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Jean Germain

e fut un prélat bien méritant que Jean Germain, évêque de Nevers, en 1429, et de Chalon-sur-Sâone en 1436. Il devait tout à la cour de Bourgogne. Né à Cluny, les moines avaient distingué ses précoces dispositions, et la duchesse, femme de Jean sans Peur, s'était chargée de les cultiver. Elle l'avait fait élever à l'Université de Paris, d'où il était revenu avec le titre de docteur brillamment conquis.
  Attaché d'abord à la cour en qualité de chapelain de l'évêque de Tournay, chancelier du duc, il avait vu à la suite pleuvoir sur lui les dignités, les honneurs, les marques de la plus intime confiance. Confesseur de la duchesse Isabelle, chancelier de la Toison d'Or, le duc l'avait député à Bâle, à Ferrare, fait assister au congrès d'Arras, lui avait confié de nombreuses légations, et même, en quelques circonstances, lui avait délégué la présidence de son conseil. Et pourtant, avant sa mort survenue en 1461, Jean Germain devait encourir la disgrâce d'un maître si bienveillant. Parmi plusieurs autres ouvrages, l'évêque de Chalon en écrivit un sous ce titre : De virtutibus Philippi, ducis Burgundiæ et Flandriæ, qu'a édité en 1876, dans les Chroniques belges, M. Kervyn de Lettenhove. L'auteur le dédia au comte de Charolais, le futur Charles le Téméraire, et il le termine en engageant le jeune prince à imiter les vertus de son père et à éviter ses vices, parmi lesquels il signale ses infidélités conjugales. Le fait était notoire; semblable restriction n'en amena pas moins la disgrâce du prélat.
  C'est dans cet ouvrage que la flatterie lui a fait insérer sur la Vierge-guerrière des lignes aussi fausses que malheureuses. On les regrette pour un prélat par ailleurs recommandable.



  Iterum de campestri bello reditur apud Pontem a Choisy, ad supra Compendium, acriter pugnatur; præsidium concutitur, petrariis dejicitur, et voracibus flammis cuncta conflantur ; itur ad Compendium magnum hostium præsidium; advenit Johanna quæ puella apud Francos ad præsagium famabatur; standaria et belli signa superstitioso anathemate consecrat, in ventum deplicat. Irrumpit in nostros; sed ab his strata (la chaussée) præoccupatur; pro mensura ejus diutius confligitur. Nunc hostes compelluntur ad præsidium, nunc nostri se intra castra continent; alii progressi hostes in nostros irruunt; per stratam nostri validum immittunt exercitum, depelluntur hostes, equis dejiciuntur, sua frangitur cohors, ad pontem aufugiunt, præcursores nostri vallum subintrant; ductili ponte in altum ducto, hostes in flumen ruunt; plurimi humanitate nostrorum cum lancearum adjumento de fluvio emergunt. Illa obtestanda mulier, mulierum risus et virorum offendiculum, more militantiumarmis contecta lanceæ ictu adverso dejiciitur equo; sua figmenta pereunt, suæque sortilegæ evanuere artes; varia gesticulatione sese occultat. Cognita capitur; principi offertur; à fidentibus armis exuitur; quod se virum fuit mentita sexus discernit, nam prælo armorum constrictæ mammæ ad ventrem fluunt; turgidæ nates ad nænias matrum aptissimam consignant; gesticulatione tamen atque procaci verborum audacia se virum mentitur. Postremo unde sit et gestorum seriem patefacit, ad Anglos mittitur, et, justitia Ecclesiæ mediante, Rothomagi ignibus adjectapænas debitas luit.  

                                                         

  « La prise du pont à choisy et de la Pucelle . — De la guerre en rase campagne, l'on vient au pont de Choisy, au-dessus de Compiègne. On combat avec acharnement; la place est canonnée, les boulets de pierre en renversent les murailles; les flammes dévorantes livrent tout à l'embrasement.
  On arrive à Compiègne, la forte place des ennemis. Jeanne, que les Français en guise de bon présage appelaient la Pucelle, s'y enferme. Elle consacre par des rites superstitieux les étendards et les bannières de guerre, et les fait flotter au vent. Elle se jette sur nos gens ; mais ils se sont déjà emparés de la chaussée; c'est un combat acharné sur toute la longueur. Tantôt les ennemis sont refoulés vers la place, tantôt nos hommes sont rejetés dans leur camp; quelques ennemis plus hardis viennent les y attaquer. Nos gens font déboucher une vaillante armée à travers la chaussée ; les ennemis sont refoulés ; ils sont renversés de leurs chevaux ; leurs rangs sont rompus; nos hommes les préviennent, occupent l'entrée du pont, pénètrent dans leurs lignes. Un pont-levis est jeté ; les ennemis tombent dans le fleuve. Plusieurs échappent des eaux, grâce à l'humanité de nos guerriers qui leur tendent le bout de leurs lances.
  Cette détestable femme, la risée des femmes, le scandale des hommes, couverte de ses armes à la manière des gens de guerre, est renversée de son cheval d'un coup de lance qui la frappe en pleine poitrine ; ses artifices disparaissent; ses sortilèges s'évanouissent; elle cherche à se dissimuler par la diversité de ses maintiens ; elle est reconnue ; elle est prise ; on l'amène au prince ; elle est dépouillée de sa trompeuse armure; son sexe montre bien que c'est à tort qu'elle feint d'être un homme. Débarrassés de la pression de l'armure, ses seins retombent, et montrent qu'elle est apte aux soins de la maternité, quoique à sa tenue et à l'insolence de son langage, on eût pu la prendre pour un homme.
  Enfin elle déclare d'où elle vient, la suite de ses faits; on l'envoie aux Anglais; et grâce à la justice de l'Église, elle subit dans les flammes le châtiment qui lui était dû. »


                                                 


Source : Présentation et traduction par J.B.J. Ayroles, "La vraie Jeanne d'Arc - t.III, La Libératrice", p.534 et suiv., texte original en pièces justificatives.

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