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Histoire
de Charles VII
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L.II-X- Comment le roi admit Jeanne la Pucelle à converser avec lui et l'équipa en armes et en chevaux. |
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gitur cum talia perseverans indesinenter ingereret et de liberacione civitatis Aurelianensis obsessisque subveniendo nulla spes, sed pocius apud omnes ferme summa desperacio haberetur, ab illo Johanne, illustri comite Dunensi, quem naturalem fuisse filium ducis Aurelianensis Parisius perempti supra retulimus, nonnullisque aliis qui circa regem erant datum regi consilium fuit, que madmodum in rebus desperatis aliquando fieri assolet, quod dictam Johannam Puellam audire deberet et ex hiis que per eam audiret, prudenter animadvertere atque explorare an dicenda per eam, velud humana figmenta, repudianda, vel pocius veluti divine alicujus admonicionis seu preceptionis habencia racionem humiliter recipienda et amplectenda forent.
Eorum autem consilio rex et instancia devictus, simul et rerum tunc presencium quadam velud adactus desperacione, adquiescendum decrevit, et Johannam Puellam ad se accersiri fecit. Veniens igitur ad conspectum regis ipsa Johanna, remotis arbitris, sola cum rege ultra duarum spacium horarum colloquium habuit. Qui, auditis que dicere voluit, super multis ad rem de qua eum admonebat attinentibus eciam interrogaciones atque in-quisiciones fecit. Cujus responsis dictisque animadversis, signisque et indiciis de occultissimis rebus, quas in sue testimonium missionis ac divine preceptionis sibi detexit, in nonnullam dictorum fidem est adductus. Fertur enim dixisse rex (quod et a predicto comite Dunensi, qui sibi familiarissimus erat, audiisse meminimus), eam sibi tam secreta atque occulta, ad dictorum fidem, adduxisse, que nullus mortalium preter seipsum, nisi divinitus habita revelacione, scire potuisset.
Assensum itaque admonitis per eam prestans, contractis a undique copiis, sue milicie eam, tanquam divinitus ductricem sui exercitus datam, virili veste corpore et capite per omnia amictam, armis equisque munitam, cum aliis sue milicie ducibus ad expugnandos hostes, qui longa jam et plurium mensium obsidione dictam Aurelianensem urbem premebant, destinavit. Que profecto non uti de illius etatis puellula seu muliercula potuisset estimari; sed more virorum forcium atque in armis exercitatorum adequitabat armata, vexillo proprio, tanquam militari signo, precedente, in quo ymagines gloriose virginis Dei genitricis et aliquarum ex dictis sanctis virginibus erant depicte.
Donc, comme elle répétait inlassablement les mêmes choses, qu'il n'y avait aucun espoir de délivrer Orléans et de secourir les assiégés et que, bien au contraire, le désespoir absolu régnait chez presque tous, Jean, illustre comte de Dunois, fils naturel, comme nous l'avons dit, du duc d'Orléans assassiné à Paris, et quelques autres personnages qui étaient auprès du roi donnèrent à celui-ci le conseil, comme on a coutume de le faire quelquefois dans les situations désespérées, d'accorder audience à Jeanne la Pucelle et, parmi les choses qu'il entendrait de sa bouche, d'examiner et de s'informer avec soin s'il en était qui dussent être repoussées comme d'humaines rêveries, ou, au contraire, humblement accueillies et prises en considération comme ayant le sens de quelque avertissement ou ordre envoyé par Dieu.
Les conseils et les instances de ces seigneurs vinrent à bout de la résistance du roi, qui, poussé aussi par le sentiment que la situation présente était désespérée, décida d'acquiescer à leur demande et se fit amener Jeanne la Pucelle. Venant donc en la présence du roi, elle eut avec lui, seule et sans témoins, un entretien de plus de deux heures. Après avoir écouté ce qu'elle avait à lui dire, il lui posa des questions et l'interrogea sur beaucoup de choses touchant ce qu'elle lui remontrait. Ses réponses et les propos qu'elle lui tint, les signes et les marques qu'elle lui dévoila des choses les plus secrètes en preuve de sa mission et de son envoi par Dieu l'induisirent à attacher quelque créance à ses paroles. Le roi dit, en effet, à ce que l'on rapporte (et nous nous rappelons l'avoir entendu de la bouche du susdit comte de Dunois, qui était de ses intimes), qu'elle lui avait révélé, en preuve de ses dires, des choses si secrètes et cachées qu'aucun mortel, sauf lui-même, n'aurait pu en avoir connaissance, sinon par révélation divine.
S'inclinant donc devant ses remontrances et réunissant de toutes parts ses soldats, il l'envoya en qualité de chef d'armée désigné par Dieu, et vêtue en tout point, tête et corps, comme un homme, munie d'armes et de chevaux, avec les autres capitaines de ses troupes, combattre les ennemis qui depuis plusieurs mois déjà assiégeaient Orléans. Et assurément personne n'aurait pu la prendre pour une jeune fille d'un âge si tendre ni même pour une jeune femme ; car, à la façon des hommes robustes et exercés aux armes, elle chevauchait tout armée, précédée en guise d'enseigne de son étendard personnel, sur lequel étaient peintes les images de la glorieuse Vierge, mère de Dieu, et de quelques-unes des saintes déjà nommées.
Source
: "Histoire de Charles VII" par
Thomas Basin - éd. et traduction Ch.Samaran - 1933.
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