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21 novembre 2024  

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Livre I - DOMREMY ET VAUCOULEURS
I - L'enfance de Jeanne d'Arc - p. 69 à 85

a vallée de la Meuse, de Neufchâteau à Vaucouleurs et au-delà, se prolonge entre deux chaînes de coteaux ou de mamelons, séparés l'un de l'autre par des gorges plus ou moins profondes. Les hauteurs gardent encore quelques restes des bois qui les couvraient jadis ; la vigne en a pris la place sur les pentes les moins roides et les mieux exposées ; le blé succède à la vigne et descend jusqu'aux prairies, qui occupent, sur une largeur de douze à quinze cents pas, le fond uni de la vallée. La Meuse y serpente capricieusement d'un côté à l'autre, dans un lit toujours vert. Trop peu profonde pour que la main de l'homme ait entrepris de l'asservir au commerce en la redressant, elle va, dans son cours sinueux, baigner successivement de nombreux villages. Nommons entre plusieurs autres : Frébécourt, au pied de la colline d'où le château de Bourlemont semble porter au loin l'oeil du maître ; Coussey, Domrémy, sorte d'annexe de Greux qui s'élève au débouché de la route de Gondrecourt; Maxey, au confluent du Vair, Burey-la-Côte, Burey-en-Vaux, et Chalaines en face de Vaucouleurs : Vaucouleurs, sentinelle avancée de la vieille France, fièrement campée sur son coteau, comme pour mieux surveiller la chaussée qui continue, à travers la vallée, le pont de la Meuse et le chemin de la Lorraine. Cette longue prairie, presque au niveau de la rivière, qui chaque année, sans effort et sans péril, la recouvre de ses bienfaisantes inondations, présente en la saison où l'herbe fleurit un immense tapis de verdure émaillé des plus vives couleurs : d'où le nom de Vaucouleurs (vallis colorum), donné au lieu le plus important du pays, et qui peint la vallée tout entière.

   
  Entre tous les villages disséminés sur ces bords frais et paisibles, le plus illustre à jamais c'est le plus humble : c'est la petite commune de Domrémy.
Là naquit Jeanne d'Arc (1) le 6 janvier 1412. Son père, Jacques d'Arc, était né à Séfond (Ceffonds), près Montier-en-Der, en Champagne (Haute-Marne) ; sa mère, Ysabellette Romée, de Vouthon, village situé sur la route de Greux à Gondrecourt, dans le Barrois (Vosges). Jeanne elle-même, née à Domremy, est-elle de la Lorraine, de la Champagne ou du Barrois ? Si l'on veut parler du territoire, Jeanne est une enfant de la Meuse : car la Meuse est la mère commune de tous ces villages qu'elle arrose, sans distinction de Lorraine, de Barrois ou de Champagne. Mais s'il s'agit de nationalité, Jeanne d'Arc était Française. Son père était Français, son village, Français. Son village était partagé, il est vrai, entre le Barrois mouvant (c'est-à-dire relevant de la couronne de France) et le domaine direct de la couronne. Un petit ruisseau d'eau vive marquait cette division : la rive droite, où l'on comptait vingt à trente feux, était au Barrois mouvant ; la rive gauche, au domaine, rattachée avec Greux, et toute cette portion de la vallée jusqu'à Vaucouleurs, à la prévôté d'Andelot et au bailliage de Chaumont-en-Bassigny (Champagne). Or la maison de Jeanne, qui subsiste encore, est sur la rive gauche. Mais quand elle eût été sur la rive droite, Jeanne en serait-elle moins Française ? Tous les habitants de Domrémy, ceux de la droite comme ceux de la gauche, excepté un, dit-elle elle-même (2), étaient Armagnacs, c'est-à-dire du parti national ; et quel est, après Dieu, celui que Jeanne appelle son seigneur et son roi ? Le roi de France (3) - C'est la marque irrécusable de sa nationalité. Que si l'on en veut la preuve directe et pour elle et pour son pays, on la trouvera dans des pièces authentiques. On la trouvera dans son procès dans sa propre déclaration et dans l'enquête ordonnée par ses juges. On la trouvera, avant son procès, dans deux actes de Charles VII : dans les lettres d'anoblissement, où elle est dite "de Domrémy, au bailliage de Chaumont" (Champagne), et dans celles où, en reconnaissance de ses services et à sa requête, le roi accorde exemption d'impôts (ce qui est bien le signe de l'empire) aux lieux qui font vue naître, aux deux villages unis de Greux et de Domrémy. (4)

                    
  Les parents de Jeanne étaient de simples laboureurs "de bonne vie et renommée", n'ayant, avec leur chaumière, qu'un bien petit patrimoine ; mais considérés dans leur état, vrais et bons catholiques, et soutenant avec honneur leur pauvreté. Ils eurent trois fils : Jacques, Jean et Pierre, et deux filles, Jeanne ou Jeannette et Catherine. (5)
  Des deux sœurs, Jeanne était l'aînée. Elle grandit auprès de sa mère, formée par elle à la religion et au travail : c'est un témoignage qu'elle ne craignit pas de se rendre à elle-même ; car, par ce témoignage, c'est sa mère qu'elle honorait. "Elle était bonne, simple et douce fille", dit une amie de son enfance ; "point paresseuse", ajoute un voisin : et elle travaillait de bon cœur, tantôt filant, jusques bien avant dans la nuit, aux côtés de sa mère, ou la remplaçant dans les soins du ménage ; tantôt partageant les devoirs les plus rudes de son père, pourvoyant à l'étable, allant au champs, mettant la main, selon qu'il le voulait, à la herse, à la charrue, et quelquefois aussi gardant pour lui dans la prairie commune le troupeau du village, quand le tour était venu (6).

  "Bonne fille", c'est le cri de tous honnête, chaste et sainte, parlant en toute simplicité, selon le précepte de l'Évangile : "Oui, non ; cela est, cela n'est pas", "Sans manque", sine defectu, voilà tout ce qu'il lui arrivait d'ajouter à sa parole pour en attester la vérité. Un pur rayon de l'amour divin illuminait cette vie si occupée, et donnait du charme à ses labeurs. Le petit jardin de la maison paternelle touchait au cimetière, qui est comme le jardin d'une église de village. Jeanne usait du voisinage pour aller à l'église le plus souvent qu'elle le pouvait : elle y goutait une douceur extrême. On l'y voyait prosternée devant le crucifix ; ou bien les mains jointes, les yeux levés vers l'image du Sauveur ou de la Vierge sa mère. Tous les matins pendant le saint sacrifice, elle était au pied des autels ; et le soir, quand la cloche qui sonnait les complies la surprenait aux champs, elle s'agenouillait, et son âme s'élevait à Dieu. Elle se plaisait à entendre chaque soir ce commun appel à la prière. Quand le sonneur de l'église (on le sait de lui-même) venait à l'oublier, elle le reprenait, disant que ce n'était pas bien, et promettait de lui donner des lunes (quelque espèce de gâteaux) pour qu'il se montrât plus diligent. Elle ne se  bornait pas aux devoirs que la religion prescrit à tout fidèle. Cette jeune fille, qui avait accompli de si grandes choses  à dix-neuf ans, est toute entière à ces pratiques naïves de dévotion où les âmes simples et pures ont tant de charme à se répandre. A moins d'une lieue au Nord de Domrémy, sur le penchant de l'un des coteaux qui descendent vers la Meuse, il y avait un ermitage dédié à Notre-Dame de Bermont. Jeanne aimait à le visiter ; et le jour que l'Église a plus spécialement consacré à Marie, le samedi, vers la fin de la journée elle se joignait à d'autres jeunes filles pour y venir prier ensemble et y brûler des cierges : symbole consacré par l'Église pour rappeler aux fidèles la foi qui veille et l'amour qui doit brûler pour Dieu (7).

  Jeanne fut donc, dès sa plus tendre enfance, un modèle de piété. Elle n'avait point sa pareille au village. Les jeunes gens se moquaient bien un peu de sa dévotion ; les jeunes filles en jasaient aussi. Mengette, sa petite amie, trouvait elle-même et lui disait qu'elle était trop pieuse ; et ce reproche était pour Jeanne comme un  éloge qui la faisait rougir. Mais sa foi se traduisait en bonnes œuvres. Si peu d'argent qu'elle eût, elle en avait pour l'aumône. Elle consolait les malades, elle recueillait les pauvres, elle donnait place au foyer, elle leur cédait même son lit, secondée dans sa charité par la religieuse condescendance de ses parents. Aussi était-elle aimée de tout le monde (8).



  Elle ne cherchait point d'ailleurs à se distinguer des autres, et se mêlait à ses compagnes dans les fêtes du village. Sur la pente même où s'adosse le village de Domrémy, entre les bords fleuris de la Meuse et la sombre forêt de chênes, le bois Chesnu, qui en couronnait les hauteurs, il y avait un hêtre d'une remarquable beauté, "beau comme un lis", dit l'un des habitants, large, touffu, dont les branches retombaient jusqu'à terre. On l'appelait "Aux loges-les-Dames, Ad lobias Dominarum" ou encore "l'arbre des dames". Autrefois, quand le château de Domrémy était encore habitable, les seigneurs et les dames du lieu, avec leurs damoiselles et leurs suivantes, venaient au retour du printemps, faire un repas champêtre sous son ombrage. Peut-être un jour ces joyeuses réunions avaient-elles amené quelque mystérieuse aventure qui changea de nature et de forme en passant dans la tradition. Le nom de dames, donné aux femmes de haut parage, était aussi le nom donné aux fées dans le langage populaire. On racontait qu'un chevalier, seigneur de Bourlémont, venait y voir une fée, conversait avec elle. Jeanne, avait entendu dire qu'on le lisait dans un roman (9). L'arbre des Dames était donc aussi l'arbre des Fées.
  C'étaient les fées qui, dans les anciens temps, venaient danser sous le beau hêtre ; on disait même qu'elles y venaient encore. Cela n'empêchait pas les habitants de Domrémy de faire ce que faisait leurs pères. L'arbre était toujours aussi beau. Au printemps, on se rassemblait sous sa large voûte de verdure. On l'inaugurait, en quelque sorte, avec les beaux jours, le dimanche de la mi-carême (Lætare). En ce jour, qu'on nommait aussi le dimanche des Fontaines, les jeunes garçons et les jeunes filles venaient sous l'arbre fameux faire ce qu'on appelait leurs fontaines.
  Ils emportaient, comme provision de la journée, de petits pains faits exprès par leurs mères, et s'y livraient aux ébattements de leur âge, chantant, dansant, cueillant des fleurs aux alentours pour en faire des guirlandes dont ils ornaient les reameaux du bel arbre ; puis quand ils avaient mangé, ils allaient se désaltérer aux eaux limpides d'une source voisine tout ombragée de groseillers (10). Jeanne y venait comme les autres ; Mengette, son amie, dit qu'elle y fut et y dansa plus d'une fois avec elle. Pourtant elle n'était point danseuse ; et souvent, au milieu de la fête, elle se détournait vers une petite chapelle élevée au voisinage sur l'un des points les plus riants de la colline, Notre-Dame de Domrémy (11), et suspendait à l'image de la  Vierge les guirlandes qu'elle avait tressées des premières fleurs des champs (12).
  C'est au milieu d'une vie si calme et si paisible qu'elle fut appelée à s'armer
pour la France.

   
  La mission de Jeanne d'Arc produisit une si complète et si rapide révolution dans les destinées de la France, qu'assurément rien n'est plus digne de fixer l'attention de l'historien. D'où vient-elle ? Jeanne est là qui répond. Elle dit qu'elle l'a recue de Dieu. Mais cette réponse n'est pas de telle sorte qu'elle obtienne d'être accueillie sans examen, sans commentaire ; et les contradictions n'ont pas manqué non plus que les systèmes. On ne dit pas que Jeanne ait trompé sciemment ; on ne dit plus qu'elle ait servi d'instrument à une machination politique, complice ou dupe elle-même de la fraude qu'elle était chargée d'accréditer : mais on prétend trouver en elle, et dans les plus nobles inspirations du coeur, dans l'extase d'une âme pieuse, dans l'exaltation d'un ardent patriotisme, la source de l'illusion qu'elle aurait propagée de bonne foi.

   

  Jeanne était une mystique, dit-on ; et pour montrer comment elle le fut, on en cherche  le secret dans toutes les causes qui ont pu de quelque façon, agir sur son âme : l'esprit de son pays et de son temps, l'influence même de sa propre nature. Mais la Champagne, ou, si l'on veut, les marches de la Lorraine (car pour désigner la patrie de Jeanne d'Arc, il est juste d'associer les deux mots), n'ont jamais été réputées un pays de mystiques ; et tous les efforts tentés au procès de Rouen pour grossir les supersitions de son village, n'ont servi qu'à montrer combien elles  avaient peu d'empire sur elle. Quant aux illuminés de son temps, ils n'ont rien, dans les vagues épanchements de leur âme, qui ne soit en contraste avec le caractère si parfaitement précis et défini des révélations de Jeanne d'Arc. Ce n'était pas non  plus une jeune fille maladive, dont la nature imparfaitement développée la fît sujette aux hallucinations. Le témoignage d'où on l'a voulu conclure est une simple opinion, un ouï-dire qui ne prouve que l'extrême délicatesse de sa pudeur ; et tous  s'accordent à déclarer qu'elle était aussi forte que belle : belle et bien formée  (d'Aulon) ; bien compassée de membres et forte (chron. de La Pucelle) ; grande et moult belle (Mirouer des Femmes vertueuses) ; de grande force et puissance (Chron. de Lorraine) ; d'une force qui n'avait rien de viril : elle avait la voix douce, une voix de femme, disent ceux qui l'ont entendue (Guy de Laval, P. de Boulainvilliers) ; d'une puissance qui marquait dans la jeune fille l'entier développement de la femme. C'était une ame religieuse dans un corps robuste et sain (13).

                            

Ce que le mysticisme n'explique pas, le doit-on rapporter au seul amour de la patrie ? Jeanne assurément n'était pas insensible aux malheurs de son pays. La vieille querelle des Armagnacs et des Bourguignons partageait, jusque dans ce coin reculé de la France, les villages, les familles même ; et la haine était vive entre les deux partis. Domrémy (Dompnus Remigius), ancien domaine de l'Église métropolitaine de Reims, devenu plus tard un des apanages de la seigneurie de Joinville, et rattaché depuis au domaine de la couronne, était resté fidèle au roi. Tout le monde y était Armagnac, sauf un seul homme ; et Jeanne avoue qu'elle aurait vu sans regret qu'on lui coupât la tête, si toutefois c'était la volonté de Dieu. A Maxey, au contraire, tout à côté, sur l'autre rive de la Meuse, les habitants étaient Bourguignons, et la lutte s'engageait souvent entre les enfants des deux villages. Jeanne vit plus d'une fois ceux de Domrémy revenir de la bataille le visage meurtri et sanglant. C'était une image de la guerre civile ; mais on n'a pas de preuve qu'elle ait sévi entre les habitants de ces contrées autrement que par ces combats d'enfants. On n'y souffrit pas beaucoup plus de la guerre étrangère. Cette marche de la Lorraine, aux frontières de l'Allemagne, n'était pas le chemin des Anglais. La paix de Troyes les avait établis en Champagne ; mais ils n'en occupaient qu'un petit nombre de points. Ce n'était qu'à grand'peine, et avec l'aide de Jean de Luxembourg, qu'ils avaient pris position sur le cours inférieur de la Meuse, à Beaumont, à Mouzon ; quant au cours supérieur, ils l'avaient laissé aux entreprises des Bourguignons, qui, au nombre de quatre ou cinq cents partisans, ravagèrent le Barrois en 1424, réunirent en 1428 (1er juillet), postérieurement aux premières démarches de Jeanne (13 mai), quelques soldats pour attaquer Vaucouleurs, et probablement se séparèrent sans avoir rien tenté. Cette sanglante guerre parait s'être réduite, pour les habitants de Domrémy, à quelques alertes. Quelquefois, à l'approche d'une troupe de partisans, on sauvait les bestiaux dans l'île formée devant le village par les deux bras de la Meuse. Un jour même tous les habitants s'enfuirent à Neufchâteau. Jeanne y suivit ses parents, et demeura quatre ou cinq jours, ou même quinze jours avec eux chez une honnête femme nommée la Rousse. Après quoi on revint au village ; et rien ne dit que ce fût alors ou en pareille circonstance qu'il ait été brûlé. Voilà tout ce que les recherches les plus habiles et les plus minutieuses ont pu faire découvrir sur la part de Domrémy aux malheurs du temps. Assurément c'est quelque chose, et il ne faut pas tenir pour nulle l'impression que Jeanne en put recevoir. Mais, sans aucun doute, si le sentiment des souffrances que la guerre apporte, si la haine qu'inspire la vue du conquérant, maître du sol natal, avaient suffi pour donner un sauveur à la France, il serait né partout ailleurs. (14)

   

  D'où vient donc la mission de Jeanne d'Arc ? Nous ne voulons pas trancher d'avance la question. Notre unique objet, au contraire, est de mettre en garde contre les explications prématurées, et de faire voir que tout ne se résout pas, aussi naturellement qu'on le pourrait croire, par les causes alléguées. Quelque vraisemblance d'ailleurs que ces causes puissent avoir à première vue, il faut, avant de se faire définitivement admettre, qu'elles se justifient au contrôle des faits accomplis. Revenons donc à la vie de Jeanne d'Arc. Écoutons ce qu'elle a dit et voyons ce qu'elle a fait. L'entière manifestation de son caractère dans la suite de l'histoire, sa franchise, sa droiture, sa netteté d'esprit et son parfait bon sens, montreront mieux que toutes les raisons du monde, quelle idée on se doit faire de sa personne, quelle foi on peut avoir en ses discours.



                                                


Source : Jeanne d'Arc - Henri Wallon - 5° éd. 1879

Ilustrations :
- La chateau de Bourlémont (octobre 2004).
- Vieilles maisons de Domrémy ("Grande histoire illustrée de Jeanne d'Arc" - H.Debout - 4° éd.1922)
- Vue générale de Domrémy et de la vallée de la Meuse ("Histoire abrégée... de Jeanne d'Arc" - Jollois - 1824)
- Maison natale de Jeanne d'Arc vers 1915 ("Grande histoire illustrée de Jeanne d'Arc" - H.Debout 4° éd.1922)
- Chambre de Jeanne d'Arc - août 2004 (ibid.)
- Jeanne d'Arc et St-Michel, peinture de Thirion (ibid.)
- Tableau de Mme Virginie Demont-Breton. (ibid.)
- L'église de Domrémy vers 1819 ("Histoire abrégée... de Jeanne d'Arc" - Jollois - 1824).

Notes :
1 Plusieurs personnes croient rendre à Jeanne d'Arc son véritable nom en l'appelant Jeanne Darc. Nous montrons dans l'appendice n°7 le peu de fondement de cette innovation.

2 Q. Procès, t.I, p.65 et 262.

3 Q. Procès, t.I, p.45

4 Sur la date de la naissance et sur le pays de Jeanne d'Arc, voir les appendice n°8 et appendice n°9.

5 Condition de la famille de Jeanne d'Arc : Témoignages des gens du pays ; Procès, t.Il, p.388, 393, 395, 397, 400, 401, 403.
- Les lettres d'anoblissement données aux parents de Jeanne d'Arc supposent qu'ils pouvaient être d'origine servile "non obstante quod ipsi forsan alterius quam liberæ conditionis existant." (Procès, t.V, p.152.) Mais cela est moins un témoignage sur leur origine qu'une formule prévoyant tous les cas pour lever tous les obstacles : car la noblesse ne s'accordait communément qu'aux personnes de condition libre.

6 - Son instruction religieuse : "Nec alibi didicit credentiam, nisi a præferata matre" (Procès T.I, p.47. Les citations du tome 1 sont toutes du procès de condamnation et par conséquent nous donnent les déclarations mêmes de Jeanne d'Arc.). Cf les témoignages de Jean Moreau, t.II p.389, de Béatrix Estellin, p.395, et des autres, p.398, 403,  404, 418, 424.
- Sur les occupations de son enfance : "Utrum in juventute didicerit aliquam artem : dixit quod sic, ad suendum pannos lineos et nendum" t.I, p.51 ; et les mêmes témoignages, t.II p.389, 390, 393, 396, 398, 400 etc... "Non erat remissa, laborabat libenter, nebat, ibat ad aratrum cum patre, tribulabat terram cum tribula, et alia domus necesseria faciebat ; et aliquotiens animalia custodiebat" p.424 : "prout pluries de nocle eam, in domo loquentis cum quadam filia sua nere vidit" (t.II p.409 et 430) ; - "laborabat, nebat, sarclabat" (p.422, 423, 427, 462) ; - libenter operabatur et videbat nutrituram bestiarum ; libenter gubernabat animalia domus patris, nebat et necessaria domus faciebat, ibat as aratrum, tribulatum, et ad turnum animalia custodiebat," (p.433, cf.p.404, 410, 413, 415, 420 etc...). Le soin des troupeaux doit se rapporter à sa première enfance ; plus grande, elle s'occupait surtout des soins du ménage ; pour les troupeaux c'était si peu son habitude de les garder, qu'elle même déclare dans son procès que si elle le fit, elle ne s'en souvient pas : "Vacabat circa negotia familiaria domus, nec ibat ad campos cum ovibus et aliis animalibus" t.I p.51 (Interr. du 22 février) ; et quod postquam fuit grandior et quod habuit discretionem, non custodiebat animalia communiter, sed bene juvabat in conducendo ea ad prata, et ad ununm castrum quod nominatur Insula, pro timore hominum armatorum ; sed non recordatur an in sua juvenili ætate custodiebat an non," t.I, p.66 (Interr. du 22 février.).

7 Piété de Jeanne : mêmes témoignages, t.II p.400, etc... "Dum erat in ecclesia, aliquotiens prona erat ante Crucifixum, et aliquando habebat manus junctas et fixas   insimul, ac vultum et oculos erigendo ad Crucifixum aut ad beatam Mariam", t.II p.459 (Arnolin, prêtre)
- Assiduité à la messe, t.II p.390, 396, 398, 400. Si elle avait eu de l'argent, dit naïvement un des prêtres entendus, elle l'aurait donné à son curé pour dire des messes, t.II p.402 (Et. de Sionne)
- Pratique des sacrements : t.II p.390, 394, 396, 399, 404, 415, 418, 432. Nicolas Bailly, qui fit l'enquête à Vaucouleurs au nom de Pierre Cauchon, dit au procès de réhabilitation qu'elle se confessait presque tous les mois, selon qu'il avait ouï dire de beaucoup d'habitants (t.II p.452) H.Arnolin, prêtre, la confessa trois fois en un carême (t.II p.359). Cf ce qu'elle dit elle-même à ses juges, qu'elle se confessa deux ou trois fois à Neufchâteau : et elle y fut quinze jours (t.I p.51)
- Les complies et les cloches : t.II p.393, 413, 420, 424,
- Des lunes : on lit aussi lanas (de la laine)
- L'ermitage de Bermont : t.II p.390, 404, 413, 420, 425, 433, 439 (témoins de Domrémy) Les enfants de Greux y allaient faire leurs fontaines (t.II p.416), comme ceux de Domrémy à Notre Dame de Domrémy (voir ci-après). C'est par un lapsus, sans doute, que M.Quicherat (t.II p.389, note), place cette chapelle sur la route de Domrémy à   Neufchâteau : c'est "sur la route de Domrémy à Vaucouleurs" qu'il faut lire. La chapelle s'élevait sur le versant de la colline, à 2 kil. au nord de Greux. Un propriétaire de Vaucouleurs l'a rebâtie sous prétexte de la réparer ; il l'a enfermée dans son enclos, s'est construit tout à côté une maison bourgeoise. la chapelle avec son clocheton y fait le pendant de ses communs.
Voir le dossier : Notre-Dame de Bermont (ndlr).

8 Sa dévotion : "Quod non erat sibi similis in dicta villa" t.II p.402 (Et. de Sionne) "Quod erat bona catholica, quodque nunquam meliorem ipsa viderat, nec in sua parochia habebat", p.434 (Colin) ; "et ipse et alii deridebant eam" p.420 (J.Watrin) ; "quod erat nimis devota", p.430 (Mengette) et 418 (Hauviette)
- Sa charité : p.398 (Jeanette Thévenin) : "et faciebat hospitare pauperes, et volebat jacere in focario et quod pauperes cubarent in suo lecto", p.427 (Isabelle Gérardin). Un de ceux qu'elle soigna malade en rend témoignage : "dum erat puer, ipse infirmatabur, et ipsa Johanna ei consolabatur", p.424 (Musnier).

9 Récit en langue vulgaire.

10 L'arbre des dames : Voyez ce qu'en dit Jeanne elle-même, t.I p.67, et presque tous les témoins de l'enquête de Vaucouleurs au n°9 de l'interrogatoire.
- Le beau may, t.II p.67
- L'abre dominarum, t.II, p.394, 396 etc...
- ad lobias dominarum, p.427, 430, etc... ; "tempore veris, quia tum est pulchra sicut lilia et est dispersa, ac folia et rami ejus veniunt usque ad terram", t.II p.423. En 1628, Edmond Richer en parlait encore avec admiration. L'arbre n'existe plus, mais le souvenir s'en est gardé dans le pays (voir la note de M. Jules Quicherat, t.II p.390).
- Les seigneurs et les dames de Bourlémont, p.398, 404, 413, 427
- Le chevalier Pierre Granier de Bourlémont et la fée, p.404
- Les fées : Jeanne rapporte au procès qu'elle a ouï dire de l'une de ses marraines qu'elle les y avait vues : "sed ipsa loquens nescit an utrum hoc esset verum vel non", t.I p.67. Les témoins de la révision en parlent comme de choses qui n'arrivent plus, t.II p.410, 420, 425, 440 : "sed proper earum peccata nunc non vadunt", p.396 (Béatrix Estellin) ; "sed, ut dicitur, postquam evangelium beati Johannis legitur et dicitur, amplius non vadunt", p.391 (J.Moreau)
- Divertissement des jeunes gens, p.390, 394, 400, 407, 423, 425, 427, 430, 434 (témoins de Vaucouleurs).
- Sur la fontaine aux groseillers, voir appendice n°10
Voir le dossier : les fontaines de Domrémy.

11 ndlr : Cette chapelle n'existait pas au XV° siècle. Voir dossier : les légendes du Bois-Chenu.

12 Jeanne à l'arbre des dames : t.II p.407 (Th. Le Royer), 430 (Mengette) ; "non tripudiabat,  ita quod sæpe ab aliis juvenculis et aliis causabatur" p.427 (Isa.Gérardin). Jeanne elle-même dit qu'elle a bien pu y danser aussi ; mais qu'elle y a plus chanté que  dansé : "Et nescit quod postquam habuit discretionem ipsa tripudiaverit juxta illam arborem ; sed aliquando bene potuit ibi tripudiare cum pueris, et plus ibi cantavit quam tripudiaverit", t.I p.68 ; "et faciebat apud arborem serta pro imagine beatæ Mariæ de Dompremi" (p.67)
- Sur la chapelle de N.D de Domrémy, voir l'appendice n°11.

13 Superstitions imputées à Jeanne : Jeanne ne nie pas théoriquement l'existence des fées ou des êtres surnaturels, pas plus que personne en son temps ; mais elle dit qu'elle n'en a jamais vu à l'arbre des Dames, et ne sait si elle en a vu ailleurs (t.I, p.67) car elle déclare qu'elle ne sait ce que c'est (t.I, p.209) ; et pour ce qu'on raconte de ceux qui vont en erre (qui errant) avec les fées elle ajoute qu'elle n'en sait rien, qu'elle en a entendu parler et n'y croit pas, estimant que c'est sortilège. Après cela, comment M. Henri Martin peut-il parler "des fées qu'elle croyait entrevoir" (Histoire de France, t.VI, p.140.) Avec ce passage (Procès, t.1, p. 67), où Jeanne dit qu'elle n'en a jamais vu, l'auteur en cite un autre (Procès, t.I, p.168), où elle parle des apparitions de ses saintes. C'est se placer, pour en juger, du côté de ses juges.
- Contraste de Jeanne et des mystiques de son temps : c'est ce que monlre M. Jules Quicherat, (Aperçus nouveaux sur l'Histoire de Jeannne d'Arc, p.74).
- Constitution physique : simple oui-dire, t.111, p.219 ; (d'Aulon). - Ainsi encore ceux qui l'ont suivie dans ses campagnes s'étonnaient de la voir rester à cheval des jours entiers, comme étrangère aux nécessités de la nature : "Dum erat in armis et eques, nunquam descendebat de equo pro necessariis naturæ, et mirabantur omnes armati quomodo poterat tantum stare supra equum. (Ibid., p.118) (Sim.Charles) ; cf. t.V, p.120 (P. de Boulainvilliers), et M. J. Quicherat, (Aperçus..., p. 59-60).
- Portrait de Jeanne : Procès, t. 111, p. 219; t. IV, p. 205, 268, 330 ; t.V, p.108, 128, et le témoignage du duc d'Alençon, t.III, p.100. Un auteur plein d'erreurs et de fables, mais qui cite un chevalier italien présent alors à la cour de Charles VII, dit qu'elle était petite de taille, mais forte de corps : "erat brevi quidem statura, rusticanaque facie et nigro capillo, sed tote corare prævalida." T.IV, p.523 (Ph. de Bergame). Ce qu'il dit de sa taille, en contradiction avec les autres, peut s'expliquer par l'habit d'homme qu'elle portait qu'elle pouvait, sans être petite réellement, le paraitre sous le costume des hommes. Voir. Lebrun des Charmettes, Hist. de Jeanne d'Arc, t.I, p.367, et Vallet de Viriville, Iconographie de Jeanne d'Arc, p.2. Quant aux portraits qu'on a de Jeanne, aucun malheureusement n'est authentique. Voir. ibid., p.10 et 11.

14 Le Bourguignon de Domrémy : t.1, p.65. Pour rassurer le lecteur sur le sort de ce Bourguignon, Lebrun des Charmettes fait observer que Jeanne l'a plus tard accepté pour compère. (Hist. de Jeanne d'Arc, t.I, p. 280, 287)
- Les enfants de Maxey : Procès, t. 1, p. 66. - Les Anglais et les Bourguignons sur la Meuse : Monstrelet, II, 22, 31 et 47 ; Varin, Arch. législ. de Reims, Statuts, t.I, p. 675 et suiv.
Les bagarres entre enfants de Maxey et Domrémy-Greux pouvaient bien avoir lieu à la sortie de l'école communale de Maxey. (ndlr)
- Expédition préparée contre Vaucouleurs : Archives nation., sect. hist.K, cart.69, n°63. Une trève avait été conclue entre le maréchal de Bourgogne et le capitaine de Vaucouleurs, Baudricourt, le 18 mars 1426. (D. Plancher, Hist.de Bourgogne, t.IV, p.55 et 56 des Preuves). Vaucouleurs est aussi expressément nommé dans une des trêves ménagées par le duc de Savoie, entre le roi et le duc de Bourgogne, pour les pays de Bourgogne proprement dits et quelques provinces françaises du voisinage, 26 novembre 1427. (Ibid., p. 72-74.)
- Alertes à Domrémy et fuite à Neufchâteau : Procès.t.I, p.66 et 51 ; l'art. XII de l'enquête de Vaucouleurs, t.II, p.392 et suiv. et t.III, p.198.
- L'incendie du village, t.II, p.396 (Béatrix Estellin). Le témoin dit que : "Quand le village de Domremy fut brulé, Jeanne allait aux jours de fête à la messe à Greux." Voir pour tous ses faits, M. J. Quicherat, Aperçus nouveaux, p.11-13.


 

Jeanne d'Arc
Henri Wallon - 5°éd. 1879

Index

Avertissement
Préface

Introduction :

- La guerre de cent ans
- Charles VII et Henri VI
- Le siège d'Orléans

Livre IDomrémy et V...
I - L'enfance de J. d'Arc
II- Le départ

Livre II : Orléans
I - L'épreuve
II - Entrée à Orléans
III - La délivrance d'Orléans

Livre.III : Reims
I - La campagne de la Loire
II - Le sacre
III - La Pucelle

Livre.IV : Paris
I - La mission de J. d'Arc
II - La campagne de Paris
III - L'attaque de Paris

Livre.V :
Compiègne
I - Le séjour sur la Loire
II - Le siège de Compiègne

Livre.VI : Rouen - Les juges
I - Le marché
II - Le tribunal
III - Les procès-verbaux

Livre.VII : L'instruction
I - Les interrog. publics
II - Les interrog. de la prison
III - Les témoins

Livre.VIII : Le jugement
I - L'accusation
II - Les douze articles
III - Les consultations...
IV - La réponse de...

Livre.IX : L'abjuration
I - Le cimetière de St-Ouen
II - La relapse

Livre.X : Le supplice
I - La visite à la prison
II - La pl. du Vieux-marché

Livre.XI : La réhabilitation
I - La mémoire de Jeanne...
II - Le second procès...

Livre.XII : L'histoire

I - Les contemporains...
II - L'inspiration de J.d'Arc




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Jeanne d'Arc, histoire et dictionnaire