'année
suivante au concile de Constance. Il fut une première fois
chancelier de France le 28 mars 1424 ; mais il remit les sceaux
au bout de quelques mois pour aller, comme orateur d'obédience,
auprès de Martin V. II redevint chancelier le 2 novembre
1428. Nous verrons quelle sorte d'influence il exerça sur
cette période de notre histoire. Voir sa vie comme archevêque
et comme chancelier dans le Gallia christiana et dans Duchesne,
Hist. des chanceliers de France, et sa notice plus abrégée
dans un article de la Biographie générale de MM.
Didot, signé, comme beaucoup d'autes excellents articles
sur les hommes de ce temps, par Vallet de Viriville.
23 Louis de Culan après une longue captivité en
Orient, avait été nommé bailli de Melan et
amiral de France, en 1422.
24 Le comte de Clermont à Orléans : Voir
le Journal du siége, la Chronique de la Pucelle et Monstrelet
aux lieux cités. L'auteur de la chronique de la Fête
du 8 mai, on l'a vu, dit que les Orléanais, voyant que
les fugitifs de Rouvray n'osaient combattre les Anglais les invitèrent
à sortir de la ville comme des bouches inutiles (t.V, p.288).
Il vaut mieux s'en rapporter au Journal qui dit que les Orléanais
se montrèrent mécontents de ce départ. (t.
IV, p.130).
25 Ambassade au
duc de Bourgogne : Journal
du siège, Procès ; Chronique de la Pucelle, chap.61.
Avant le siège, les Orléanais avaient déjà,
dit-on, cherché à intéresser le duc de Bourgogne
en leur faveur. Ils avaient donné 2500 écus à
La Trémoille, pour détacher Philippe des Anglais.
La Trémouille s'y est-il employé sérieusement
? On veut le croire... car il garda l'argent. Voir Lottin, t.I,
p.197, citant Dubois et les comptes de la ville du 20 avril
1425.
26 Nouvelles bastilles : Procès, t. IV, p.132, 135, 138
et 145 (Journal).
- Voyez l'appendice n°6.
27 Trou pratiqué au mur de l'Aumône (9 mars), t.IV,
p.134 (Journal)
- Bruit de trahison le Jeudi Saint (24 mars) : "Durant
lequel jour courut grant bruit que aucuns dela cité la
debvoient trahir et bailler ès mains des Anglois : pour
quoy celluy mesme jour et lendemain, veille de sainctes Pasques,
et le jour aussi, furent les gens de guerre y estans en garnison
et les citoyens et autres y estans retraicts pareillement, toujours
en armes et chacun sur sa garde, tant en la ville et sur les murs,
cumure ès boulevers d'entour" (ibid., p.141).
28 Echanges de politesses entre les chefs : (22 février)
Suffolk fit offrir au bâtard d'Orléans un plat de
figues, de raisin et de dattes, en le priant de lui envoyer de
la panne noire (sorte de drap) pour faire une robe : politesse
fort intéressée sans doute, car dans 0rléans
on ne manquait pas encore de vivres, et les Anglais pouvaient
bien manquer de drap dans leur camp ; mais le bâtard accueillit
l'offre et la demande avec la même bonne grâce (ibid.,
p.131).
Sorties : Plusieurs fois les Orléannais pénétrèrent
assez avant dans les bastilles pour rapporter en trophées
des tasses d'argent, des robes fourrées de maître,
sans compter les arcs, les flèches et autres instruments
de guerre (2 mars et
18 avril), t. IV, p.132
et 147.
Courses dans la campagne : Un jour (12
avril), c'est une troupe qui, sortant de nuit, pénètre
jusqu'à Saint-Marceau au Val de Loire, force l'église
et y fait prisonniers vingt Anglais qu'elle ramène à
Orléans ; un autre jour (20
avril) un capitaine avec vingt hommes d'armes arrive à
Fleury-aux-Choux et y surprend les hommes qui, tout récemment
avaient amené des vivres aux bastilles anglaises.
29 Retour de l'ambassade envoyée au duc de Bourgogne, Journal.
p.146, Monstrelet, II, 58; Chronique de la Pucelle, ch.41;
J. Chartier, ch.xxxiv.
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