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Chronique
d'Enguerrand de Monstrelet
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L.I-258 - [Comment messire Jehan de Luxembourg conquist ceste saison plusieurs fortresses. Et autres matières.] |
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n convient parler d'une armée que fist en ce temps messire Jehan de Luxembourg de par les roys de France et d'Angleterre. Et eust avec lui plusieurs seigneurs de Picardie, c'est assavoir messire Hue de Lannoy, lors maistre des arbalestiers de France, le vidame d'Amiens, le seigneur de Longueval, le seigneur de Saveuses, le seigneur de Humbercourt et très grant nombre de chevaliers et escuiers de Picardie. Vérité est que ou mois de mars ensuivant, fist son mandement et assembla ses gens d'armes entour la ville d'Encre; et là furent faictes les monstres. Et quant ce fut fait, peu y en avoit qui sceust auquel costé il vouloit aler. Mais en la fin se tourna vers la ville d'Amiens, et delà devers un meschant chastel nommé Le Quesnoy, qui estoit à Jehan d'Arly, dedens lequel s'étoient boutez environ quarante sacquemans tenant la partie du Daulphin, qui avec ceulx d'Araines avoient moult fort travaillé le pays de Vimeu et sur la rivière de Somme depuis Amiens jusqu'à Abbeville. Si estoient venus devant ledit chastel, ung jour devant, pour garder qu'ilz ne s'en fuissent, le vidame d'Amiens et le seigneur de Saveuses, à tout leur gens. Et après que ledit de Luxembourg fut arrivé et logié devant ladicte forteresse, fist ses engins drécer contre les murs d'icelle, dont elle fut en brief dérompue en plusieurs lieux. Pour quoy ceulx de dedens, voiant que point ne povoient faire de résistence contre si grande puissance, requirent jour de traicter. Et finablement furent d'accord avec ledit seigneur de Saveuses, qui à ce estoit commis de par messire de Luxembourg, par condicion qu'ils rendoient la place et tous les biens qui estoient dedens à la volonté dudit de Luxembourg, et aussi que la plus grant partie des sacquemans dessusdiz demouroient à voulenté. Et Waleran de Saint-Germain leur capitaine, qui à brief les trahy et leur fist entendre qu'ils auroient leurs vies saulves, fist sont traictié par ainsi qu'il s'en yroit et auroit bon et seur sauf-conduit. Après lequel traictié rendirent ladicte fortresse, et puis furent tous ensemble menez en une maison de la ville, et tantost après en furent pendus audit lieu du Quesnoy une partie, et les autres furent envoiez au bailli d'Amiens, lequel les fist mener au gibet; et entres les autres y fut mis ung gentil homme nommé Liétard de Piquegny, qui se disoit prouchain parent du vidame d'Amiens. Et ce fait, ladicte fortresse fut désolée, mis en feu et ruée jus de fond en comble. En après ledit Jehan de Luxembourg s'en ala vers Gamaches, à tout son ost, et là lui vindrent de deux à trois cens combatans anglois soubz la conduite de messire Raoul de Boutiller, à tout lesquelz il ala mectre en l'obéissance des roys de France et d'Angleterre aucunes fortresses ou pays de Vimeu, c'est assavoir Laneroy, Héricourt et aucunes autres.
Item, en ce temps aussi les gens du seigneur de Gamaches prindrent d'emblée la fortresse de Mortemer vers Mondidier, que tenoit le bastard de Mortemer, nommé Gérard, qui estoit lors au pays de Vimeu, en l'armée et exercite de Messire Jehan de Luxembourg. Dedans laquelle fortresse fut mise forte garnison de Daulphinois, qui fort travaillèrent le pays.
Et d'autre part les Daulphinois de Marcoussis, environ deux cens, avec leur capitaine qui se nommoit Mignon, alèrent par nuit, secrètement, prendre le pont de Meulenc, y firent moult de maulx, et après, en entencion de le tenir, y mirent grande garnison. Mais le roy d'Angleterre y envoya hastivement le conte de Conversen et autres de ses gens en grant nombre, lesquelz l'asségèrent et tantost après leur fut rendue, par tel que les asségez se partiroient saulvement à tout leurs bagues.
Source : La chronique
d'Enguerrand de Monstrelet - Tome IV (L.Douët d'Arcq - 1860)
Notes :
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