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Histoire
de Charles VII
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L.I-XV
- Comment Jean, duc de Bourgogne, fut tué à
Montereau et comment Philippe, son fils, s'appliqua à
venger ce meurtre. |
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um vero esset Karolus delfinus in castro Monsteroli, supra flumen Yone, cum multis parcium suarum militibus, et non procul eciam ab eo loco esset Johannes, Burgundionum dux, cum magna armatorum manu, hii qui de parte delfini et cum eo tunc erant, simulantes velle pacem atque amiciciam cum ipso Burgundionum duce consiliari et reformari, ipsum, data sibi omni fide ac securitate que dari possit, ad dictum castrum de Monsterolio adventare procurarunt ad presenciam delfini, quasi de negocio pacis bona fide inter eosdem tractaturi. Cum autem illo adventasset, nichil insidiarum suspicatus, et hoc quidem contra plurimorum de suis opinionem qui de dolo atque insidiis vehementem suspicionem habebant, in presencia ipsius delfini, in cervice percussus, interemp-tus est miserabiliter.
A quo autem vel a quibus percussus extiterit, diffinire non possumus. Suspecti quidem de hoc habiti sunt prefatus Tenequinus de Castro, de quo supra meminimus, et alius egregius ac strennuus miles de partibus Acqui-tanie, cognomento Barbasan, de quo se expurgasse a multis assertum est. Constat tamen, quorumcumque manibus id patratum extiterit, eum in dicto castro sic evocatum in presencia delfini fuisse crudeliter peremptum. Qui, quod de hoc minime conscius fuerit, ymo factum vehementer exhorruerit, qui tamen adhuc juvenis et adolescens erat, constantissime et a se et a pluribus aliis assertum est semper. De qua re senciendi libertatem unicuique, prout volet, derelinquimus. Verumptamen sicut ex Aurelianensium ducis nece supra retulimus, sic et ex ista maxima in regno Francorum turbacio et detrimenta provenerunt, quemadmodum ex infra dicendis liquido apparebit.
Philippus nempe, filius ejus, vir utique magni animi et in rebus, tum belli, tum pacis, administrandis et gerendis industrius, tam crudelem necem patris et carissimi genitoris sui nimis indigne ferens, ad eam ulciscendam vehementer animum intendit, se Anglorum regi copulans et federe fortissimo devinciens, licet ad verum constet eis nunquam tanta prestitisse auxilia adversus Francos, quanta facile facere potuisset. Contra eos tamen fines suos non modo strennue defendit, verum eciam agros et terras suorum inimicorum gravibus sepe detrimentis atque dampnis affecit. Unde, cum duces nonnulli cum magno agmine illorum qui Arminiaci dicebantur, aggressi populare terras suas, ad Picardiam venisset, prope villam seu opidum Sancti Richerii confiictum satis periculosum habuit. Cujus licet inicio ambiguus et anceps futurus videretur exitus, nunc una, nunc altera partibus vicissim hostibus suis cedere incipientibus, in fine tamen cum satis magno hostium dampno victor evasit, eisdem partim cesis, partim fusis et sibi per fugam necessariam consulentibus. Ferturque in illo prelio miles effectus, cum primus ille conflictus foret in quo armatum eum interfuisse contigisset.
Et ita sepe inter Arminiacos appellatos et Burgundiones, diversis in locis et terminis, vario marte certatum est, et utriusque partis plura opida, castella et ville direpte et vastate.
Comme le dauphin Charles était à Montereau, sur la
rivière d'Yonne, avec de
nombreux chevaliers de ses domaines, et que non loin de là
se trouvait Jean, duc de Bourgogne,
accompagné d'une forte troupe de gens d'armes, ceux qui tenaient
le parti du dauphin et se trouvaient en sa compagnie, faisant semblant
de vouloir pratiquer et conclure paix et amitié avec le duc
de Bourgogne, organisèrent la venue de ce dernier à
la rencontre du dauphin, audit lieu de Montereau, après lui
avoir donné toutes les garanties et sûretés
possibles, comme pour traiter entre eux en toute bonne foi de cette
affaire de la paix. Mais comme il s'y présentait, ne soupçonnant
aucun piège et, du reste, contre l'avis de beaucoup des siens,
qui se doutaient grandement de quelque ruse et embûche, il
fut frappé à la nuque, en présence du dauphin,
et assassiné misérablement (1).
Qui fut ou qui furent les meurtriers, nous ne pouvons le préciser. En tout cas, les soupçons
se portèrent sur Tanguy du Chastel, dont il a été
question plus haut, et sur un autre notable et brave chevalier de
Guyenne, nommé Barbazan (2),
qui passe aux yeux de beaucoup pour s'être lavé de
cette accusation. Ce qui est certain, à quelques mains qu'il
faille attribuer l'exécution du crime, c'est qu'ayant été
convoqué audit lieu de Montereau, il y fut tué cruellement
en présence du dauphin. Que celui-ci n'en ait été
nullement complice, bien plus, qu'il ait eu horreur de la chose,
étant encore à ce moment jeune et adolescent, c'est
ce que, d'une seule voix, lui-même et plusieurs autres ont
toujours affirmé. Nous laissons à chacun la liberté
d'en penser ce qu'il voudra. Cependant, comme nous l'avons dit plus
haut du meurtre du duc
d'Orléans, celui-ci fut pareillement pour le royaume de France
la source d'un grand trouble et dommage, ainsi qu'il ressortira
clairement de ce qui sera rapporté ci-dessous.
Philippe, en effet, fils du dit duc (3), homme assurément
plein d'intelligence et habile à conduire et à gouverner
les affaires, tant de guerre que de paix, profondément indigné
de l'horrible meurtre de son père, auteur bien-aimé
de ses jours, appliqua fortement son esprit aux pensées de
vengeance. Il lia étroitement partie avec le roi d'Angleterre,
et bien qu'à la vérité il soit certain qu'il
ne fournit jamais aux Anglais contre les Français autant
de secours qu'il aurait pu aisément le faire, néanmoins
non seulement il défendit vigoureusement contre eux ses frontières,
mais encore il infligea aux champs et aux terres de ses ennemis
des pertes et des dommages souvent graves. Si bien que, certains
capitaines étant venus du côté de la Picardie
avec une forte troupe d'Armagnacs pour ravager ses terres, une rencontre
assez hasardeuse eut lieu. Le début
en fut incertain et l'issue en parut douteuse, tantôt l'un,
tantôt l'autre des partis en présence faisant mine
de céder. A la fin cependant Philippe sortit vainqueur, les
ennemis ayant subi de grandes pertes, les uns tués, les autres
enfuis ou se disposant à une fuite nécessaire. C'est
dans ce combat, dit-on, qu'il fut fait chevalier,
car ce fut la première rencontre à laquelle il prit
part en armure de guerre.
Ainsi, souvent Armagnacs et Bourguignons se combattirent
avec des alternatives diverses en divers lieux et localités,
et nombreux furent des deux côtés les places, châteaux
et villes pillés et ruinés.
Source
: "Histoire de Charles VII" par
Thomas Basin - éd. et traduction Ch.Samaran - 1933.
Notes :
1 Le 10 septembre 1419.
2 Arnaud-Guilhem, seigneur de Barbazan, fut accusé d'avoir trempé dans l'assassinat
de Montereau.
3 Philippe le Bon, fils de Jean Sans-Peur, est né le 13 juin 1396.
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