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Chronique
de Jean de Wavrin du Forestel
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Livre IV - Chap. VII . |
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omment les Anglois alans au secours du siège d'Orliens rencontrèrent les François, qui les assaillirent,
En ces jours, le duc de Bethfort régent, estant à Paris, fist assambler, tant des marches de Normandie comme de l'Isle de France et à l'environ, de quatre à cinq cens, que chars que charrettes, lesquelz, avec la diligence de plusieurs marchans, furent chargiés de vivres, artilleries et autres marchandises, pour mener devers les dessusdiz Anglois. Et après que ledit charroy et autres besongnes furent prestes, tout fu baillié à conduire à messire Jehan Fastot (1), grand maistre d'ostel dudit duc de Bethfort. Avec lequel furent commis, le prévost de Paris, nommé messire Simon Mahieu (2), le bastard de Thian, chevalier, bailly de Senlis, le prévost de Melun et pluiseurs aultres officiers des marches de l'Isle de France et d'environ, acompaigniés de seize cens combatans, et bien mil communes. A tout lesquelz se départi ledit Fastot de Paris, le jour des Cendres (3), et conduist par plusieurs journées ledit charroy et ses gens en bonne ordonnance jusques à ung village nommé Rouvroy en Beausse (4), séant entre Genville et Orliens. Auquel lieu estoient assamblés, pour les combatre, pluiseurs capitaines François, qui long temps par avant sçavoient assez bien leur venue. C'est assavoir, Charles, duc de Bourbon, les deux mareschaulx de France, le connestable d'Escoce et son filz, le seigneur de La Tour, le seigneur de Chauvegni, le seigneur de Graville, messire Guillaume de Labreth, le visconte de Thouars, le bastard d'Orliens, Jacques de Chabannes, le seigneur de La Faiette, Pothon de Sainte-Treille, Estievene de Vignolles, autrement apellé La Hire, messire Theolde de Walleperghe et pluiseurs aultres nobles hommes, qui tous ensemble avoient de trois à quatre mille combatans. Desquelz les dessusdiz Anglois savoient bien l'assamblée par aulcuns de leurs gens des garnisons qu'ilz avoient oudit pays. * Et pour tant, en grand diligence firent de leur charroy ung grand parc en plains champs, auquel ilz laissèrent deux yssues ouvertes, et se mirent tout ensamble dedens ycelui, c'est assavoir les archiers, gardant ycelles entrées, et les hommes d'armes, assez près ès lieux nécessaires. Et à l'un des costés, au plus fort lez, estoient les marchands, charretons, paiges et autres gens de petite deffence, avec tous les chevaux. Les quelz Anglois, en cest estat, attendirent bien deux heures leurs ennemis, lesquelz en grand bruit se vinrent mettre en bataille devant ledit parc, hors du trait. Et leur sambloit, entendu la noblesce et le grand nombre qu'ilz estaient, et qu'ilz n'avoient à faire qu'à gens de plusieurs tires, et n'y avoit que de cinq à six cens anglois de la nacion d'Angleterre, qu'ilz ne povoient eschapper de leurs mains et seroient tantost vaincus. Nientmains, les aulcuns faisoient grand doubte que le contraire ne leur en advenist, pour ce que les capitaines d'iceulx François ne se concordoient point bien ensamble. Car les uns, et par espécial les Escossois, vouloient combatre à pied, et les aultres vouloient demeurer à cheval. Et adonc, Charles de Bourbon fut fait chevalier, du seigneur de La Faiette ; et aulcuns aultres. Et entretant, ledit connestable d'Escoce et son filz se mirent à pied et avec eulx toutes leurs gens. Sy alèrent en assez brief terme, les ungs à pied, les autres à cheval, envayr et combatre leurs ennemis, desquelz ilz furent receuz très courageusement. Et commencèrent les archers Anglois, qui estoient très bien targiés de leur charroy, à tirer très raidement. Duquel trait, de plaine venue, firent redonder arrière d'eulx ceulx de cheval avec les hommes d'armes. Et lors, à l'une de leurs entrées, se combati le connestable d'Escoce et ses gens, qui, à brief comprendre, furent desconfis et mors en la place. Et fu mort messire Jehan Stouart, avec lequel furent mors son filz, messire Guillaume de Labreth, seigneur d'Orval, le seigneur de Chasteaubrun, le seigneur de Monpipel, messire Jehan Larigot, le seigneur de Verduisant, le seigneur d'Yvery, le seigneur de La Grève, messire Anthoine de Prully, et bien six vins gentilz hommes et aultres, jusques au nombre de cinq à six cens combatans, desquelz la plus grande partie estoient Escossois. Et les autres capitaines dessusdiz, à tout leurs gens, se départirent et s'en ralèrent ès parties dont ils estoient venus. Et les dessusdiz Anglois se rafreschirent ceste nuit oudit Rouvroy, et lendemain s'en partirent et s'en alèrent, à tout leur charroy, par aulcuns peu de jours, jusques à Orliens, moult joieusement, tant pour la bonne fortune qu'ilz avoient eue, comme pour les vivres qui leur menoient. Si fu la journée dessudicte, depuis ce jour jusques en avant [dite], en langage commun, la Bataille des harens. Et la cause de ce nom, si fut pour ce que grand partie du charroy desdiz Anglois estoit chargés de harens et autres vivres de quaresme. Pour laquelle male aventure ainsy advenue, Charles, roy de France, eut au cuer grand tristesse, véant de toutes pars ses besongnes venir au contraire et persévérer de mal en pis.
La dessusdicte bataille de Rouvroy fu faite la nuit des Brandons, environ trois heures après midi (5) * . Et n'y eut mort de la partie des Anglois, des gens de nom, que ung seul homme nommé Bresantiau, nepveu de messire Simon Morhier, prévost de Paris. Et y furent fais chevaliers, de la partie des Anglois, Le Galois d'Aunay, seigneur d'Orville, le Grand Raulin et Loys de Luru, savoyen. Et povoient estre lesdiz Anglois environ seize cens combatans de bonne estoffe, sans les communes. Et comme dit est dessus, les François estaient bien de trois à quatre mille. Et furent fais chevaliers avec ledit Charles de Bourbon, le seigneur
de ... (6) et le seigneur de Chasteaubrun. Et n'y eut ce
jour prins, que ung prisonnier, qui estoit escossois.
Source : Chronique de Monstrelet - Édition Buchon.
Wavrin reprend intégralement Monstrelet - t.V - chap.56.
Notes :
1 Lire Falstolf.
2 Lire : Simon Morhier.
3 Le 18 février 1429.
4 Rouvray St-Denis (Eure-et-Loir).
5 Le 21 février 1429.
6 Ici un mot en blanc dans le ms. 8346. Vérard ne mentionne que Charles de Bourbon et le seigneur de Chasteaubrun.
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